L’humain a soif de « progrès » technologique. Il ne l’accueille pas tranquillement, il court vers lui comme un dératé. Rien n’est jamais assez rapide à son gré. Pourquoi tant de hâte ? Aurait-il oublié ce qui l’attend au bout de la course ? La mort, rien d’autre. Il se saoule de gadgets toujours plus performants, comme si la performance était dans le gadget, et non en lui-même.
Au lieu de répondre aux véritables besoins planétaires, innombrables et croissants, les marchands de merde font dans la surenchère débile. La création de besoins matériels est leur premier souci. Grands gourous du désir, les fils de pub créent des besoins qui n’en sont pas. Les princes du CACA-rente vendent toujours plus d’objets idiots à ceux qui ont les moyens de les payer. Et loin de protester, ceux-là en redemandent. Les CACA-rentiers se tapent sur le ventre : les cons somateurs sont si faciles à rouler !
Comment endiguer cet hubrisce joli mot grec signifie démesure suicidaire ? En déculottant une bonne fois le fumeux concept de progrès. Par exemple, quand on parle de progrès scientifique, à quoi pense-t-on ? Quand on parle de progrès technologique, est-on bien sérieux ? Qui progresse avec la technologie ? Une poignée de milliardaires ne sachant plus quoi foutre de leur montagne de pognon – Onc’ Picsou dans sa piscine de pièces d’or. Les patrons d’entreprises de pointe qui tôt ou tard, je l’espère, pointeront au chômage. On peut rêver. Pour que ça vienne, il faudrait que la clairvoyance descende sur le monde. Elle n’a pas l’air pressé, elle.
Depuis deux siècles nous voilà collés à la matière et/ou prisonniers de vieux dogmes castrateurs. Avec souvent un mix infect des deux tendances. La tête pleine de sottises religieuses, et le cœur tout empli de désirs matériels. Partout dans le monde globalisé, le désir de gadgets inutiles et voyants est une religion. La nouvelle religion qui éclipse toutes les vieilles. Ni meilleure, ni pire qu’elles. Juste complètement conne, comme ses copines.
L’homme qui sait – c’est notre nom savant – a désappris la connaissance. Son savoir mal acquis ne lui profite jamais. Au lieu d’apprendre de la vie, il étudie dans les livres. Sur écran, qui pis est. Tout le savoir vient des livres, dit-on. Tout l’avoir aussi, mais des livres sterling. Heureusement il y a des savants qui sont des hommes de connaissance. Rares, il est vrai, mais d’autant plus précieux. Aurélien Barrau est de ceux-là.
Dimanche 10 mars 2019, sur son profil Facebook, l’astrophysicien Aurélien Barrau a frappé fort en consacrant un post à l’arrivée prochaine de la 5G. Une nouveauté qui, selon lui, illustre à elle seule cette manie suicidaire que l’homme a de vouloir aller toujours plus vite, quitte à tout massacrer sur son passage… Pour lui, c’est bien simple, « la 5G tue ».
« On prépare donc le réseau téléphonique 5G. Activement. Avec frénésie et impatience ! Pour un temps de latence un peu amoindri et la certitude que les vidéos YT seront visibles « outdoor » sans la moindre interruption, nous allons déployer d’innombrables antennes, détruire les précédentes, tout renouveler – sans doute en de multiples exemplaires, opérateurs disjoints obligent …
Voila l’archétype de ce qui mène au désastre. Notre incapacité structurelle à dire « ça suffit, nous n’avons pas besoin, pas envie, de cette débauche insensée ; nous refusons cette idée létale suivant laquelle tout ce qui est technologiquement possible doit être effectivement réalisé, pour la jouissance mortifère de la consommation pure. »
La question n’est PAS de savoir s’il faut construire des centrales nucléaires ou des éoliennes pour alimenter tout cela. Elle consiste à comprendre comment endiguer cet hubris suicidaire de création de besoins matériels qui prévalent sur les ravages insensés que leur mise en acte induisent nécessairement sur le vivant. Même avec une source d’énergie parfaitement « propre », l’effet du déploiement serait dramatique.
La 5G tue. Non pas à cause des effets des ondes sur la santé humaine. Mais en tant que création artificielle d’un besoin arbitraire aux conséquences dévastatrices. On ne PEUT PLUS continuer à faire comme si ces folies n’avaient pas de conséquences. Nous avons DÉJÀ tué 70% du vivant (avec presque aucun réchauffement climatique). Préfère-t-on la vie ou le débit du réseau téléphonique ? C’est (presque) aussi simple que cela. » (source)
Un astrophysicien comme je les aime. Aurélien Barrau s’engage avec cœur et véhémence sur tous les sujets chauds du moment. Un engagement qui va beaucoup plus loin que sa spécialité, dans laquelle on suppose qu’il excelle aussi. Depuis Hubert Reeves, l’astrophysicien franco-québécois qui est un homme avant d’être un savant, j’attendais la relève, la voici. Comment avoir la tête dans les étoiles et le cœur bien sur terre ? Suivez Aurélien Barrau.
Personnellement je préférerai toujours la vie au débit du réseau téléphonique, pour la bonne raison que je n’ai pas de téléphone portable, smart ou pas. Une ligne fixe suffit à mes besoins qui sont minimes en la matière. J’ai horreur du téléphone, c’est un pis-aller. J’y reçois déjà trop d’appels publicitaires à la con, pas la peine d’en rajouter.
Chaque nouvelle invention nous prive d’un pouvoir subtil. Déjà qu’il nous en reste si peu ! L’écriture nous a volé la mémoire. Les pendules et les montres nous ont volé l’horloge intérieure. Le téléphone nous a volé la transmission de pensée. La voiture nous a volé la téléportation. La télévision nous a volé la méditation. L’avion nous a volé le vol libre. Le GPS nous a volé le sens de l’orientation.
Les médicaments nous ont volé le guérisseur intérieur. La musique enregistrée nous a volé la transe. La bouffe industrielle nous a volé le régal. L’argent nous a volé l’échange. L’envie nous a volé la paix. La guerre nous a volé la sérénité. La peur nous a volé l’amour. Le sida nous a volé la jouissance. Le travail nous a volé le rêve. L’ombre nous a volé l’énergie. Le productivisme nous a volé la nature. La civilisation nous a volé la liberté. L’avarice nous a volé l’égalité. La religion nous a volé la fraternité.
Que reste-t-il pour nous ? Pour nos vies ? Que restera-t-il pour nos enfants ? La mort ? C’est pas demain qu’on nous la volera, celle-là. Mais sans elle, resterait-il du plaisir à vivre ? Prends ta mort pour conseillère, et tout sera splendide. À sa juste place.
Vivre doucement, lentement, au fil des rêves qui nous restent. Ils ont bien fondu ces temps-ci. Marcher à pas tranquilles vers la fin du jour. Remercier pour le pain, pour l’air pur, pour le soleil et pour la pluie. Remercier on ne sait qui, on ne sait quoi, mais remercier, toujours. Chanter. Danser. Embrasser qui vous voudrez. Aimer ce que jamais vous ne verrez deux fois. Aimer comme antidote à la peur de vivre. Aimer comme remède universel. L’amour nourrit, il désaltère, il guérit. L’amour du corps, l’amour du cœur, l’amour de l’esprit. Ainsi soit-il.