Les civilisations les plus antiques font toutes preuve d’une surprenante maîtrise de l’hydraulique, et d’une branche particulière de la science de l’eau que j’appellerai l’hydrologie sacrée. Des réalisations antiques liées au culte de l’eau sacrée sont présentes sur toute la planète.

 

Sardaigne

 

Le Puits Sacré de Santa Cristina, construit vers l’an 1000 AEC, témoigne d’une des plus riches périodes de la mystérieuse civilisation nuragique. C’est actuellement le plus visité des temples que les Bâtisseurs de Tours ont voués au culte de l’eau.

Sur le terrain, les structures visibles dessinent encore le périmètre elliptique d’un mur d’enceinte enfermant un second mur formant un fer à cheval au centre duquel se trouve le coeur du sanctuaire. Si de ces deux murailles concentriques ne demeurent que les fondations faites de grossiers moëllons, le Puits Sacré lui-même nous est parvenu « en l’état ». Descendant au niveau de la nappe aquifère, l’édifice en creux présente un appareillage en basalte poli d’une très belle finition et atteste d’une parfaite maîtrise des courbes qui désigne Santa Cristina comme l’une des plus élégantes réalisations nuragiques.

 

 

Une architecture hors du temps

Abrité par une voûte souterraine en tholos, le fond du puits forme une vasque circulaire peu profonde, creusée dans la roche pour y recueillir les eaux phréatiques. Entourée d’une margelle, la vasque semble se prêter à un rite d’immersion, mais les visiteurs modernes se contentent d’y jeter, qui des pièces de menue monnaie, qui des capsules de bouteilles de bière. Dans l’axe du bassin, affleurant quelques 7 mètres plus haut avec le sol naturel, la clef de voûte du tholos est percée d’un trou de lumière circulaire large d’une trentaine de centimètres.

Cet œil-de-bœuf met en évidence les connaissances astronomiques des constructeurs de l’Age de Bronze : aux équinoxes de mars et septembre, les rayons du soleil le traversent pour illuminer le fond du puits. Il est dit également que, tous les dix-huit ans et demi, c’est la lune en plénitude qui passe à l’aplomb de l’opercule et projette son reflet sur l’onde du bassin sacré. (source)  Ce dernier prodige a eu lieu lors de la pleine lune de juin 2007… Pour un prochain spectacle, inutile de réserver, mais soyez patients : pleine lune de janvier 2026 !

On accède au fond du Puits Sacré par les 24 marches d’un escalier plutôt raide. Accentuant l’effet de vertige, les parois latérales se resserrent fortement vers les profondeurs tandis que leur surface montre une courbure hélicoïdale discrète, mais en parfaite harmonie avec la forme du tholos souterrain.

Le plafond de cette superbe descente vers les eaux est formé de 11 marches antipodiques qui semblent refléter celles de l’escalier et évoquent les architectures surréelles imaginées par le graveur hollandais Escher, trois millénaires après les concepteurs de Santa Cristina.

A proximité de cette merveille, apparaissent diverses substructures : vestiges de deux grandes huttes contiguës, d’une aire circulaire évoquant une place publique et de plusieurs séries de constructions ayant pu héberger des pèlerins. L’ensemble évoque l’un de ces centres religieux et tribaux dont parlent les historiens antiques. (source)

 

Près de Chichen Itza

Au XVIe siècle, l’évêque espagnol, Diego de Landa, chargé de christianiser les Mayas du Yucatán, apprit que des fidèles accomplissaient régulièrement des pèlerinages en un lieu sacré. Il découvrit alors que tout près des ruines d’une ancienne ville enfouie sous la jungle, se trouvait un grand puits naturel vénéré depuis toujours par les indigènes.

 

 

Diego de Landa raconte dans La Relacion de las cosas de Yucatán que des hommes et des femmes sont jetés vivants dans les eaux troubles et profondes d’un puits que les Espagnols appellent « cénote », une hispanisation du mot maya dzonot signifiant « puits sacré ».

Peu à peu, il apprit qu’il s’agissait en fait de sacrifices humains pratiqués dans le cadre d’un très ancien culte de l’eau et de la fertilité. Quant aux vestiges près du puits, c’était ceux d’une des plus belles cités mayas : Chichén Itzá.

 

Les cénotes

Les cénotes sont des gouffres d’effondrement, totalement ou partiellement remplis d’une couche superficielle d’eau douce et parfois d’une couche inférieure d’eau de mer s’ils communiquent avec l’océan par des failles.

Le Cénote Suytun montré en tête de cet article, est situé à l’est de Valladolid, Mexique. Il est typique de nombreux gouffres naturels dans la roche calcaire de la péninsule du Yucatan.

Le Cenote del parque de Cholul ci-dessous est à côté de Cholula et est situé dans le Yucatán, au Mexique. Il a une longueur totale de 10 mètres et possède un escalier d’accès taillé dans la roche.

 

 

Ces puits naturels, pouvant atteindre plusieurs dizaines de mètres de profondeur (335 mètres pour le plus profond), se trouvent principalement au Mexique et au Yucatan. Ils s’ouvrent, tels des yeux bleus, au coeur des jungles les plus denses. Emplis d’une eau d’un bleu magnifique, inondés de lumière, ils ont tout de la piscine pour dieux précolombiens.

Mais les Mayas leur donnaient une signification bien plus sinistre… Pour eux, les cénotes étaient des portes ouvertes vers l’infra-monde, une « bouche » permettant de communiquer avec les dieux. Ce qui nous projette une fois de plus vers la terre creuse, mythe très antique lui aussi, et tout aussi répandu que la science hydraulique.

Si ces puits étaient avant tout de précieuses réserves d’eau douce, ils furent également des puits sacrificiels : lors de certaines cérémonies, de jeunes gens couverts de lourdes parures en or étaient jetés dans le cénote en sacrifice aux dieux…

Aujourd’hui, tout cela est bien loin et les cénotes sont devenus des piscines pour touristes inclus dans tous les circuits touristiques et des spots de plongée recherchés en raison de leur eau limpide. Les grands prêtres mayas doivent se retourner dans leurs sarcophages de pierre gravée… (source)

 

Les Fontaines salées de l’Yonne

A Saint-Père sous Vézelay, dans l’Yonne, on trouve des sources magiques et des eaux minérales exploitées depuis le néolithique.

« A l’âge du fer (entre 1500 et 100 environ avant J-C) l’activité continue et s’organise. Des sources d’eau minérale sont captées et aménagées. Des cuvelages en bois sont mis en place pour isoler l’eau salée des eaux douces de la rivière la Cure. Cette technique consiste à évider de gros chênes pour en faire des canalisations, qui rendues étanches, sont descendues dans chacun des puits par tronçons d’environ 1 m de haut sur 80 cm de diamètre. » (source)

 

 

Le sanctuaire

Au 1er siècle avant J-C, les captages sont entourés d’une enceinte circulaire qui officialise le caractère sacré de l’endroit. Dans cet espace de 34 mètres de diamètre, il n’y avait que le bassin, mais point de temple.

Il faut remonter au néolithique final (2 300 avant J-C) pour trouver trace d’exploitation du sel. Les structures de captage sont quasi-intactes. Le captage d’eau minéral était réalisé au moyen de troncs de chênes évidés. Ce puits est vieux de 4 500 ans. Sa datation comme pour celle des autres a été obtenue par le carbonne 14.

A l’arrivée des romains en Gaule, on dénombrera 19 puits d’eau chlorurée sodique. qui vont constituer l’alimentation des futurs thermes. » (source)

 

Les thermes

« Au 1er siècle après J-C, les gallo-romains édifient des thermes sur ce site qui seront agrandis au IIe siècle et utilisés jusqu’à leur destruction, probablement vers 275.
Ils s’inscrivaient dans un carré d’environ 54 mètres de côté. Ils étaient alimentés par les sources attenantes. Il est fort probable qu’un système hydraulique supplémentaire avait été mis au point pour l’amenée des eaux jusqu’aux thermes. Elles étaient exploitées pour leurs vertues curatives. » (source)

 

 

Xavier Séguin

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