Jason sur l’île sans hommes

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par Apollonius de Rhodes

 

« Tandis que Jason et les Argonautes accostent sur l’île de Lemnos, ils voient sur le rivage des femmes en grand nombre pour les accueillir. Mais aucun homme, jeune ou vieux. Jason ne s’en émeut pas.

Le Héros se drape d’un ample manteau, ouvrage de Minerve, qui le lui avait donné lorsqu’elle travaillait sur les plans du vaisseau Argo, afin qu’Argus puisse en régler les dimensions. L’éclat du manteau surpassait celui du soleil. Le fond était rouge, et sur les bords, couleur de pourpre, étaient représentés avec un art infini, différents sujets.

On y voyait les Cyclopes sans cesse occupés aux mêmes travaux, fabriquant un foudre pour Jupiter, dont l’éclat éblouissait les yeux. Il n’y manquait plus qu’un rayon qui déjà s’étendait sous les coups redoublés des marteaux, au milieu d’un tourbillon de flammes.

On y voyait aussi les deux fils d’Antiope, Amphion et Zéthus. Près d’eux s’élevait une ville qui n’était pas encore couronnée de tours, c’était Thèbes dont ils venaient de jeter les fondements. Zéthus portait sur ses épaules un rocher semblable au sommet d’une haute montagne et marchait avec peine, courbé sous ce fardeau. Près de lui Amphion, faisant résonner sous ses doigts sa lyre dorée, se faisait suivre par une pierre deux fois plus grande.

Vénus y était représentée la main appuyée sur le bouclier du dieu Mars. Sa tunique détachée tombait d’un côté sur son bras laissant découvert une partie de son sein, image que répétait encore l’airain poli du bouclier.

 

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Plus loin on aperçoit de gras pâturages au milieu desquels les fils d’Électryon tâchent de repousser les Téléboens venus enlever leurs troupeaux. Une égale fureur anime les combattants. L’herbe est teinte du sang qui se mêle avec la rosée, mais enfin le grand nombre l’emporte et les brigands sont vainqueurs.

Près de là deux chars font la course. Pélops secoue avec ardeur les rênes de ses chevaux. Le second est conduit par Myrtile. Près de lui, Oenomaüs, levant sa lance pour percer son vainqueur, tombe sur son essieu brisé.

 

jason-pied-200poOn voit ensuite Apollon dans un âge encore tendre, perçant d’une flèche le téméraire qui veut entraîner sa mère. C’est Tityus, fils de Jupiter et d’Élaré.

Enfin, on avait représenté sur ce manteau Phrixus prêtant l’oreille au bélier qui semble lui parler. En les voyant, on est saisi d’étonnement. On tend l’oreille pour les entendre, et dans cette attente, on est émerveillé.

Tel était le présent que Jason avait reçu de Minerve. Il prit ensuite un long javelot, gage d’hospitalité qu’Atalante lui avait donné sur le mont Ménale. Cette jeune héroïne voulait alors marcher elle-même à la conquête de la Toison d’or, mais Jason l’en détourna, craignant que sa beauté ne charmât les Argonautes et n’excitât parmi eux la discorde.

Dans cet équipage, Jason s’avançait vers la ville, semblable à un astre brillant. A sa vue les portes s’ouvrirent.

Iphinoé le conduisit à travers un superbe portique dans l’appartement de sa maîtresse et le fit asseoir devant elle sur un siège richement orné. La jeune reine baissa les yeux et rougit d’abord à la vue du Héros :

« Étranger, lui dit-elle, cette ville n’est point habitée par des hommes. Ils sont allés cultiver les campagnes fertiles de la Thrace. Quand Thoas mon père régnait sur nos citoyens, ils s’embarquèrent plus d’une fois pour aller ravager la Thrace. Ils en revenaient chargés de butin, ramenant avec eux toutes les jeunes filles qu’ils pouvaient enlever.

C’était un piège que Vénus leur tendait. Bientôt cette perfide déesse les plongea dans un tel aveuglement qu’ils abandonnèrent leurs femmes légitimes pour se jeter entre les bras de leurs captives. Les traîtres ! Une race infâme commençait à croître, les enfants légitimes étaient méprisés.

 

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Un dieu nous inspira enfin le courage nécessaire. Un jour qu’ils étaient allés faire une nouvelle incursion dans la Thrace, nous leur fermâmes au retour les portes de la ville, pour qu’ils aillent s’établir ailleurs avec leurs captives. Ils reprirent le chemin de la Thrace, où ils habitent aujourd’hui.

 

adieux-jason-hypsipyle-200poNe craignez donc plus, ô étranger ! de vous mêler parmi nous. Je dirai plus, si vous voulez fixer ici votre demeure, le sceptre de Thoas vous attend. Vous régnerez sur une contrée qui ne peut manquer de vous plaire, puisque notre île est la plus fertile de toutes celles que baigne la mer Égée. Allez donc trouver vos compagnons, faites-leur part de mes offres et ne restez pas plus longtemps hors de cet ville. » Ainsi parlait la reine de Lemnos, dissimulant avec adresse qu’elles avaient massacré sans pitié tous les hommes de l’île.

Jason lui répondit en ces termes : « Hypsipyle, nous recevons avec reconnaissance les secours que vous nous offrez si généreusement. Quant au sceptre, qu’il reste entre vos mains : le Destin m’entraîne loin de ces bords, je vole aux combats qu’il m’a préparés. »  

En achevant ces mots, il toucha la main de la reine et partit aussitôt. Des jeunes filles sans nombre l’accompagnèrent jusqu’aux portes de la ville en faisant éclater leur joie. Quelque temps après, elles montèrent sur des chars qui renfermaient des présents de toute espèce et arrivèrent au rivage lorsqu’il finissait de raconter à ses compagnons le discours d’Hypsipyle. 

Elles engagèrent elles-mêmes les Argonautes à les suivre, et ceux-ci se laissèrent facilement entraîner, car Vénus, pour complaire à Vulcain qui voulait voir bientôt son île chérie peuplée de nouveaux habitants, avait elle-même fait naître ce doux désir dans le cœur des Héros.

Jason retourna près d’Hypsipyle, et chacun de ses compagnons suivit celle que le hasard lui donna pour guide. Cependant Hercule et quelques autres, dédaignant les offres des Lemniennes,Haha ! Sacré Hercule, il était gay restèrent près du vaisseau. » (source)http://remacle.org/bloodwolf/poetes/falc/apollonius/livre1.htm

 

 

Ce texte grec est assez tardif – Apollonius de Rhodes, son auteur, a vécu au 3e siècle AEC, tandis que les événements qu’il dépeint remontent, pour leur part, aux environs du 10e millénaire AEC. Faites le compte : Apollonius n’a que 2300 ans d’écart avec nous, tandis qu’il en a près de 8000 avec Hercule et Jason ! 

C’est pourquoi, contrairement aux textes plus anciens, comme les textes sacrés shivaïtes et hindouïstes, on y cherchera en vain la description d’armes à feu, d’engins volants et autres traces de technologie électrique ou électronique. N’y voyez pas le résultat d’un complot. Il s’agit tout simplement d’un oubli. Pas seulement un oubli de l’auteur. Tous les humains, à cette époque, avaient totalement oublié la science avant-gardiste des dieux d’avant. 

 

 

La loi d’oubli est implacable, ici comme ailleurs, elle a fait son œuvre.  Je pense que la mémoire ne pouvait pas nous revenir avant que nous soyons nous-mêmes en maîtrise de ces technologies. C’est ce qui nous permet de reconnaître et d’identifier ces mêmes technologies lorsqu’elles sont évoquées par les auteurs antiques. 

Mes lecteurs sagaces auront déjà noté, derrière les mots d’Apollonius, l’évocation d’une réalité technologique. La description du manteau de Jason retient toute mon attention. Zeus se fait fabriquer son arme par les Cyclopes, grands spécialistes des forges et de l’électronique. Ils maîtrisaient la technique du laser, et savaient juguler la puissance des éclairs, aussi les nomme-t-on Maîtres de la Foudre.

Zétus et Amphion, pour construire Thèbes, utilisent leur force de géants, mais aussi une technique sonore pour ôter la gravité aux pierres – technique figurée par la musique d’une flûte. Et pourquoi pas ? On se souvient des trompettes de Jéricho… Un son peut briser le cristal, d’autres sons ont d’autres effets. Certains sont bénéfiques, d’autres dévastateurs. Leur étude et leur reproduction est l’objet de la sonologie pratique.

Allez-y, cherchez les anomalies dans ces vieux mythes, traquez les anachronismes. Bientôt ce jeu va devenir réflexe, et s’ouvrira pour vous le chemin des merveilles. Cette page illustre une autre vérité cachée. Trouverez-vous laquelle ? Cherchez bien, la solution vous sera donnée sous peu. 

 

De nos jours il ne subsiste pas le moindre vestige de la science sacrée, c’est le règne du savoir profane, de l’ignorance qui se prend pour science et se complaît dans son néant.
René Guénon