Anges

Les anges de guerre

 

L’imagerie catholique nous a assez gavé d’angelots fessus tout juste bons à émoustiller les curés pédophiles. L’imagerie populaire nous a assez fourgué son gamin volant tireur de flèche, l’amour nu, triste avatar du dieu Eros des Grecs.

Les anges, les vrais, n’ont rien à voir avec ces ticulsAmis Québécois bonjour nus. La Bible en fait des guerriers surpuissants. Jésus en parle aussi, la tradition juive encore davantage, l’Islam également. Toujours sous leur aspect redoutable. Mais qui sont donc les anges de guerre ? La tradition sumérienne nous les présentent comme des dieux inférieurs aux ordres des dieux supérieurs. Et tous se déplacent dans des engins volants. 

D’après la Bible, les anges sont innombrables, mais avant leur nombre, c’est leur puissance qui fascine. Simon Pierre dit qu’ils sont supérieurs aux hommes en force et en puissance. Le mot grec pour « ange » est devenu le nom d’un explosif : dunamos, la dynamite. En quelque sorte, les anges sont la dynamite de Dieu. (source)Wikipedia  Au hasard de la Bible, les anges font des prouesses. Un seul ange extermine toute l’armée de Syrie, qui menace le prophète Ezéchias. 

Un ange ferme la gueule des lions qui menacent le prophète Daniel. Un ange roule la pierre du sépulcre de Jésus sans difficulté. Un ange ouvre les portes des prisons, libère les apôtresAc5.19 et Pierre. A la fin des temps, un seul ange prendra Satan et l’enfermera dans l’abîme.Ap20.2 

La dynamite de Dieu est vraiment bien nommée. Ces exploits évoquent irrésistiblement d’autres puissances primordiales, les Cyclopes et les Titans, eux aussi mi-humains, mi-divins, eux aussi d’une force indomptable et d’une intelligence supérieure. 

Dans le fourmillant panthéon hindou, on trouve aussi des êtres au statut intermédiaire entre les dieux et les humains. Ce sont les Dévas, que les Hindouistes adorent et célèbrent à l’égal des dieux. Ils les nourrissent avec des libations et autres sacrifices car les dieux mangent comme les humains. 

 

Des anges à tout faire

La Bible ne dit pas si les anges doivent manger pour se maintenir en vie. Elle dit pourtant qu’à certaines occasions les anges, sous forme humaine, ont partagé un repas. Les anges et les géants ont plus d’un point commun : leur force indomptable, leur haute stature, et leur présence auprès des dieux.

Les anges sont-ils les géants d’avant le déluge, ces dieux anciens civilisateurs  et technologiques ? Là encore, impossible de trancher entre la nature humaine et divine de ces êtres ambigus. A quoi ressemblaient-ils ?

 

 

Lors de la Résurrection, les anges qui apparaissent aux Saintes Femmes sont « blancs comme neige » ou « vêtus comme l’éclair » alors qu’auparavant, on n’a aucune description de leur look. A en juger par leur vol, leur puissance, leur épée flamboyante et leur habit de lumière, « vêtus comme l’éclair, » on les dirait sortis de la Guerre des Etoiles. Sont-ils mortels ou divins ?

C’est peut-être un faux débat. On a vu que les dieux d’avant ne sont que des hommes, comme nous, qui sommes leurs créatures. Eux sont plus puissants, plus savants et vivent plus longtemps. Tout comme leurs anges de main. Leurs géants d’armes.

Alors ? Les anges sont-ils les géants ? Les géants sont-ils les anges ? Je note avec un grand rire intérieur que la langue des oisons, ici encore, peut nous mettre sur la voie. Une des langues vertes que les jeunes utilisaient il y a peu s’appelle le verlan. Elle est vieille comme les mots. Il s’agit d’inverser les syllabes. Faisons subir ce traitement à géant, on obtient ange.

Oui, ce sont les mêmes. Ils sont aux ordres des dieux, leurs maîtres. Difficile de faire la différence entre les Elohim et leurs serviteurs les anges. Entre Ahura Mazda et ses géants volants. Entre les Anunna et les dieux inférieurs. Entre les dieux hindous et les dévas. Les uns comme les autres ont une apparence humaine et une force surhumaine. On peut toutefois noter une différence majeure. 

Certains dieux d’avant, nos créateurs sumériens par exemple, appartenaient à l’antique peuple du Serpent. Tout comme les Quetzalcoatl et les Viracocha, en Amérique, appartenaient eux aussi à un peuple du Serpent, sans doute à la même époque. Or il semble que les armées angéliques ne soient pas dans le même camp que ces reptiliens.

 

 

Unir les contraires

Dans l’Apocalypse, Saint Jean rapporte la vision de Saint Michel et ses légions d’anges qui combattent et remportent la victoire de Dieu, définitive contre l’antique serpent qui égarait la terre depuis des siècles. On reconnaît le vilain tentateur du jardin d’Eden, que la pauvre Eve eut la faiblesse d’écouter. On reconnaît le diable, cet ange déchu attaché à notre perte. 

Quel personnage ambigu, lui aussi !  Le diable n’est pas le mauvais bougre qu’on nous a dit. Avec cette fichue inversion des valeurs qui caractérise le Kali Yuga, ce triste dernier âge qui n’en finit pas de finir, on vient à douter de tout. 

Obsolète est ce système qui oppose dos à dos deux principes irréconciliables, les forces du bien et celles du mal, le blanc et le noir, le diable et le bon dieu. Vision naïve. Nul n’est tout blanc ou tout noir.

Qu’elle soit positive ou négative, l’énergie reste l’énergie. La polarité peut changer. Il est temps de dépasser l’antagonisme qui nous monte les uns contre les autres, et nous fait voir le mal partout, sauf en nous. La frontière entre les forces du bien et celles du mal, n’est-elle pas en nous ? A chacun sa part d’ombre : chacun doit pactiser avec son diable intérieur. Pactiser, et non détruire. Telle est la différence entre l’homme et l’ange. 

Tandis que l’archange Michel terrasse le dragon, l’humain Saint Georges se contente de le maintenir à distance. L’homme est le point d’équilibre entre l’ange et le démon. Son origine est divine, telle est aussi sa fin. Homme ou femme, ange ou archange, déva ou dieu, en nous se joue la guerre de l’ombre et de la lumière. Une guerre éternelle et sans doute nécessaire.

Personne n’est ni ange, ni bête. Qui veut faire l’ange, fait la bête. Et qui veut faire la bête, fait la bête. Il ne s’agit pas de choisir son camp, il n’y a pas de camp. Il y a l’être. Il y a la vie. Qui sommes-nous pour régler la nature ? Des dieux ? Pas encore…  Nous sommes des miroirs à facettes, des hologrammes, des étincelles divines. 

Nous sommes les innombrables reflets de l’Humaine
qui a créé tout le bazar.

Aujourd’hui on les appelle anges ou démons, demain on les appellera autrement.

Aleister Crowley

 

 

Xavier Séguin

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