Haute solitude

 

Deux poèmes, deux époques. En cinquante ans, qu’est-ce qui a changé ? Bien peu en vérité. En soixante ans ? Pareil. J’ai retrouvé hieren 2021 un texte écrit à douze ans. J’en ai soixante-douze. Chaque mot, chaque idée, je pourrais y souscrire encore. Un jour peut-être, je le publierai ici, ce texte de l’enfant que je fus. En attendant, lisez ceux-ci.

 

Chemins

(1969)

1
La rosée d’aurore
Scintille au soleil
Sur les pentes abruptes
Près des torrents glacés
Vers les montagnes d’or
Ruisselantes de miel
Dans la solitude
Il faut avancer

Qui t’a retenu
Pourtant
Le chemin montant
S’embrume dans les nues

 

2

Après les hauteurs
Le froid des grandes cimes
Sur la terre et la cendre
Le plus dur est passé
La brume de chaleur
Te cloue sur la colline
Tu n’as plus qu’à descendre
Te laisser glisser

La peur est venue
Pourtant
Le chemin s’étend
Sur la plaine inconnue

3

Depuis des semaines
Peut-être des années
D’une montagne à l’autre
De colline en vallée
Le même vent t’entraîne
T’envoie promener
Un jour après l’autre
Tu dois t’en aller

Il n’y a plus personne
Ici
Sur le chemin durci
Rien que ton pas qui sonne

 

4

La terre est toujours verte
Le chemin toujours fou
Tu pleures avec les saules
Tu vas dans les fumées
La plaine est grande ouverte
Le vent te suit partout
Derrière toi…  C’est drôle
La plaine est refermée

La vie continue
Pourtant
Le chemin attend
Le poids de tes pieds nus

 

 

Haute solitude

(2019)

Sur les chemins de haute solitude
Sur les sentiers qui côtoient l’infini
Sur les versants de grande incertitude
Ne sais-tu pas que l’orage est fini ?

Tu n’as manqué de faim ni de pitance
Tu n’as gagné ni perdu rien du tout
Tu n’as choisi la foi ni l’inconstance
Sur ton parcours éloigné de partout

Beau chevalier des contes et légendes
Preux combattant fidèle compagnon
Du fond des mers jusqu’aux sommets des Andes
Tout en perdant tous les deux nous gagnons

Sur l’avenir jurons de rester dignes
Des dons reçus et des leçons données
Le temps futur s’y lit entre les lignes
Nous y serons prophètes et damnés

Qui nous retient de briser les entraves
De renverser le trône des tyrans ?
Qui nous retient de nous conduire en braves
De caresser un visage attirant ?

Nous étions nus compagnons de misère
Nous n’avions rien que l’aube à nos genoux
Guerriers venus des confins de la terre
Nous avons tout     Le ciel est avec nous

 

Il n’y a qu’une seule Voie mais mille chemins peuvent y mener.
Lao Surlam