Chut !

On se tait. On observe le silence jusqu’à ce que les rôles s’inversent. Jusqu’à ce que le silence nous observe. En silence, bien entendu. Ai-je dit « bien entendu » ? Entend-on le silence ? Oui, s’il est assourdissant. Et c’est le cas présent.

Les champs, les bois, les maisons mortes
Tout se tait
Le printemps palpite à l’aorte
J’y étais

Quand je ne peux plus visiter
La nature
Il y a toujours l’autre côté
L’aventure
Dans l’infini domaine astral
J’oublie la
Fumée de ganja, du chitral
Le cola
Je n’ai besoin que de mes ailes
L’autre vie
S’apprête à m’accueillir chez elle
Je revis

Je vais retrouver mes copines
Si jolies
Pierrot va mettre Colombine
Dans son lit
Je veux voir la fée qui rigole
Le lutin
Qui vocalise avec son troll
Tôt matin
Les korrigans et les géants
Font la fête
Dès que je suis chez eux j’ai en-
vie d’en être

Pour revenir dans six semaines
J’imagine
Qu’il suffira d’une heure à peine
Chez les djinns

J’ai pris la main d’une éphémère
Œil de faon
Dans d’autres vies je fus sa mère
Son enfant
Mignonne allons-voir si la rose
D’Alhambra
A ce parfum qui te rend chose
Dans mes bras

Le ciel est par dessus le ciel
Si tranquille
Et la comète artificielle
Sans bruit file
Le premier ciel a disparu
Loin derrière
Sans cheval trace ma charrue
Son ornière
Que la navette d’Odessa
Crashe en l’air
Il en faudrait bien plus que ça
Pour te plaire

Reviens fille verte des fjords
Fière et digne
Tes cheveux d’elfe aimé du Lord
Of the Ring
Que reste-t-il donc du printemps
Quand l’hiver
Brûle à la fois mon cœur content
Tes yeux verts

Tintamarre assourdissant de vaisselle, de verres, de tambours, de planches à laver et de guimbardes qu’on accorde. Quatre coups de baguette sur le pupitre. L’orchestre amateur des Folkeux Folles Têtes fait le silence. Le chef lève sa baguette. Et plam kwic tsoin tsoin ! se déroule l’impressionnante mélopée qui tue. Grince le crincrin pointu, geint la guimbarde pentue et miaule le biniou perdu. Arme-toi de patience. Ça va durer longtemps. Oh que oui.

Chut !

De tous ceux qui n’ont rien à dire,les plus agréables sont ceux qui se taisent. (Coluche)

Si on décidait d’un commun accord qu’il y a urgence à fermer sa gueule ? Les postillons de nos parlottes sont des ovnis pour les virus. Toussez dans votre coude, restez dans votre chambre et parlez dans votre tête. Ça vous reposera. Et nous aussi.

 Ils ont des yeux, qu’ils regardent ! Ils ont des oreilles, qu’ils écoutent ! Ils ont un esprit, qu’ils s’en servent ! Ils ont une bouche, qu’ils la ferment ! (Lao Surlam)

Elle n’avait rien à cacher
En silence
Je n’arrivais pas à lâcher
Mon enfance
Nous avons quitté le navire
Sans un bruit
Sur un canot qui roule et vire
Dans la nuit
Qu’avons-nous fait de nos délires
Insensés
Pour la soif et pour le désir
Exaucés

Sauras-tu lire entre les lignes
Décoder
Ce qui est caché sous les signes
Érodés
Les mots les mots sont des pantins
Animés
Par un montreur par un forain
Mal aimé
Nous les dirons à pleine voix
Sans compter
Ces imperfections que l’on voit
À côté
Écouter les sons qui s’assemblent
Et qui font
Jaillir d’autres sens où je tremble
Mon cœur fond

S’il est un signal qui te touche
Myrmidon
Fourmilier ce goût dans ta bouche
D’amidon
Ne t’invente pas des histoires
Des raisons
Le verdict est rédhibitoire
Pendaison

Je suis monté sur la potence
Sans pleurer
Debout j’ai regardé ma France
Adorée
J’ai vu mon cœur dans la marmite
J’ai donné
Ma vie pour nourrir les ermites
Étonnés
Ils ont mangé plein d’appétit
Mes artères
Croquez mon cœur foutus yétis
Mes grands pères

Cet univers n’est plus pareil
Désormais
J’ai vécu le jour des merveilles
À jamais

Puisque j’émets tranquille la loi du silence, je me l’applique à moi-même. Jusqu’au prochain post. Trois jours de mutisme. Ça commence maintenant. Chut !

Il va pas se taire, cet abruti ?

Le seul espoir pour l’humanité est dans l’évolution de l’individu.
Jiddu Krishnamurti