Les mythologies de toute la planète mentionnent l’existence d’armes magiques dans un lointain passé. Cette récurrence nous amène à envisager des armes comparables aux nôtres… dont la technologie s’appellerait magie. Ou pas.

 

Dans la mythologie celtique irlandaise, la druidesse Aífe qui réside en Écosse est à la fois magicienne, guérisseuse et guerrière. Elle est en conflit ouvert avec la terrible Scáthach, maîtresse d’escrime et d’arts martiaux, pour le commandement de la redoutable armée des femmes. Le rôle de ces magiciennes est l’initiation guerrière et sexuelle des héros. Selon le récit Aided Óenfhir Aïfé, Le Meurtre du fils unique d’Aïfé, Aïfé est la sœur ou la demie soeur de Scáthach : elles sont toutes deux filles d’Ardgeimm.

Scathach Uanaind est une magicienne puissante et redoutable qui demeure en Écosse, certains textes évoquent l’île de Skye. On accède à sa résidence par le Pont-des-Sauts qui rétrécit et devient glissant ou s’étire et se redresse pour broyer le visiteur téméraire. Elle-même est l’initiatrice des plus valeureux guerriers. Magicienne surdouée, experte dans l’art de la guerre et du sexe, elle commande une bande de femmes qui éduquent les héros. Ses élèves les plus prestigieux sont Noise, Ferdiad, et Cuchùlann.

Comme les Chevaliers de la Table Ronde, les élèves de la magicienne ne doivent pas devenir ennemis les uns des autres. Ce serment ne sera pas respecté puisque Cuchùlann va tuer Ferdiad dans un combat singulier, lors de la Razzia des vaches de Cooley. Cuchùlann a le privilège de savoir manier et de posséder le gae bolga. Dans la mythologie celtique irlandaise, le gae bolga est l’arme magique du héros Cuchùlann. Différentes hypothèses ont été émises quant à la signification du nom, il semble que le sens soit « javelot-foudre ».  

C’est un cadeau de pouvoir que lui a fait Scáthach lors d’un séjour en Ecosse. L’arme a été fabriquée avec les os d’un monstre marin. Cette arme magique ne peut être utilisée que de manière rituelle, selon l’enseignement de la magicienne. Quand Cuchùlann invoque le gae bolga, l’arme vient comme l’éclair dans sa main, puis fonce sur l’ennemi. Quand elle pénètre le corps de la victime, elle s’ouvre en de nombreuses pointes qui sont autant de blessures mortelles ; elle est foudroyante et implacable.

Dans le récit épique de la Táin Bó Cúailnge – la Razzia des vaches de Cooley – la reine Medb contraint Ferdiad à affronter Cuchùlann en combat singulier, l’enivrant et lui promettant la main de sa fille Findabair. Les deux guerriers se battent pendant trois jours, l’issue du combat est incertaine. En dernière extrémité, Cuchùlann se sert du gae bolga pour vaincre, car Ferdiad avait la peau en corne. L’arme doit être lancée avec les doigts d’un pied. Cuchùlann tue son meilleur ami pour une histoire de fesses.

Les plus avisés de mes lecteurs ont compris pourquoi Ferdiad a la peau en corne : c’est un reptilien. Sa peau est écailleuse et cornée, comme celle des tortues. Excellente protection contre des armes traditionnelles, épées, flèches ou projectiles divers, elle se déchire sous l’action magique du puissant Gae Bolga.

 

 

Il a rompu sa parole et dès lors, selon l’étrange morale des guerriers Tuatha, il ne mérite plus de vivre. Pourtant, il conservera le gae bolga son arme magique. De nombreux Dieux d’avant possèdent une arme magique personnelle : le foudre est l’arme de Zeus, l’égide est celle d’Athéna, le vajra est l’arme d’Indra, le xiuhcoatl est celle de Viracocha, le marteau est celle de Thor, l’épée hurlante celle de Lug et pasupata est l’arme absolue de Shiva. Mes recherches m’ont amené à assimiler le vajra et le marteau de Thor. J’ai de bonnes raisons de penser que le Gae Bolga appartient lui aussi à la grande famille des vajras, ces armes de poing qui lancent des éclairs ou dardent des lames.

Cuchùlann n’en a pas encore fini avec la vie. Il lui reste encore à vivre bien des aventures, même s’il sait déjà qu’il mourra jeune. Pourtant la prophétie se révélera fausse, si l’on en croit votre serviteur qui l’assimile au dieu maya Quetzalcoatl. Voici les faits tels que j’ai pu les reconstituer. Une deuxième vie attend Cuchùlann au-delà de la mort symbolique.

Au lieu de la vie, c’est son âme rouge qui lui sera arrachée, et avec elle le désir de mort, ce voile couleur de sang qui le fit tuer et tuer encore. Ainsi le quitta avec son propre sang, tandis qu’il se mourait au pied d’un chêne tricentenaire, la malédiction du sang qui fit de lui le plus malheureux des hommes, le plus mauvais des pères et le plus honteux des guerriers. Non, Cuchùlann ne mourra pas dans son jeune âge. Perdant la folie guerrière et le goût des armes, il devra s’expatrier avec son clan. À bord de vaisseaux rapides aux coques métalliques, ils mettront cap au couchant.

Le clan de Cuchùlann accostera la côte mexicaine où ils fonderont une civilisation pacifique et bienveillante.

En Mésoamérique, les Mayas le vénèrent encore sous le nom de Kukulkan, et les Aztèques sous le nom de Quetzalcoatl, qui est le plus puissant de leurs dieux. Voici le portrait qu’ils font de lui : un géant blond, aux yeux bleus et à la peau claire, qui portait une barbe rousse et dont la peau lumineuse rappelle celle de son père, l’Apollon des Celtes, Lug le fils du soleil, dont on dit que nul ne pouvait lever les yeux sur lui tant sa peau brillait d’un éclat plus fort que celui du soleil.

 

 
Xavier Séguin

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