Kukulkan le Maya

 

Lugh le fils du Soleil, Lugh à la face étincelante eut trois fils, trois garçons magnifiques, tous trois fils du Soleil, comme leur père, tous trois dieux géants à la face brillante. Tandis que Ram le Bélier d’Hyperborée conquit et civilisa le monde vers l’est, Enki et Cùchulainn partirent vers l’est. Dans les Andes, Enki sous le nom de Tiki posa les bases d’une civilisation durable, policée, provisoirement guérie de sa passion pour les sacrifices humains, qu’il combattit violemment.

Cuchùlainn, le troisième fils, décide  de changer de vie. Rompant avec ses mœurs guerrières et le mauvais souvenir de son voile rouge sur les yeux annonçant la montée en lui d’un terrible désir de meurtre, il devient une sorte de moine-soldat et, avec une petite troupe de fidèles, met le cap sur la terre d’Amérique, qu’il aborde au Yucatan.

Là, sous le nom de Kukulkan, il pacifie les sauvages, les enseigne et les soigne. Le demi-dieu a jeté sa gourme. Sa frénésie de meurtre, le voile rouge qui le poussait jadis à tuer, s’est mué en une force tranquille qui refuse toute violence et toute effusion de sang. Il fait interdire les sacrifices humains et répand en ces terres un message d’amour fraternel.

Sa jeunesse turbulente et dissolue s’est muée en un chemin d’éveil fait de douceur d’altruisme et d’austérité. Il protège les faibles et soigne les malades. 

A la fin, quand Tezcatlipoca le Miroir Fumant, le provoquera en duel, Quetzalcoatl-Kukulkan n’aura d’autre issue que de fuir, pour ne pas rompre son serment de non-violence.

 

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Ce portrait est confirmé par celui qu’en font les traditions locales. Dans le Popol Vüh des Quichés, par exemple, on nous présente les hommes de Kukulkan comme des moines-savants : « Ils étaient des seigneurs de génie. Morts, famines, querelles, tout leur était connu par avance »  Des hommes de savoir.

Mais aussi des hommes de pouvoir : « Ils étaient grands en eux-mêmes » De grands sages, mais pas des dieux : « Ils jeûnaient sur de longues périodes et faisaient pénitence devant leurs dieux. » (source)Popol Vüh Les dieux ont des dieux ?  Ça me rappelle Mickey la souris qui a un chien plus petit que lui. On va où, là ? Quand je pense à tous ces docteurs de l’église, tous ces rabbins savants, tous ces ulemas érudits… Tous ces fous de Dieu qui se sont cassé la tête pendant des siècles pour justifier l’injustifiable…

Dieu est unique, ils en sont sûrs, et pourtant leurs textes saints le présentent au pluriel. Mystère total.

Ça les a stimulé. Ils ont inventé des tas de trucs. La cabbale, la mystique soufi, la doctrine chrétienne, beaucoup de bruit pour rien. La Source se moque de ces gazouillis. Vertige de la mise en abîme. Où est passé Dieu l’Unique ? Ces dieux qui prient leurs dieux, un double-fond s’ouvre, on plonge tête la première dans le monde d’avant où s’ouvre le monde précédent qui donne sur un monde antérieur qui révèle un monde encore plus vieux.

 

 

 

Le temps n’est pas linéaire comme nous le pensons, ni cyclique comme le pensait les anciens. Le temps est gigogne. Les civilisations poussent les unes dans les autres, comme des matriochkas. Les mythes sont comme les arbres : ils grandissent par l’intérieur. Et les mammifères, aussi. L’homme grandit à partir de son centre. Le foetus qui pousse dans la matrice fait de nous des animaux-gigognes : chaque année nous voit grandir un peu, une nouvelle peau subtile remplace l’ancienne.

Une anti-mue, si l’on veut. Nous sommes des anti-reptiles. 

Nous sommes des êtres gigognes dans un univers gigogne. Chacun de nous est le terminal tridi d’un être multidimensionnel engagé dans une infinité d’univers parallèles. Et comme le croyaient les anciens Mayas, il y a toute probabilité que l’univers ne soit pas infini, mais holographique. Ils croyaient aussi que le temps n’est pas linéaire, mais cyclique. Ce qui se passe ici se passe aussi dans une infinité d’endroits. Ce qui arrive maintenant est déjà arrivé bien des fois et se reproduira encore et encore.

 

C’est peut-être le coeur qui s’ouvre, baby groove.
Michel Jonasz