Il est des héros qui font rêver les enfants et les grands, comme Gilgamesh, Hercule ou Prométhée. Dans la mythologie celtique, Merlin d’Armor et le roi Arthur, le chevalier Perceval, Gradlon le roi d’Ys, la fée Mélusine, la fée Viviane… Et le plus fabuleux de tous, le géant Cuchùlainn. Il entre en scène de la plus éclatante des façons, à l’âge de 5 ans, alors qu’il s’appelle encore Setanta, ce qui signifie le chemin.

 

Dans la forteresse d’Eamhain Macha, qu’on appelle aussi le Château des Péchés, le forgeron Culann donne une grande fête d’inuaguration. Le Château des Péchés vient d’ouvrir.

Pour la tranquillité des convives et le bon déroulement des réjouissances, Culann a posté son puissant dogue à la porte de la forteresse, afin qu’il garde le pont-levis.

La nuit tombe quand le jeune Setanta arrive au Château des Péchés. D’une taille déjà imposante pour ses 5 ans, le jeune géant est rapide à la marche, il a distancé son grand-père qui fait route avec lui.

Le vieillard a élevé l’enfant depuis sa naissance. Il se nomme Cathbad, il est druide et devin ainsi que le père du puissant Lugh.

Comme son père l’illustre Lugh, comme son grand-père Cathbad, Setanta est issu du monde divin, que les Celtes appellent le Sidhe ou l’Île des Quatre Maîtres. C’est une montagne d’où coulent quatre fleuves, séparant les terres en quatre quartiers. Cette île divine plane dans le ciel au-dessus du pôle nord.

Le jeune géant vient d’atterrir sur terre, il ne connait rien encore de ce monde. Il ne se méfie donc pas du chien de Culann qui se rue sur lui pour le mettre en pièces. Une bave immonde couvre les crocs de l’animal et ruisselle sur ses babines retroussées. Dans ses yeux injectés de sang on lit déjà la mort de l’enfant imprudent.

On peut le croire mort, mais c’est le contraire qui se produit. Setanta est doué d’une force prodigieuse, ses réflexes sont prompts, ses gestes précis. En un tournemain il étrangle le chien et l’envoie valser au fond du fossé. La scène va si vite que l’animal n’a pas eu le temps de mordre ni de griffer. Quand le grand-père arrive, le grand dogue est mort. Setanta ne lui a pas donné la moindre chance.

Fils de Lugh, le dieu de la lumière, et de Dectire, une belle mortelle, Setanta n’est pas familier des coutumes et des ruses des humains. Il vient des Quatre Îles du Nord où vit un peuple de demi-dieux, des géants nommés Tuatha Dé Danann, qui s’écrit mieux Dana Ahn. Leur nom veut dire Ceux de Dana l’Ancienne, Dana la Grande Déesse. Pour la tradition celtique, ces îles introuvables représentent l’autre monde, tout comme le Sidhe. Selon moi, il s’agit dans les deux cas de la planète-vaisseau Nibiru ou Hyperborée, avec sa montagne centrale et ses quatre continents séparés par de larges fleuves. Une source sortait d’Eden pour arroser le jardin; et de là elle se divisait en quatre fleuves, dit la Bible. C’est de l’Eden des Dieux qu’elle parle. 

Lorsqu’il apprend la mort de son chien, Culann est pris d’une rage terrible.
– Maudit géant du Nord, hurle-t-il. Qui va garder la forteresse à présent ? Toi, peut-être ?
– Oui, dit l’enfant. Je vais le faire.

Setanta promet. Il remplacera le chien défunt. Il montera la garde à sa place. Le forgeron roule des yeux terribles. Setanta perd son chemin. Alors son grand-père intervient. Il impose le silence. D’une voix forte et solennelle, il déclare que son protégé ne s’appelle plus Sétanta, mais Cuchùlann, ce qui veut dire « le chien de Culann » en vieux gaélique.

Émerveillés par la force du jeune garçon, les habitants ont l’intention d’utiliser le géant pour détruire leurs ennemis. Ainsi Cuchùlann s’installe au Château des Péchés. Il grandit en force et en rudesse. On attend de lui des prouesses. Son grand-père Cathbad comprend que le temps est venu. Il déclare que les étoiles ont ordonné le départ de son petit-fils pour la guerre. Seul, il peut défaire l’armée des ennemis. Bon sang ne peut mentir, le géant est d’accord. Cuchùlann est prêt à partir.

Le premier jour, il tue deux princes, son sang ne fait qu’un tour. La folie guerrière s’empare de son esprit. Un voile rouge de sang lui brouille la vue. Trop tard. Il faut qu’il tue. Ainsi sont les géants, paisibles, débonnaires, mais quand le premier sang éveille leur instinct sanguinaire, ils tueraient père et mère. Deux chemins s’ouvrent devant lui: un sentier de lumière et un fleuve de sang. Cuchùlann choisit la voie du sang.

 

 

Il retourne sa fureur contre ceux qui ont armé son bras. Conscient d’avoir été manipulé, il retourne au Château des Péchés pour le détruire. Mais les assiégés lui adressent trois femmes séduisantes, une blonde, une rousse, une brune, nues toutes les trois. Désarmé, le géant tombe raide amoureux de la plus belle, Emer, le lys d’Emain. Le tueur d’hommes devient doux comme un agneau devant la belle. « Marions-les vite » murmure le devin Cathbad.

« Nul n’épousera ma fille s’il n’est d’abord formé par Domhnall, le maître d’armes, » réplique le père de la jeune femme. Docile, le Chien de Culann va s’entraîner chez Domhnall. Il y restera trois ans. Ayant acquis la maîtrise parfaite de toutes les armes, il revient plein d’espoir demander la main d’Emer. « A présent, tu dois t’entraîner avec Scathatch la Druidesse, experte en arts martiaux » répond son père. Cuchùlann calme sa rage et baisse la tête. « J’irai chez Scathatch » dit-il.

Trois années passent chez la Druidesse. Devenu maître en arts martiaux, il revient demander la main d’Emer, mais une fois de plus, son père la lui refuse sans même abaisser le pont-levis. Cette fois, le géant voit rouge : le Chien de Culann laisse éclater sa rage.

 

 

Entrant dans la forteresse, il massacre nombre de guerriers farouches. Terrifié, le père d’Emer se donne la mort. Les amants sont enfin unis. Mais rien n’est joué. Le Chien de Culann devra se battre ensuite contre des serpents qu’il mettra en pièces et des dragons qu’il mettra en fuite : depuis lors, il porta l’emblème du Serpent. En des temps de troubles et de guerres, Cuchùlann, le Dogue d’Ulster, défendit seul son pays.  Face à l’invasion, il protégea l’Ulster malgré la douleur des blessures.

Cuchùlann est un héros tragique : il tue son fils qu’il n’a pas su reconnaître ; plus tard, avec Caladin, sa fidèle Épée, il a tué Ferdiad, son meilleur ami, dans le feu de la bataille de Ford.

À son dernier combat, un javelot ennemi le transperce. Son ventre lacéré laisse pendre sa tripaille. Il titube et s’écroule près d’un lac où il boit à longs traits. Ensuite, il s’attache solidement à une pierre levée. Un corbeau sautille sur ses tripes en picorant son sang.

Cuchùlann part d’un dernier rire, qui s’éteint en hoquets douloureux. C’est debout qu’il fera face à ses ennemis, c’est debout que la mort le prendra. Déjà la mort le tient, mais son poing ne lâche pas l’épée.

Trois jours durant, et trois nuits, l’ennemi tremble dans les taillis, n’osant s’approcher de lui, ligoté à sa pierre tel un Christ païen, son bras menaçant toujours armé de Caladin.

Au matin du quatrième jour, une loutre s’approche de Cuchùlann. Elle le renifle et boit son sang. « Cuchùlann est mort », se disent ses ennemis. Un à un, soulagés, ils quittent leurs terriers. La nouvelle se répand. La vie peut reprendre son cours normal.

Voilà l’histoire de Cuchùlann, héros mythique de l’Ulster. Mais il y en a d’autres. D’abord j’ai découvert que les légendes mayas nous parlent aussi de Cuchùlann et nous racontent une toute autre fin. Ensuite, mes recherches actuelles m’ont permis de rétablir la véritable histoire de Cuchùlann le Dragon d’Ulster. Cramponnez-vous.

 

Le Dragon d’Ulster

Rien n’est occulté sinon pour être dévoilé.
Rien n’est caché sinon pour être révélé. (source)Manu Larcenet, Le combat ordinaire, 2002

 

 

Rédigée au 14e siècle, la version officielle que vous venez de lire est bien trop sage. Au Moyen Âge, le détail des mythes originels s’est effacé. Les dragons sont oubliés. Les faits sont enjolivés. Alors j’y suis allé voir de plus près. Mes recherches sur la ligne de temps m’ont permis de reconstituer la véritable histoire de Cuchulann. Je vais donc rendre justice au dogue de Culann, qui est avant tout un terrifiant dragon.

Le guerrier qui voyage sur toute sa ligne de temps est un passe-muraille qui nous montre le chemin à suivre.

Lao Surlam

 

Le jeune Setanta n’a que cinq ans quand il descend sur terre. À cet âge, l’enfant humain est faible et fragile, tandis que le petit dragon a déjà une puissance terrifiante. Il n’a pas encore la gueule avide aux crocs acérés de son père Lugh le Lumineux. Il ne crache pas non plus le feu de la Géhenne, il est bien trop jeune.

Un dragon peut vivre quatre mille ans, parfois bien davantage. Il n’atteint l’âge adulte qu’après mille ou deux mille ans de jeunesse. Il grille alors tout ce qui bouge, bave sur sa proie et puis avale tout, comme nous le raconte si bien la Torah.

Nos ancêtres de l’antiquité ne parlaient pas des Dragons. La mythologie grecque les appellent des géants. La Gigantomachie est la guerre que Zeus et ses alliés livrent aux grands reptiles. Quand un homme s’adresse à un dragon, il doit lui dire Maître.

Les Reptiliens sont les dieux d’avant, venus des quatre îles du nord. C’est une grande île circulaire divisée en quatre quartiers. Aussi les Dragons l’ont-ils nommée l’île des Quatre Maîtres.

Setanta signifie le chemin. C’est un chemin initiatique qui va se dérouler devant lui, fraîchement débarqué sur la terre des hommes… et des femmes!

Le bébé dragon se pointe aux Château des Péchés. Quel genre de demeure peut porter un tel nom? Un indice limpide sera donné dans la suite du récit irlandais: Il retourne au Château des Péchés pour le détruire. Mais les assiégés lui adressent trois femmes séduisantes, une blonde, une rousse, une brune, nues toutes les trois.

 

 

Au castel de la fesse

Trois femmes nues séduisantes, vous avez compris. Le château des Péchés est un claque. Un lupanar. Un bordel où les soudards ripaillent et troussent les gueuses qui ribaudent. Ils n’ont pas à les trousser beaucoup vu qu’elles sont déjà nues.

 

Reprenons le fil. Setanta le bébé Dragon se pointe devant un lupanar. Il y a de l’argent dans ce genre d’endroit. De l’argent à protéger et des putes à surveiller. Un solide chien de garde est donc nécessaire.

Mais que peut faire le plus costaud des mastiffs contre un jeune dragon qui pèse déjà dix fois le poids du gros chien? Setanta n’a pas besoin de cracher le feu. D’une simple pichenette, il envoie le clébard sur la planète Vénus. Et c’est elle qui lui roustit le paletot. Pour info, la surface de Vénus dépasse les 460°.

Le mac sort du claque en pétard: Qu’est-ce qui t’a pris, connard de dragon? Tu as buté mon molosse dressé pour tuer des colosses! Ah bravo, petit con! Qu’est-ce que tu vas faire pour réparer ta merde?

-Prends-le plus bas, petit homme des Péchés, répond Setanta. Si j’avais mille ans de plus et la gueule en fusion comme Papa, tu ne me parlerais pas sur ce ton. J’ai beau être bébé, je suis tout de même un dragon. Tu me dois du respect.

-Pardonne-moi, fier dragon. Je m’appelle Culann et j’ai la plus grande estime pour ta noble race. Setanta ne répond rien et se penche vers Culann qu’il domine de ses quatre mètres de haut.

Culann se radoucit et lui répond gentiment: -Vois-tu, fils, il y a du gros pognon dans ce château d’amour. Et du beau linge aussi. Ce chien était essentiel pour protéger mon business. Tu ne peux pas me le rendre, c’est sûr. Comment tu l’as explosé!! Dis donc, tu m’as l’air costaud pour ton âge…

 

 

Deux cents princesses

-Seulement tu m’as porté préjudice. Qui va garder mon castel de la fesse? Tu pourrais prendre la place du chien. Je ne vois que ça.

-Heu, dit Setanta. Ma vocation, en tant que dragon, ça serait plutôt de garder une princesse enfermée dans sa tour.

Ici, les tours ne manquent pas! Ni les princesses. Il y en aura trente à ta disposition. Pulpeuses et travailleuses! Des reines dans leur genre.

Comme ça, ça va, dit Setanta. Je ferai ce que tu veux, Culann.

C’est parfait, dit Culann. En ce cas, tu porteras le nom de mon chien. Cuchulann, le chien de Culann.

C’est ainsi que le jeune Setanta devint le Dragon de Culann. De retour dans son Château des Péchés, il se frotte les pognes avec satisfaction. Quelle attraction, se dit-il. Moi Culann le Forgeron, patron du seul boxon gardé par un dragon!

 

 

La Bible, la Torah et le Coran nous apprennent que certains anges et archanges s’éprirent des humaines qu’ils trouvaient à leur goût. Elles avaient la peau douce et chaude. Infiniment sexy et désirable, comparée à la leur, tout froide et couverte d’écailles. Alors ils ont quitté le vaisseau-mère Hyperborée, ils sont descendus sur terre pour y prendre femme. Comme Cuchùlann. Il est descendu sur terre, il fait partie de ces anges déchus que la Gnose appellent des archontes.

 

La saga de Cuchùlann

Cuchùlann tue son fils : Pourquoi Cuchùlann tua-t-il son fils? Ce n’est ni facile à comprendre ni difficile à raconter. Cuchùlann était allé apprendre les armes chez Scáthach la Farouche, une princesse guerrière de la Terre des Ombres. Il se rendit dans ce pays et servit la magicienne.

L’arme magique de Cuchùlann : Scathach Uanaind est une magicienne puissante et redoutable qui demeure en Écosse, certains textes évoquent l’île de Skye. On accède à sa résidence par le Pont-des-Sauts qui rétrécit et devient glissant ou s’étire et se redresse pour broyer le visiteur téméraire. Elle-même est l’initiatrice des plus valeureux guerriers. Magicienne surdouée, experte dans l’art de la guerre et du sexe, elle commande une bande de femmes qui éduquent les héros. Ses élèves les plus prestigieux sont Noise, Ferdiad, et Cuchùlann.

De Cuchùlann à Kukulkan :  Cuchùlann n’est pas un homme ordinaire.  Sa filiation divine, sa force surhumaine, les exploits qu’il accomplit et la frayeur qu’il inspire le rangent dans la catégorie des super-héros antiques. Son père Lugh le Brillant était Fils du Soleil, initié par la foudre, et il y a fort à parier que le fils l’était aussi. Sa légende nous est contée par les Irlandais, mais Cuchùlann n’est pas d’Irlande. Pas seulement. 

Kukulkan le Maya : Lugh le fils du Soleil, Lugh à la face étincelante eut trois fils, trois garçons magnifiques, tous trois fils du Soleil, enfants d’Hyperborée comme leur père, tous trois dieux géants à la face brillante. Tandis que Ram le Bélier d’Hyperborée conquit et civilisa le monde vers l’est, Enki et Cuchùlann partirent vers l’est. Dans les Andes, Enki sous le nom de Tiki posa les bases d’une civilisation durable, policée, provisoirement guérie de sa passion pour les sacrifices humains, qu’il combattit violemment. Cuchùlann, le troisième fils, décide de changer de vie. Rompant avec ses mœurs guerrières et le mauvais souvenir de son voile rouge sur les yeux annonçant la montée en lui d’un terrible désir de meurtre, il devient une sorte de moine-soldat et, avec une petite troupe de fidèles, met le cap sur la terre d’Amérique, qu’il aborde au Yucatan.

 

 

 

Xavier Séguin

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