Je suis allé plusieurs fois dans le Wiltshire, à Avebury et ses environs. L’endroit est d’une puissance rare, extraordinaire. J’y ai mené une enquête sur les cropies et tout le phénomène qui les entourent depuis une trentaine d’années. Ceux que ça concerne trouveront dans les lignes qui suivent le résultat de mes investigations.
Manifestations de l’énergie sacrée de la Terre ou bien messages extraterrestres, résurgences d’un passé magique ou avertissements mystérieux, les crop circles ne laissent personne indifférent.
Agroglyphes ou cercles de récolte en français, les cropiessurnom affectueux que leur donnent les Britanniques sont des dessins géométriques souvent circulaires qui se forment d’avril à août dans les champs de céréales du Wiltshire depuis une vingtaine d’années.Trentaine en 2019 Et alors ? Ce que j’en pense ? Ma conviction profonde est encore incertaine. Le cartésien qui sommeille en tout Français dirait qu’il s’agit d’art, un art éphémère mais très médiatisé.
Les artistes y gagnent la célébrité pour leurs œuvres, et la région y gagne des touristes. Mais non, ce serait trop simple. Et tellement triste ! Il fait laisser sa chance au rêve. Toute cette affaire est nimbée d’un mystère délicieux et potache comme les petits plats du Barge Inn, auberge au bord de l’eau où les barges font escale, et où j’aimais à prendre mes quartiers dans le camping voisin.
Première circonstance mystérieuse au sein d’une longue liste : les « cropies » se forment de nuit comme de jour, sans qu’il ait jamais été possible de repérer leurs auteurs. L’auberge des Barges porte ce nom parce qu’elle sert d’escale aux pénichettes des randonneurs, amis aussi parce que c’est le rendez-vous estival de tous les bargeots du Royaume Uni et du reste du monde. La chasse aux cropies et la collecte des hypothèses sur leur origine et leur signifiation -chacun a la sienne et la défend passionnément- est un rituel qui participe de la cropmania.
D’abord marginal et limité au sud de l’Angleterre, le phénomène s’est accentué dans les années 90, pour se répandre un peu partout dans le monde, sans égaler la production britannique qui reste la Mecque des Crop-fans. Chaque été, la célébration du solstice d’été amène dans le Wiltshire des personnages de contes de fées. Et d’incroyables miracles champêtres ! Au fil des étés, on en a dénombré des dizaines, puis des centaines, jusqu’en Corée ou en Nouvelle Zélande. Leur complexité s’est accentuée dans la même proportion.
Les plus beaux sont des prouesses géométriques, artistiques et techniques. Ils fleurissent à partir du solstice d’été près d’Avebury et de son cercle de mégalithes, dans le Wiltshire (GB). Et parfois, quand passe le vent du surnaturel dans les blés de Marlborough, d’East Kennet ou d’Alton Barnes, on y croise des pèlerins vraiment mystiques. Non loin de ces hauts lieux se dresse l’imposante machine mégalithique de Stonehenge, où des néo-babas druidiques tiennent les stands de fish and chips.
Mais le visiteur avisé préférera, et de loin, la puissante énergie cosmotellurique d’Avebury à celle, faiblarde et polluée, de Stonehenge – le Mont Saint Michel d’outre-Manche, presque aussi fréquenté, très surévalué. Bien sûr, c’est un spectacle indiscutable, surtout au lever et au coucher du soleil, mais le niveau énergétique est très loin d’égaler le Henge d’Avebury ou tout son ensemble mégalithique. Tout dépend ce qu’on cherche.
Certains pensent que les crop circles sont des créations extraterrestes. Des messages de mise en garde à notre espèce au bord du gouffre. Quel message ? Celui d’arrêter nos conneries, je suppose. Mais le sens de l’avertissement gagnerait à plus de clarté et de transparence.
D’autres s’imaginent que ces traces de surface sont les reflets de cercles de pierre enfouis sous la terre des champs depuis des millénaires. Ces témoignages, selon eux, viendraient de l’époque même de la construction des sites d’Avebury et de Stonehenge. Comment ces reflets parviennent-ils à s’imprimer dans les céréales ? Là-encore, chacun y va de son explication plus ou moins fumeuse. Personne n’est d’accord avec personne, mais tout le monde écoute tout le monde.
Pour moi, à ce stade de l’enquête, l’origine des crop circles reste inexpliquée. Comme je l’ai dit, les néo-babas qui sont nombreux y voient l’œuvre de sauveurs extra-terrestres. Ils en ont fait une nouvelle religion. Assis en rond au milieu des cropies, ils lèvent les bras en chantant des hymnes hypnotiques. Ils y sont bien : les vrais crops vibrent autant qu’une église romane. Ce qui soulève une question : la vibration est elle causée par les dessins dans les blés, ou par l’émotion et la ferveurs de leurs adorateurs ?
Les professeurs Nimbus ont chacun leur théorie, ils en débattent dans le cadre haut en couleur de leur quartier général, the Barge Inn, l’Auberge des Barges si bien nommée. L’un d’eux pense que les mégalithes créent des champs électro-magnétiques qui se matérialisent dans les récoltes en y traçant ces formes curieuses. Un autre évoque de mystérieux lits de galets, d’artefacts enfouis sous les champs actuels, qui laisseraient leur empreinte en surface par un mélange d’ondes de formes et de théorie des champs. Au sens physique du terme, et non au sens agricole !
Un troisième est frappé par l’apparence informatique des dessins : pour lui, les cropies sont faits par ordinateur. Possible, mais comment l’ordinateur dessine-t-il le motif dans les céréales ? La thèse qui revient le plus souvent, toujours conspuée, est celle d’artistes en herbe. Discrets, mais bien humains.
Shocking ! Pas question d’envisager une origine humaine à ce délire qui anime si bien la région depuis plus de vingt ans. Mais selon un fermier du coin, les crops existent depuis toujours… Comme en témoignent les grand chevaux blanc des coteaux alentours, dessiner par terre est un sport local depuis le néolithique. Pourquoi s’étonner qu’il se poursuive aujourd’hui sous des formes plus contemporaines ?
Le phénomène crop-circles, ou agroglyphes, n’a pas fini de défrayer la chronique au Royaume-Uni, et d’abord ici dans le Wiltshire où ils sont apparus il y a vingt ans et où personne ne veut admettre leur origine humaine…
Les cropiessurnom affectueux qu’on leur donne dans le Wiltshire ne sont que la résurgence actuelle d’une manie très british, absurde et poétique.« Ces cercles apparaissent dans les champs depuis que je suis gamin. On avait l’habitude de jouer là-dedans, c’était drôle. Ils revenaient presque chaque année. Et maintenant on en fait toute une histoire ! » (source)Le Plan pour Sauver la Terre de Christel Seval
Comme toujours dans ce genre de phénomène très médiatisé, des faussaires sont apparus à plusieurs reprises. Mais leurs réalisations restent de pâles copies des véritables, beaucoup plus soignées.
Et ces dernières n’ont jamais pu être attribuées à quelqu’un ni à quelque chose. Pourtant, voilà des siècles, peut-être même des millénaires que les habitants de ce petit coin du monde ont le goût d’orner leurs collines et leurs pâturages avec de curieux dessins de chevaux le plus souvent, mais aussi d’êtres humains parfois d’une impudeur de bon aloi au temps où les faux-culs sont la majorité. Si cette plaisante habitude existe, pourquoi s’étonner qu’elle prenne à présent une nouvelle forme, celle d’un art éphémère céréalier ?
Certains sont persuadés que les tracés géométriques sont d’abord exécuté sur informatique avant d’être réalisés grandeur nature sur les récoltes. Pourquoi ? Pour faire joli et délier les langues. Ça marche impeccable. Comment ? L’histoire ne le dit pas.
Toutefois, si l’on plante un piquet au centre, en y fixant une corde on pourra dessiner les formes géométriques des cercles. Et la corde laisserait dans les blés, autour du piquet, des traces en étoile que j’ai pu observer au centre de plusieurs crops. Cette technique délicate demande trop de temps, les auteurs seraient vus à chaque fois. Or, comme on l’a dit plus haut, personne n’a vu ni photographié quelqu’un, humain ou martien, occupé à dessiner un cropie. Le rêve peut donc continuer.
Il est vrai que la loi du silence sur la réalisation de ces œuvres d’art indiscutables garantit l’afflux des touristes comme des adorateurs. Et ça fait marche le commerce. Si les gens du cru vendaient la mèche, la source de profits viendrait à se tarir. Ce qui ne semble pas être le cas, bien au contraire. D’année en année les curieux, les sceptiques et les fidèles se pressent dans les champs mais aussi dans les inns, les campings et les B&B.Bed and Breakfast, ou lit et petit-déj, le gîte british Le secret est donc bien gardé, Polichinelle y veille.
Pour avoir souvent effectué des relevés, certains crop-circles vibrent très haut sur l’échelle bovis : entre 9000b et 11 000b, ce qui représente un joli score. On objectera que le site d’Avebury et ses environs ont un taux vibratoire assez élevé dans l’ensemble. C’est exact, mais nos mesures ont montré que les autres parties du champ de céréale n’ont pas la même charge, sans parler des imitations, qui vibrent un peu plus bas que le reste du champ. Le sensitif ne peut pas prendre des vessies pour des lanternes.
Ces curieux dessins dans les blés seraient-ils des chakras terrestres artificiels ? En tout cas, ils intéressent beaucoup les militaires.
« Concernant le processus d’apparition du crop lui-même, des centaines de témoignages et des enregistrements vidéo font état de fameuses « petites boules brillantes » de 30 à 40 cm de diamètre discernables à l’œil nu et en plein jour, qui apparaissent et se déplacent au-dessus des champs peu avant que n’apparaisse un cropie.
En 1990, S. Alexander en a filmé un près d’Alton Barnes. Si le lien entre ces boules blanches et la formation des cropies est aujourd’hui clairement établi, son interaction reste à imaginer.
Car il est exceptionnel qu’un témoin voit un cercle se former sous ses yeux. Le scénario est toujours le même : les boules vievoltent au-dessus du champ, puis disparaissent et quelques minutes plus tard, le crop est là. Quelques rares personnes témoignent avoir vu les blés se coucher en spirale en suivant les mouvements tournoyant de ces lumières comme s’ils étaient aspirés par une rafale de vent. » (source)Nexus n°52, sept-oct 2007, p. 51 Par leur taille et par leur comportement, ces boules de lumière évoquent des éclairs en boule.
Seulement voilà, les éclairs ne se manifestent que par temps d’orage. Eh bien par forcément. Des éclairs peuvent frapper très loin du nuage, dans une zone de ciel clair située parfois à plus de 10 km du cumulo-nimbus. D’autre part, qui sait comment se forment les boules de foudre ? Est-ce un phénomène électro-statique qui peut se produire en l’absence d’orage ? Ce qu’on sait sur les boules de foudre, c’est leur apparence de feu blanc, lumineux mais pas éblouissant comme l’éclair.
On connaît aussi leur façon de se déplacer, erratique, comme guidée par une intelligence. Le géobiologiste suisse Stéphane Cardinaux est d’un autre avis: « Je pense que les boules de lumières que les gens ont aperçu sur les crops sont des Elémentaux. Quels qu’en soient les auteurs, humains, devas ou autres, ces dessins permettent à la Terre de se rééquilibrer et en même temps, celle-ci nous permet d’expérimenter ses énergies. » (source)Nexus n°52, sept-oct 2007, p. 54
À partir d’éléments si peu sûrs, et trop rares, on ne peut rien conclure. Mais il y a là une véritable piste de recherche, et un passionnant sujet d’étude. Hélas, le pays de Descartes, sans doute trop rationnel, est privé de ces fêtes champêtres que donnent les crop circles. Le même Cardinaux a une autre réponse, pour ça aussi : « Vous n’avez qu’à en commander ! » Il affirme en effet avoir commandé les crops apparus en 2007 en Suisse, selon des dessins précis qui ont été en grande partie respectés.
Les Suisses sont donc moins rationnels que nous. Mais plus riches.
Si aucun Français n’arrive à « commander » des crops à domicile, consolons-nous : le Wiltshire n’est pas si loin. Et le solstice d’été à Avebury est un rendez-vous à ne pas manquer. On en fait des rencontres chez les barges du Barge-Inn à West Kennett.
Complément d’information, juin 2017 : ça y est ! Nous avons enfin des cercles de culture en France ! un crop-circle a été photographié près de Sancerre