Avec Lao Tseu son contemporain, Confucius forme le plus illustre duo de sages dont se flatte la Chine. Il a posé les bases d’une société plus juste, plus respectueuse de chacun, jeunes ou vieux. De nos jours encore, son enseignement reste une des bases les plus solides de la pensée chinoise.
Si Confucius n’a rien écrit, ses disciples l’ont fait. Voici quelques précieuses leçons du plus célèbre d’entre eux, Meng Tseu.
Quatre livres classiques constituent la base et la source du Confucianisme, qui est davantage une sagesse qu’une religion. Cette puissance philosophie morale s’est élaborée à la suite des enseignements de Kung Fu Tseu, qu’en occident nous appelons par son nom latinisé, Confucius.
Confucius lui-même n’a rien écrit de son vivant. Il a prêché, dialogué, échangé force paroles vives avec une foule d’étudiants et de sages. Quand il parlait il suscitait sans effort l’admiration des lettrés et du peuple des gens simples. Ce portrait conviendrait à un autre sage de la même époque, qui vivait pour la parole et enseignait par elle. Fils de la Grèce bleue et blanche, sa vie se déroule à la même époque que celle de Confucius en Chine. Il s’appelait Socrate. Comme Confucius, il n’a laissé aucun texte de sa main, mais son disciple Platon l’a mis en scène dans de nombreux Dialogues.
Les quatre livres saints du Confucianisme, tels les quatre évangiles canoniques, ont été rédigé après la mort du grand homme. Il s’agit de La Grande Étude ou Ta Hio,Taïaut ? L’invariabilité dans le milieu ou Tchoung Young, Les entretiens philosophiques ou Lun Yu et pour finir du quatrième livre intitulé Meng Tseu, du nom d’un des principaux disciples de Kung Fu Tseu. Les extraits que je commente ici sont tirés de ce quatrième livre.
Meng Tseu dit : Je comprends clairement la raison des paroles que l’on m’adresse ; je dirige selon les principes de la droite raison mon esprit vital qui coule et circule partout.
Cet esprit vital a un tel caractère qu’il est souverainement grand – sans limite – et souverainement fort – rien ne peut l’arrêter. Si on le dirige selon les principes de la droite raison, et qu’on ne lui fasse subir aucune perturbation, alors il remplira l’intervalle qui sépare le ciel et la terre.
Cet esprit vital a encore ce caractère qu’il réunit en soi les sentiments naturels de la justice ou du devoir et de la raison ; sans cet esprit vital, le corps a soif et faim.
Cet esprit vital est produit par une grande accumulation d’équité – un grand accomplissement de devoirs – et non par quelques actes accidentels d’équité et de justice. Si les actions ne portent pas de la satisfaction dans l’âme, alors elle a soif et faim. (source)Sagesse du Confucianisme, Quatrième Livre, Meng Tseu.
On y trouve d’étonnants parallèles avec d’autres enseignements traditionnels voire plus récents. L’esprit vital qu’il évoque me fait irrésistiblement penser au vitalisme de Bergson, ou à l’énergie vitale, le vril, cher à l’antiquité gréco-latine. Comme lorsqu’il est privé de son vril, sans cet esprit vital, le corps a soif et faim.
J’y reconnais aussi la sagesse magique des Indiens d’Amérique latine. Selon les principes du nagualisme énoncés par Carlos Castaneda, seuls deux principes président à nos destinées, l’Énergie et l’Intention. Si le guerrier cultive en lui ces deux puissantes sources, alors il remplira l’intervalle qui sépare le ciel et la terre.
Il ne faut pas faire le bien avec l’espoir d’une récompense. L’âme doit faire son devoir sans . Il ne faut pas ressembler à l’homme d’état de Soung. (source)Sagesse du Confucianisme, Quatrième Livre, Meng Tseu.
Dans l’état de Soung, un homme se désolait que son blé ne pousse pas plus vite. Il voulut tirer sur les jeunes pousses pour les aider à lever, mais il ne réussit qu’à les arracher. Il rentra chez lui en titubant comme un homme ivre. Quand les siens lui demandèrent ce qu’il avait, il répondit : Je suis complètement épuisé. J’ai passé la journée à aider nos blés à grandir. Ses fils se précipitèrent vers le champ, pleins d’enthousiasme. Mais ils déchantèrent vite. Toutes les tiges étaient sèches, tout le blé était mort.
Une petite impatience ruine un grand projet.
« Ceux qui, dans le monde, n’aident pas leur blé à croître sont bien rares. Ceux qui pensent qu’il n’y a aucun profit à tirer de la culture de l’esprit vital sont comme celui qui ne sarcle pas ses blés. Ceux qui veulent aider prématurément le développement de leur esprit vital sont comme celui qui aide à croître ses blés en les arrachant. » source)Sagesse du Confucianisme, Quatrième Livre, Meng Tseu.
Cette histoire a fait le tour du monde à une lointaine époque, lorsque le souvenir des dieux d’avant et de leur enseignement était encore dans la mémoire des sages. Ce qui explique sans doute pourquoi Jésus y fait allusion dans une de ses paraboles. Dans les années 70, un curé chantant en a fait un tube catho : Te lèves-tu la nuit mon ami pour voir si la moisson pousse ? Te lèves-tu la nuit mon ami pour voir si le blé mûrit ? Je penche pour Maurice Cocagnac plutôt que pour Aimé Duval. C’est l’un ou l’autre, Google ne le sait pas. L’oubli fait son œuvre…
Rien d’étonnant à cette parenté. La plupart des paroles de Jésus sont empruntées à la sagesse asiatique. De deux choses l’une : soit Jésus trimballait une bibliothèque conséquente, soit son personnage a été inventé tardivement à partir de prophètes et de dieux sages, Hénoch, Osiris, Krishna, Esus, Mithra que les Hindous écrivent Mitra, Apollonius de Tyane, et bien d’autres.
Pourquoi Meng Tseu dit-il : « Je comprends clairement la raison des paroles que l’on m’adresse » ? Meng Tseu répond : Si les paroles sont erronées, je comprends d’où ça vient. Si les paroles se bousculent et se pressent, j’en connais la cause. Si les paroles sont osées, je sais ce qui a exercé une mauvaise influence sur l’esprit de mon interlocuteur. Si les paroles sont ambigües et bizarres, je devine aussitôt pourquoi. »
Jean-Claude Flornoy avait cette connaissance immédiate de l’autre. Il lui suffisait d’évaluer son niveau sur l’échelle des arcanes majeurs du Tarot. Une fois qu’il avait fait cela, il se remettait lui-même au niveau de l’arcane en question, et le dialogue n’était ni vicié, ni infécond. Car un homme n’entend que ce qu’il veut entendre et néglige le reste, chantent Paul Simon et Art Garfunkel. (écouter)
Flornoy avait une forte formule pour résumer cette attitude. Il appelait ça se mettre sur le paillasson de l’interlocuteur. Ça peut sembler irrespectueux, ça l’est sans nul doute. Mais ça marche. Et le dialogue est fécond. Bien des fois, le recours à l’évaluation par le tarot n’était pas nécessaire. Flornoy savait d’emblée à qui il avait affaire.
Ecoute ton corps. Il sait.
Lafayette Ron Hubbard, fondateur et gourou tout puissant de la Scientologie, avait inventé -ou piqué quelque part ?- ce qu’il nommait le triangle de l’ARC = Affinité, Réalité, Communication. Si l’affinité est présente, le contact se crée. Première chose. Mais il faut encore être réaliste et piger à qui l’on parle. C’est le paillasson. Dès qu’on y a mis les deux pieds, la communication peut avoir lieu, et être enrichissante pour les deux parties.
Quant à moi, je serais plutôt comme Flornoy. Les chiens ne font pas des chats. Je saisis tout de suite qui est la personne devant moi. Et ça ne passe pas par le cerveau. C’est instantané. De l’ordre du réflexe. Mon corps le sait, et j’ai appris à l’écouter.
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