Guérison interdite

 

Toute ma vie j’ai fait l’équilibriste. 73 ans dont 60 de pratique, je tenais la route. Mais tout change. Attaque violente en juillet dernier. La mort en face. Je reviens à la vie, plus jeune, plus fort, un nouvel équilibre. Ou déséquilibre ? Outre mes perceptions subtiles largement affinées, il y cet équilibre instable, intrigant, inédit.

 

Changement de braquet

En tout cas je ne joue plus dans la même cour. Je mesure sans peine l’accroissement soudain de mes pouvoirs — ce mot m’agace, ils sont plutôt des devoirs supplémentaires. Je les ai reçus pour en faire profiter ceux qui ne les ont pas. Par exemple, ma sensibilité aux perceptions subtiles est plus élevée, plus fine, plus large. Je perçois des êtres non-biologiques de façon bien plus nette. Je peux sentir des zones négatives à grande distance, sur photo, sur plan, etc. Tant que je laisse ma cervelle à la niche, je ne peux me tromper.

Je suis sensible aux présences hostiles à très grandes distances, et sur toute la ligne de temps. Moins sympa : il faut que je me protège de ma nouvelle hypersensibilité aux influences astrales. Les phases de la lune exercent un effet drastique sur mes émotions. Les éruptions solaires qui m’épuisaient au passage, me donne maintenant un coup de fouet durable.

Il y a un prix à payer pour ce boost. J’y laisse une partie de mon bien-être. La surcharge énergétique fragilise mon corps physique. Paradoxe : le guérisseur aussi a besoin d’attentions. Les frais augmentent de toutes parts, vous le savez. Ma maigre retraite n’y suffit pas. Aussi lancé-je un appel de fonds : ceux et celles qui le peuvent auront à cœur d’y répondre. Tous les gestes seront d’une grande aide. Mais parlons d’autre chose.

 

Descartes et Kant

Mon énergie subtile est incroyable. Je n’en reviens pas. Trop de mal à m’habituer. Il y a toujours des hoquets, des résultats décevants, mais j’ai appris depuis des années que celle ou celui qui ne veut pas guérir résistera à mes soins les plus assidus. Autant vouloir guérir un mur écroulé par la seule force de l’intention. Ce qui est sans doute plus facile, car le mur n’a pas de libre-arbitre ni de volonté qu’il puisse opposer à la guérison.

Dans ce pays où l’on prend Descartes pour un cartésien, on cultive à l’excès l’esprit logique alors le père de cette tendance — à savoir ce même Descartes — a découvert la Méthode et l’a mise en Discours alors qu’il était défoncé au shit. Dans son poêle, il scribouillait fébrile, lapin albinos aux yeux rougis par la drogue. Mais oui. Je vous conte cette belle histoire dans un article jubilatoire, lisez-le vite.

Pour atteindre la vérité, il faut nous défaire de toutes les opinions reçues et reconstruire tout le système de nos connaissances. (René Descartes)

 

Croire sans y croire

Tandis que Descartes prenait son délire cannabique pour la découverte de la Raison, se doutait-il qu’il allait lancer la philosophie dans un grand nettoyage de printemps ? Un siècle plus tard, le rigide Emmanuel Kant allait transformer en raison pure la douteuse raison décrite par Descartes.
En tout cas il méritait pleinement son prénom,  René, qui signifie né à nouveau. Car ses prises d’herbe à pipe lui ont ouvert les écoutilles.

Dommage qu’il n’ait pas compris ce qu’il a vécu, en nous cassant les couilles avec un bâton droit qui semble tordu quand on le trempe dans l’eau. Au lieu de découvrir une loi de l’optique, il a conclu que nos sens nous trompent, alors que c’est juste notre tête qui déconne.

 

 

Guérir ou prescrire ?

Mon talent pour ôter les blocages énergétiques est multiplié dans des proportions notables. Bobos ou maladies graves, je peux guérir en quelques secondes. Mais je ne le fais pas. En France, guérir autrement est illégal. Répréhensible. On ne peut que soigner sans sortir des rails — à condition encore d’avoir le diplôme. Si le droit de soigner est soumis à l’arbitraire, le pouvoir de guérir est un don sacré.

Le corps médical défend des intérêts contraires à ceux des malades. Des barrières infranchissables se lèvent sans cesse entre ces derniers et ceux qui pourraient les guérir. Les malades subissent un tel parcours du combattant, de salle d’attente en rendez-vous lointains, et ça dure, ça n’en finit pas ! D’où leur nom de patients.Non je déconne, ça vient du latin souffrir

Qui a des pouvoirs occultes est un sorcier. Ce qui revient à dire chez les ignorants : quelqu’un qui a pactisé avec le diable. L’occultisme sent le soufre et le soufre sent le fagot. Brûlez, brûlez donc tous les sorciers sur les bûchers de l’Inquisition. Vous savez bien : la SAINTE Inquisition qui torture et qui tue. Elle n’est pas morte — au contraire — sa vigueur me fait braire.

Les saints ont des pouvoirs aussi. Occultes, naturellement. Ainsi sont tous les pouvoirs inexpliqués. Occulte veut dire caché. Si les guérisseurs doivent se cacher dans notre beau pays de France, c’est parce que l’acte de guérir autrement y est illégal. Pauvre France aux mains des financiers et des comptables ! Illégal, disent-ils ? Mais vivre est illégal ! Que vivotent mes compatriotes !

Faute de vivre, vivoter est autorisé. Recommandé, même. Qui vivote est bon patriote. Belote et rebelote, le géant te boulotte, le Poucet prend ses bottes : voyez donc comme il trotte ! Il a le diable aux trousses ! Mais il n’a pas la frousse car il se joue de lui.

Le diable qui guérit. Le guérisseur qui rit. Le sorcier se marie.

 

Quant à moi

Je guéris depuis mon plus jeune âge. Je sais depuis le début que je dois m’écraser. Me taire. Occulter le mystère. Pour eux, je ne sais rien faire. Je n’ai pas de diplôme médical. Pas le moindre. Et je n’y connais rien. Alors, se dira-t-on, mes pouvoirs viennent de Dieu. Mais avec Dieu je suis odieux. Je n’y crois pas tel qu’on l’affuble. Dieu est une fable pour les faibles. Un fusible.

Donc mes pouvoirs viendraient du diable ? Le mauvais diable est une fable. Un bon petit diable qui guérit vaut bien un prêtre qui maudit. Un homme de Dieu fait-il le mal autour de lui ? Si son Dieu le laisse faire, c’est pour bien montrer qu’il n’existe pas. Les dieux d’avant ne sont pas Dieu. Mais ils ont existé, eux. Ceux-là sont bien réels. Nous en sommes la preuve vivante.

L’Unique en vérité ressemble à s’y méprendre aux ratés que nous sommes. Cet unique est un homme. Fait pour vivre en troupeau. L’unique est très nombreux…

Mes pouvoirs ne s’expliquent pas. Il me suffit de poser ma main sur un bobo pour qu’il s’en aille. Je ne fais rien. Ma main reste là, à quelques distances du corps malade. Le plus souvent, je n’ai pas besoin du contact. J’ai celui du corps subtil, je sens l’énergie courir, je l’aide, je lève les obstacles pour libérer sa course. C’est elle qui guérit le malade et pas moi.

Les Amérindiens l’appellent le guérisseur intérieur.

 

Pauvre diable

Si je ne fais plus de guérisons miraculeuses, je reçois des stagiaires à qui je donne des soins énergétiques ainsi qu’un recentrage émotionnel par le biais du tarot de Marseille que j’appelle tarot initiatique. Mon énergie bénéfique peut faire de grandes choses, mes stagiaires en témoignent. La qualité des rapports humains et la magie de l’instant sont au programme. Jusqu’ici, tout va bien de ce côté-là. Mais guérir ? Utiliser mon énergie pour ôter un cancer ? Je ne le fais plus, et je le déplore.

C’est l’énergie qu’il faudrait mettre en prison pour exercice illégal de la médecine. C’est elle, et elle seule, qui guérit. Quelle énergie d’ailleurs ? La mienne ou celle du stagiaire ? Catalyseurs de guérison, ces pouvoirs ne s’expliquent pas. Robespierre voulait que la Raison soit adorée dans les églises confisquées au clergé. Cette chienne de Raison raisonnante et raisonnable est devenue le dieu révolutionnaire, hélas. Au pays de Descartes, le culte de la raison est l’héritage de la révolution. On l’a dans l’os. Et je reste avec des dons encombrants, dangereux soi-disant. C’est bien le diable si j’y comprends goutte. 

J’ai cherché, croyez-moi. Plus je me creuse, plus vide est ma tête. Ainsi le veut la guérison secrète. Certains plans sont inconnaissables. Sont-ils du diable ? Si c’est ainsi, le diable agit pour nous. Bénissons-le, il fait mieux que le dieu des églises. Même pas foutu de mettre un peu d’ordre à Saint Pierre de Rome. Amender la Curie romaine ? Bien des papes ont tenté d’y parvenir. Benoît XVI en dernier lieu. Sans succès.

Mortifié par son échec, Benoît s’est retiré : acte inédit qui trahit son dépit. Deux papes en vie ? La Curie n’en a cure. Avant lui, on se souvient de la loge P2 — loge maçonnique célébrant les noces de l’Église, de la Mafia, et des cardinaux pédophiles. L’incurie de la Curie évoque des écuries. Celles d’Augias. Mais le géant Hercule, ici, ne viendra pas. Héraclès nous délaisse. Qui mettra la Curie en laisse ?

Le nettoyage des écuries d’Augias est le sixième travail accompli par Héraclès. Augias, roi d’Élide, était le fils d’Hélios, le Soleil. Son père lui avait donné un troupeau fabuleux, très nombreux car les animaux n’étaient jamais malades. Augias négligeait de faire nettoyer ses écuries et ses étables. (wikipedia) D’où la nécessité d’un fameux nettoyage. C’est le géant Hercule qui s’y colle. Merci Héraclès, dont le nom signifie Gloire d’Héra.

 

 

Moralité

Guérison vaut prison. Les guérisseurs se cachent des docteurs délateurs et leur loi scélérate. Venez à moi et recevez un traitement énergétique qui vous permettra d’atteindre le sommet de vous-même.

La beauté ou l’horreur sont dans l’œil qui regarde. Le diable et le bon dieu sont cachés dans tes yeux. Tu as l’œil du mal et l’œil du bien. Regarde au loin. Ouvre l’œil et le bon.

 

La seule chose pire que d’être aveugle, c’est avoir la vue et pas de vision.
Helen Keller