Les sons et les langues

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Les linguistes sont des lettrés. Des gens qui ont des lettres. Et la lettre est l’écrit. Tout est dit : les linguistes étudient moins les langues orales que les langues écrites. Les textes. Sans texte, pas de langue. Sans écrit, pas d’étude. Nous vivons la dictature de l’écrit, à l’ombre millénaire des textes fondateurs.

 

La principale barrière entre les langues, c’est le mode d’écriture. Depuis Babel sans doute, tant de caractères ont vu le jour, tant d’alphabets, tant de transcriptions différentes pour les mêmes sons ! Fort heureusement, l’image est dans les livres, et quand elle y est, le message passe d’abord par elle. Dans la bd, outre l’image reine, il y a du texte, et même du son : les onomatopées chères à Gainsbourg : chebam, paw, bang, whizzzzz ! et j’en passe. Dans la bd, le son donne le sens.

Samson PatsenceSans son, pas de sens héros possible d’une bd à venir ?… Mais les héros d’avant, les vrais, historiques ou légendaires, auraient-ils du sens dans leur nom, déjà, qui raconte leur histoire ? Oui, sans hésiter. C’est même pour ça qu’ils sont célèbres. A notre insu…

Un sens profond, sacré, se niche dans les phonèmes de base qui forment certains mots de langues actuelles, toutes les langues.  On nous a conté cette belle histoire des langues indo-européennes, famille aux multiples branches qui a donné, entre autres, le Français moderne. Oubliez cette fable, car c’en est une. Toutes les langues se valent sur le plan sacré. Chacune d’entre elles contient en secret le sens profond de notre histoire. En secret, oui, bien caché. Depuis Babel, c’est le bordel en ce domaine. Un bordel voulu et bien organisé. Diviser pour régner, disait Machiavel. La recette est vieille comme le monde : elle remonte aux dieux terraformeurs.

Pour se comprendre et pour être compris, ces dieux-là ont donné à l’humanité un langage, leur langage. Voyez l’épisode de  Babel, ou Sumer et ses textes explicites : les humains étaient comme des animaux, les dieux leur ont tout appris. Tout, c’est à dire à parler, aussi.

Du fait de leur considérable extension géographique, les Homo erectus parlaient probablement plusieurs centaines de langues différentes il y a deux millions d’années. Les Homo erectus, comme leur nom l’indique, étaient des Hommes debouts, des individus intelligents dressés sur leurs pattes arrières, tout comme nous. Il est impensable qu’ils n’aient parlé qu’une seule langue, dit Locquin. Savant trop peu connu, Marcel Locquin est pour moi le plus prodigieux des linguistes – et pourtant il n’en a pas le titre. 

Pour comprendre son point de vue, il faut oublier une autre fable – on nous en a tant conté – l’idée d’une seule humanité et de son évolution linéaire depuis Lucy l’Africaine. D’ailleurs on sait aujourd’hui que la première femme n’est pas Lucy, mais Toumaï. Et on saura demain que l’humanité n’est pas née en Afrique, mais à bord d’un vaisseau spatial gigantesque. On sait aussi que l’humanité actuelle n’est pas la première, mais la cinquième. Sur ce point, de nombreuses traditions convergent. Mais les historiens et les linguistes s’en tapent.

De ça, pourtant, Locquin ne parle pas. Son sujet est ailleurs. Ce puits de science a décortiqué des centaines de langues vivantes et mortes, en ne considérant que les sons. Dans toutes les langues du monde, figurent quelques sons élémentaires, briques fondamentales sur lesquelles ces langues se sont construites.

Ces briques sont les phonèmes, des sons basiques. La principale découverte de Locquin, ce sont les vingt phonèmes fondamentaux qui se retrouvent dans la plupart des langues vivantes ou mortes. Ces phonèmes archétypaux ont le même sens profond quelle que soit la langue considérée.

 

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Selon Marcel Locquin, le phonème OR est dérivé d’un des vingt fondamentaux, comme AR, qui renvoie à l’autorité agissante, dans toutes les langues du monde. Un autre dérivé immédiat est UR : parfois, des différenciations peuvent se faire par l’adjonction de voyelles, mais le sens est porté par la consonne. Les langues sémitiques et d’autres langues d’Asie ont conservé ce code.

Le phonème OR est présent dans ORion, et aussi dans ORigine. OR comme l’âge d’OR, qui est le premier âge. UR comme URsprung, UR comme la première ville de Mésopotamie, cité natale d’Abraham, selon la Bible. Ceci est tout sauf un hasard, vous l’aurez compris. Ce phonème indique la provenance, l’endroit dont sont venus les dieux, nos procréateurs : notre ORigine.

La cité d’Ur avait deux divinités tutélaires : d’une part Ann ou Anu, déesse ou dieu du ciel.  Ahn signifie ancêtre en allemand, comme le AN du mot ancêtre. Et d’autre part Inanna. Oui, InANNa, déesse première des Sumériens, comme DANa ANN, déesse première des Tuatha d’Irlande. Inanna s’appelle aussi IshtAR, déesse de la fertilité, qui a donné EastER.Pâques en Anglais Les mots parlés se répondent au travers des langues et du temps, et leur dialogue donne du sens.

D’où sont venus les dieux terraformeurs ? Si ORion est une ORigine identifiable, URsa MajOR l’est pareillement. Ursa Major, la Grande Ourse,  compte une étoile nommée ALCOR, où Xavier Séguin voit une origine possible. Pour moi, UR est un endroit plus vaste dans les Cieux, dont nous venons sûrement; le mot allemand Ursprung signifie littéralement le saut depuis Ur, et son sens actuel le confirme : Ursprung, c’est l’origine, la provenance.

 

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Que font les exilés qui débarquent en terre inconnue ? Ils donnent à leur établissement le nom du lieu d’où ils sont venus. Voyez la Nouvelle-Orléans, la Nouvelle-Zélande, New York… ou les 38 villes du monde qui s’appellent Paris ! Voyez aussi les troublantes similitudes toponymiques entre l’Afrique et les Amériques, telles que les a relevées Pathé Diagne.

Les voyageurs des étoiles n’ont rien fait d’autre. Débarquant jadis sur notre planète encore sauvage, ils se sont fixé dans l’OURAL, UR-AL. Et plus précisément dans la très antique cité d’ARkaïm. Comme archaïque.  Arkaïm, cité de l’Oural. Nom évocateur pour un site archéologique que l’on découvre à peine de nos jours, dans une région, l’Oural ou Ur-All, littéralement l’origine de tout. Le fil à tirer n’est pas si caché que cela…

 

Quelle mâle gaîté, si triste et si profonde / Que, lorsqu’on vient d’en rire, on devrait en pleurer!
Alfred de Musset