N’invoquez personne !

 

On a vu comment, dans une certaine tradition kabbalistique revue par des psychanalistes québécois, on peut en venir à considérer les anges comme des émanations spirituelles, facteurs de progrès intérieurs, et combien leur invocation est précieuse. Je m’inscris en faux, et radicalement.

 

La piste des anges conçus comme des champs de conscience est certes bien intéressante, et typique des salades de rabbins. Ces érudits adorent couper les cheveux en quatre et vaticiner à n’en plus finir sur des questions sans réponse. Comme tous les amateurs de questions, les rabbins ont horreur des réponses.

Tant pis, je donne quand même la mienne, qui vaut ce qu’elle vaut, pas moins que la leur. Les anges ne sont pas seulement des champs de conscience, des vibrations d’énergie, ou je ne sais quoi d’éthéré et de subtil. Les anges sont aussi réels que vous et moi. Surtout moi, car qui me dit que vous n’êtes pas un robot virtuel ?

Alors écoutez ça : ange en verlan, ça donne quoi ? ça donne ge an. Mais oui, géant. Les anges et les géants, ce sont les mêmes, mes chers amis. Les mêmes. Vus par deux traditions différentes.

Les anges ont bel et bien existé, la plupart d’entre eux étant de solides guerriers géants, armés de rayons de la mort et autres joyeusetés, comme l’épée laser que la Bible appelle l’épée flamboyante des Kérubim – les redoutables chérubins tueurs placés devant la porte du paradis terrestre pour que jamais les humains n’y puissent retourner.

 

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Avec le temps, on a pris tout ça pour des fadaises improbables, alors les rabbins se sont radinés avec leur ciseaux à couper les cheveux dans l’épaisseur, et pendant des siècles ils ont rabbiné à n’en plus finir, ils s’en sont donné à cœur joie les malheureux dindons, si bien que leurs salades pas fraîches ont perdu la moindre authenticité, la moindre trace, parfum, saveur de la version première. Tant va la cruche à l’eau qu’elle finira bien par casser.

Ces messieurs donnent dans l’éthérique, le sublime, la fine fleur de l’intellect qu’ils prennent pour de l’élévation. Ils s’abaissent, au contraire. En nous masquant la vérité derrière leurs savants paravents couverts d’âneries pompeuses.

Comprenez qu’en cultivant le mental, on développe l’ego, la différence, la hiérarchie. Il y a un réel danger à invoquer des entités. Même si vous les appelez des anges, vous ne leur ôterez pas leur dangerosité.

Les spirites et ceux qui invoquent les esprits ont parfois de cruels déboires, des problèmes qui peuvent être lourds.

On ne s’aventure pas dans les profondeurs infinies de l’océan des possibles avec un masque et un tuba. Pour ces parages limites, pas de leçons, pas de secours.

Tu invoques gentiment tel ou tel ange sur qui tu ne sais rien – ou presque : les ragots non vérifiés de tel ou tel site – et quand tu crois planer avec les anges, c’est juste « vol au-dessus d’un nid de coucou », et le coucou, c’est toi, pauvre fou.

« Ne te laisse jamais envahir par aucune entité psychique, égrégor, fantôme, esprit errant, ectoplasme, allié ou autre : il pourrait bien ne plus te rendre les commandes » aimait à dire le nagual Juan Matus, cité par Carlos Castaneda

 

 

N’écoute pas les irresponsables, n’invoque pas les anges ni les démons, ce sont les mêmes. Personne ne vend de ticket pour l’infini. Il n’y a pas de recette magique pour le nirvana express. Il n’y a pas de paradis pour tous, il n’y a pas de cours pratique de kabbale, et heureusement, ça serait un beau gâchis.

La compagnie des anges est peut-être bonne pour les morts, et encore ! Mais elle ne vaut rien aux vivants. N’invoque personne, et tant que tu y es, ne suis personne non plus.

« Car nous n’avons pas à combattre contre le sang et la chair, mais contre les principautés, contre les puissances, contre les Seigneurs du monde, gouverneurs des ténèbres de ce siècle, contre les malices spirituelles qui sont dans les lieux célestes. » (Éphésiens 6 : 12)

 

Reste dans ta lumière, elle est ton seul recours. Et connais-toi toi-même.

 

 Nous sommes tous uniques, mais la plupart sont assez nombreux quand même.
Stef Kervor