L’ouverture du cœur est le préalable obligé de toute vie intérieure, le premier pas vers l’éveil et la complétude. L’ouverture du coeur se fait par un chagrin d’amour qui déchire à jamais le cœur et le rend apte à aimer.
C’est peut-être le coeur qui s’ouvre, baby groove.
Celui qui n’a jamais aimé ne goûtera pas aux fruits de l’Arbre de Vie. Et ils sont nombreux, celles et ceux qui n’ont jamais aimé.
Ils peuvent être mariés, elles peuvent être religieuses, ministres ou infirmières, ils et elles s’entourent d’un no human’s land sans tendresse, sans générosité, sans affection. Cœurs secs. Psychorigides. Calculateurs froids, ils traversent la vie des autres comme un brise-glace dans la banquise. Elles sont seules, parfois non. Ils vivent en ours ou en tyran domestique. Ils ne comprennent pas les élans d’affection, les câlins, ils critiquent la manie des bisous et des petits cœurs qui fleurissent et les heurtent : à quoi riment toutes ces âneries, se disent-ils.
Quand nous avons affaire à une ou un sans-cœur, dur de lui envoyer de l’amour, dur de lui sourire. L’absence de chaleur humaine est communicative, les cœurs se glacent à ce contact glacial. Ces êtres ressemblent à des robots. Privés de cœur, ils n’ont pas d’âme. Sans s’en douter, ils ont perdu leur chemin.
Ils risquent aussi de perdre la Vie. Un être sans cœur est un être mortel. Certaines s’étonneront : ne sommes-nous pas tous mortels ? Oui, un jour ou l’autre, nous quitterons toutes et tous notre corps. Mais quitter son corps n’est pas mourir. J’ai fait ma première sortie de corps consciente à l’âge de 16 ans. Depuis je sais par expérience que l’on peut vivre hors du corps. La puissance divine qui est en chacun de nous ne limite pas notre existence à ce véhicule de chair et d’os. Nous avons dans le cœur le ticket pour la vie éternelle. Servons-nous en.
Dans ce cas, pourquoi dire qu’on peut perdre cette Vie ? Pour une raison bien simple, en vérité : la vie éternelle ne nous est pas acquise, elle se gagne. L’ouverture du cœur est le préalable obligé de toute vie intérieure, la seule clé de la Vie éternelle. La devise des Chevaliers Teutoniques, ordre de moines soldats proche des Templiers, le dit à sa manière obscure : « Si tu ne meurs pas de ton vivant, tu mourras en mourant. » De fait, le message de cette phrase est terrible. Il faut connaître la mort symbolique ici-bas si l’on vivre au-delà.
Qu’est-ce que la « vive mort » ou mort symbolique ? Ceux qui l’ont connue s’en souviennent. C’est l’enfer d’une rupture amoureuse. C’est se retrouver plus seul qu’un chien du désert, des siècles durant, à hurler à la lune. C’est vouloir se foutre à l’eau, se pendre et disparaître à jamais de la face de la terre. C’est passer sept longues annéescertaines en ont passé quatorze ! sur le gril de l’enfer parce qu’en perdant son ami(e), on a perdu son âme. « Un seul être vous manque et tout est dépeuplé » Si l’être aimé revient, la vie repartira… mais il ne revient jamais.
J’ai perdu mon âme
Quand j’ai perdu son amour
Et moi pauvre diable
Je l’aime toujours.
Et devant ma porte
Son regard caressant le mien
Là mon âme est morte
Dans le creux de ma main.
Leny Escudero, Ballade à Sylvie
Est-ce ainsi que les hommes vivent ? Et leurs baisers au loin les suivent Comme des soleils révolus.
Aragon le communiste, le matérialiste dialectique, Aragon ne croyait pas à l’âme. L’âme était là quand même. Son amour pour Elsa l’a sauvé. Nous sommes des êtres de lumière, issue de la pure lumière, et nous y retournons par la réunion de nos trois personnes, le corps, l’esprit et le cœur. L’homme n’est divin que lorsqu’il réalise en lui cette fusion. Trois personnes en toi, tel est le message chrétien. Il parle de toi, de ta divinité intérieure, et pas de je ne sais quel Deus Sabaoth, maréchal de Starwars.
Devenir dieu, c’est unir ses trois personnes. Le moi du corps, le moi de l’esprit, le moi du cœur. Voilà le véritable sens de la sainte trinité. Toi et moi. Elle et eux. Triples nous sommes devenus, triples nous vivrons à jamais. C’est donc un point capital d’ouvrir son cœur.
Quand vous écoutez quelqu’un, complètement, attentivement, vous n’écoutez pas seulement les mots, mais aussi le sentiment qui s’y associe, vous écoutez le tout, et non une partie.
Nous recevons trois personnes en une seule quand nous nous incarnons sur ce plan. Un corps, un cœur et un esprit. Mais c’est à nous qu’il incombe de les mettre en service. À notre époque, l’ouverture du corps, travail de l’enfant, se fait par la pratique sportive. C’est le minimum souhaitable, mais ça suffit souvent. L’ouverture de l’esprit se fait par l’école, y compris l’école de la vie : voyages, rencontres, etc. C’est aléatoire, imparfait, mais ça le fait.
Par contre, l’ouverture du cœur n’a rien d’automatique. Elle est représentée par l’arcane VI du Tarot, L’Amoureux. Dès qu’il est question de tarot, je me réfère bien sûr à ma pratique du Tarot initiatique, dans la précieuse lecture que nous en a donné Jean-Claude Flornoy. Les vingt-deux arcanes majeurs représentent les vingt-deux étapes obligées d’une vie humaine. L’arcane VI l’Amoureux est l’arcane de l’individuation. C’est en effet, sur le chemin de vie que nous présentent les arcanes majeurs, la première étape de l’autonomie terrestre.
Arrive ici le point magique où le jeune être choisit pour lui, décide sans ses parents… et souffre seul.
La souffrance est la clé de l’ouverture du cœur, tel est l’enseignement de la Tradition. Et la souffrance est toujours le sort de l’Amoureux…
L’individuation commence avec cet arcane VI – L’amoureux, quand on est éperdu d’amour pour la première fois. On peut le vivre à la maternelle, ce premier amour, il n’y a pas d’âge pour aimer. Mais il finit toujours mal. Il DOIT finir mal, car la déchirure qui vous reste dans le cœur signe, précisément, cette capacité d’aimer d’un amour inconditionnel. Celles et ceux qui n’ont pas eu le cœur brisé, en pièces, explosé, déchiré, piétiné… ne savent pas ce qu’aimer veut dire. Ils n’ont pas dépassé le stade solitaire de l’ego.
Donner sans attendre, pardonner, entendre, et remercier le Vivant. Oui, remercier, chanter les louanges de cette merveille que nous partageons vous et moi, la Vie, la Lumière et l’Amour. Qui sont trois étiquettes pour le même flacon. Trois personnes intérieures qui nous composent, c’est à dire corps, esprit, cœur. Nous sommes triples, et nous ne le savons pas. Corps-esprit, entend-on. C’est compter sans l’ouverture du cœur. Souvenons-nous, le corps s’ouvre avec le sport. L’esprit s’ouvre avec la curiosité.
Le cœur, lui, s’ouvre avec le chagrin d’amour.
Il advint qu’un beau soir l’univers se brisa Sur des récifs que les naufrageurs enflammèrent Moi je voyais briller au-dessus de la mer Les yeux d’Elsa les yeux d’Elsa les yeux d’Elsa
Devenir dieu, c’est unir ses trois personnes. Le moi du corps, le moi de l’esprit, le moi du cœur. Voilà le véritable sens de la sainte trinité.
« C’est seulement lorsque tu as réuni tes trois personnes en une seule que tu es dieu, c’est alors que tu ne connais pas la mort. » Ceux qui échouent dans cette mission sacrée vont, après leur mort, rejoindre la lumière où se dissoudra leur âme individuelle. Voilà la seconde mort, la vraie mort, celle de la conscience qui dit « moi je« . Pour y échapper à la dissolution, une seule solution : la mort symbolique, la ‘vive mort’, le chagrin d’amour fou qui ouvre le cœur. Comme on l’a compris, cette mort est la vraie naissance.
« Qui n’est pas mort de son vivant, mourra en mourant. » (source) C’est ainsi. La vie n’a qu’une règle, aime. Aime sans attendre d’être aimé. Aime sans compter, aime tes voisins, aime tes ennemis, tes frères, tes rivaux. Aime d’abord ton pire ennemi, c’est toi-même. Aime-toi, le ciel t’aimera. T’aimer toi-même n’est pas tout te permettre et ne rien assumer. Au contraire. C’est monter à chaque instant le niveau d’exigence et de don. C’est voir tes progrès avant tes faiblesses. C’est te dire : aime encore et encore, aime toujours davantage.
On n’aime jamais trop. On n’aime jamais assez.
Plaisir d’amour ne dure qu’un moment. Chagrin d’amour dure toute la vie.