Éloge de l’irrespect

Éloge de l’irrespect ? La cause n’est pas aussi surprenante qu’elle en a l’air. Il ne s’agit ni d’impolitesse ni de manque de courtoisie. Je parle des croyances qu’on prend pour de la science. Seul l’excès de respect maintient les anciennes erreurs. La remise en question des théories comme des hypothèses est indispensable, et pas seulement en sciences.

Ces pseudo-sciences et ces croyances erronées sont tout autour de nous. On dit que le soleil se couche, mais pas du tout, c’est la Terre qui tourne ! Quand le ciel est dégagé, on dit qu’il y a du soleil, mais non, il est tout le temps là au-dessus des nuages ! On dit qu’on prend son temps, sans savoir que c’est le temps qui nous prend… On envoie les enfants à l’école, alors que c’est eux qui devraient nous enseigner dans bien des domaines. On tej les ieuv dans des mouroirs, privés du respect qu’on accorde aux abrutis dominants.

On a marché dans la grotte

L’excès d’obscurantisme est encore plus choquant dans les sciences qui sont censées lutter contre. Je t’en fous ! Plus elles sont humaines, plus elles sont inhumaines. Tenez, parlons préhistoire. Depuis le temps qu’on décrit nos premiers ancêtres comme des singes nus vivant dans des grottes avec un pagne en peau d’auroch ! Sans déc ? À oilpé ?  En pleine ère glaciaire ? Connerie, courte-vue, carabistouille et confusion.

Oui, certains de nos ancêtres sont allés dans des grottes, pour y faire des transes musicales et pour y peindre des chapelles Sixtine. On se demande comment ils ont fait de tels chefs d’œuvre dans ces grottes noires sans éclairage ? Aucune trace de suie sur les parois, ils n’utilisaient donc ni torche, ni lampe à huile, ni bougie, ni rien qui brûle. Alors comment s’éclairaient-ils, ces soi-disant primitifs ? Aucun archéologue n’a d’avis là-dessus. Aucun préhistorien non plus.

D’autres ancêtres se sont réfugiés dans les cavernes et les souterrains pour se protéger. Ce qui n’implique pas qu’ils allaient cul nu.

Le parti-pris conjugué à la niaiserie aboutit à de foutues impasses. D’après nos élites, elles sont nécessaires pour préserver autant que possible la vision con d’un passé simiesque, merci Darwin. Tant que la société ne sera pas prête à entendre la vérité, on continuera à nous bercer de pieuxcomme des piquets mensonges. Pour notre bien, disent-ils.

Ou pour maintenir un niveau élevé d’ignorance, garante de la paix sociale qui aide les riches à s’enrichir encore. Tout ce que tu ne sais pas protège ceux qui le savent. Ont-ils intérêt à partager leurs secrets ? Le font-ils ? Oui, on les entend assez crier que l’éducation est une priorité, qu’il faut répandre partout les lumières de la connaissance. Mais quelle éducation ? Quelle connaissance ? La leur, truffée d’erreurs ? Ou bien chacun la sienne, comme il se doit sur une planète libre ?

Il y a deux histoires : l’histoire officielle, menteuse; puis l’histoire secrète, où sont les véritables causes des événements. (Honoré de Balzac)

 

Halte à m’ira

Préhistoire encore. Il y a quelques années, je vous ai conté l’affaire Altamira. Elle fait surtout ressortir le parti-pris et la suffisance de son principal protagoniste, le préhistorien André Leroi-Gourhan, que les mauvaises langues appelaient le roi de la gourance.Ohhh ! c’est mal de se moquer ! Ses élucubrations s’appuient sur des faits, dit-il. Mais ses a-priori reposent-ils sur autre chose que la mauvaise foi ? Vous en jugerez.

Du coup je l’ai choisi pour illustrer mon propos. Il figure sur l’image titre. Pas en signe de respect, mais comme cible toute désignée du devoir d’irrespect. Devoir que j’appelle l’irrespect citoyen. Oui, face aux mensonges de l’info, de la politique, des syndicats, des employeurs, des employés, face à la falsification de l’histoire et de la préhistoire, plus mensongère encore, l’irrespect des dogmes est salutaire, civique, citoyenne, charitable, humaine et disons-le, divine !

Assez ri. Nous n’avons pas la moindre idée du parcours qui a amené notre espèce où elle est. Je parle de son véritable parcours. La version des manuels scolaires est un piège à cons. Ça pousse les gamins les plus malins à fuir l’école. Ce soukh les étouffe.

Croire à l’histoire officielle, c’est croire des criminels sur parole. (Simone Weil)

 

Sortir de sa tête

Quand nos enfants apprennent des conneries à l’école, comment s’étonner que l’histoire les gonfle ? Et le reste aussi. Il faut s’en féliciter plutôt. Secouons, secouons les rideaux vieillots, secouons. Lavons, lavons, ces foutus carreaux qu’on y voie enfin clair. Il faut appliquer le décapant du doute à toutes les constructions humaines, qu’elles soient de pierres ou d’idées.

Chercher la structure en tout, le plan directeur, le souffle créatif, l’élan vital… Pour aussitôt l’oublier. La solution n’est pas mentale. Fin de la pensée. La tête coupée. Le corps sacré. Agir en toute humilité.

Adieu les considérations considérables, adieu l’archéo-délire, le paléo-quantisme, le diable et son train, adieu le mental, adieu l’ego qui coupe en quatre les cheveux les plus soyeux, bonjour l’ardeur viride,

La viride émeraude et le clair diamant
Comme une courtisane à son dernier amant
Filant queue la première en un vagin cosmique
Pour y renaître et reconnaître
L’être
U nique

Tu es magnifique, reine du monde, splendeur d’occident, perle entre les lèvres, sublime ardeur d’aimer, subtile odeur d’amour. Éprouver l’anima sans quitter l’animus.C’est du latin mes doux lapins Anima ton esprit, animus ton cœur. Anima ton âme, animus ton courage. Les Romains se souvenaient de nos deux personnes. Ils en ont juste oublié une, le corps physique. Pourtant ils lui vouaient un culte. Mais la roche tarpéienne est près du capitole. D’abord on te voue un culte, puis on te voue aux gémonies. Et là t’en chie.

Humaines, trop humaines

Il n’y a pas que l’histoire qui me pompe le dard. Toutes les dites sciences humaines méritent une bonne remise à plat. Quand on veut restaurer une vieille bagnole, on commence par tout démonter, la carrosserie, le châssis, le moteur et la boîte de vitesse, pièces par pièces, bout par bout, on vérifie tout, le tableau de bord, les boulons, les raccords, les réglages, on checke les durites, le circuit électrique, l’allumage, le freinage, l’embrayage, la pression, la direction, la suspension, on change ce qui est usé ou ce qui peut être amélioré. Et quand on a tout remonté, c’est reparti pour dix ans.

Dans les sciences humaines on ne ferait jamais une chose pareille. Ça fait des années qu’on rajoute des rustines sur les pneus lisses. Qu’on repeint sur la rouille. Deux bons siècles qu’on bidouille, tripatouille, magouille, écrabouille. Et qu’on s’en bat les couilles.

Le recueil des âneries et des T.O.C. d’une poignée de caciques séniles est érigé en méthode ultime. À terme, ce journal de manies aberrantes devient protocole scientifique. Et bientôt la Loi qui scintille au firmament de la Raison. Le temps passe, qui entérine leur prestige. Le process aberrant est un saint commandement. Les étudiants s’empressent de suivre les tours et détours de leurs maîtres. Quand les sciences sont humaines, l’erreur l’est aussi.

Alors je dis : vive l’irrespect. N’ayons jamais peur de remettre en question tout ce qui nous semble absurde ou infondé. En archéologie, en géologie, en paléontologie, en préhistoire et ailleurs, des faux-plis se prennent en un rien de temps, vite entérinés, validés dans l’instant. Si tu n’ouvres pas ton troisième œil en grand, tu n’y verras que du blanc.

Je m’adresse aux étudiants. Éveillez-vous. Il est temps d’enrayer ce processus cinglé qui ne peut pas donner de bons résultats. Une accumulation d’erreurs n’a aucune chance de faire une théorie féconde.

Foutues gémonies

La morale est un autre domaine où aucune contestation n’est admise. La morale contemporaine ne fonctionne que par interdits. Des sujets sont déclarés tabous, des comportements hier anodins sont voués aux gémonies, qui n’en peuvent mais, les pauvrettes, depuis le temps qu’on leur voue des tas de machins hors d’âge et d’usage, elles ont le sentiment d’être les dames pipi d’une giga déchetterie spatio-temporelle.

En tant que Gémeaux, je compatis. Gémeaux, gémonies, un genre de cousines ou quoi. J’ai de l’embonpoint pour elles. Euh je veux dire de l’empathie. Note que j’ai aussi de l’embonpoint mais ça n’a pas de rapport.

Enfin j’imagine que non. Castaneda avait du bide. Devic avait du bide. Flornoy aussi avait du bide. Ce rusé disait que le ventre rond, c’est l’affirmation de soi, le pouvoir personnel. L’ouverture en grand du centrechakra du ventre arrive autour de la quarantaine. C’est le chakra du ventre qui fait pousser le bide, pas la bière !

Il me montrait les bouddhas chinois, tous enceints de six bons mois, et clignait de l’œil, le finaud ! Façon de dire si Bouddha a du bide, pourquoi moi Flornoy je n’en aurais pas ? Faire ses humanités chez les Jésuites, pas à dire, ça laisse des traces.

Vessie ou lanterne ?

Chez Flornoy, l’irrespect était une seconde nature. Son corps lui indiquait la puissance d’un lieu par un signe infaillible : une soudaine envie de pisser. Plus l’envie était violente, plus le lieu était puissant. Il lui fallait alors soulager sa vessie sur place, non loin du mégalithe le cas échéant. En me voyant choqué d’un tel manque de respect, il éclatait de rire, ce rire saccadé qui pouvait chez lui durer toute une après-midi.

La situation était encore plus embarrassante s’agissant d’une crypte romane. Avec Flornoy, il fallait mettre sa pudeur au placard et sa peur au rancart. Erreur mineure, et faute stratégique. Les années 90 étaient licencieuses. L’absence de pudeur rend exhibi et l’absence de peur rend téméraire. Aussi excessif que moi, Flornoy côtoyait les deux vices. Lui et moi quadras, le monde avait notre âge, quarante ans et le mors aux dents. On a mordu dedans.

Tirer des bords

On m’avait appris à imiter Jésus Christ. Une fois j’ai fait comme lui, j’ai observé les tout-petits. Il est doux de se mettre à leur écoute, surtout ceux qui ne parlent pas encore. Le babil des bébés a des merveilles à nous dire. Les miens parlaient elfique.

Le jeune enfant accepte le monde où il s’incarne avec une grande facilité. Son adaptabilité est maximale. Elle ira en décroissant tout au long de sa vie, pour finir proche de zéro quand le bébé aura atteint mon âge. Eh oui, je suis un ancien bébé moi aussi, au cas où certaines en douteraient encore.

Nous voilà perdus sur la ville
A mille et mille lieues du sol
Sur l’océan des toits de tôle
Tirant des bords au ciel tranquille
Tirant des bords au ciel tranquille.

En grandissant, le petit enfant n’accepte pas le monde tel qu’il est, mais tel qu’on lui présente. Nos idées sur le monde nous cachent la réalité du monde. Cessons de respecter nos propres conceptions, rien n’est définitif, tout se transforme. Ce que nous transmettons au jeune enfant, ce n’est pas la réalité du monde, mais la représentation mentale que nous en avons.

Impossible de faire le portrait du monde. Il est infiniment plus que sa définition quelle qu’elle soit. La distance entre le mot et la chose est infinie. Ils appartiennent à deux univers différents qui ne se rencontreront jamais. Le chemin de la connaissance amène le guerrier à renoncer aux mots pour appréhender les choses dans leur essence. Conne essence peut-être, mais connaissance tout de même.

Regarde le petit enfant. Vois l’éclat de son regard quand il le pose sur toute chose. Vois la mobilité de ses traits, changeants aussi vite que son humeur volatile. La leçon d’être, c’est lui qui nous le donne. Guerrier impeccable, il danse sa vie, il brûle et nous allume, le monde entier s’embrase au rythme de sa danse. J’envie l’envie de vie de ce veinard vivant. Il verra un monde que je puis qu’imaginer.

GAG

Celui qui vient de faire l’éloge de l’irrespect est sans doute un des auteurs qui respecte le plus ses lecteurs. (ndw)note du webmaster

Tout ce qu’on ne comprend pas, mieux vaut s’en débarrasser.
Smithsonian Institution