Le Tétramorphe, ces quatre êtres ailés des mythologies que les Chrétiens associent aux quatre évangélistes, sont l’Ange, l’Aigle, le Taureau et le Lion. Les deux premiers ont des ailes par définition. Plus singulières sont les ailes du Taureau ou du Lion. S’agirait-il des constellations ? Faut-il y voir une indication de la provenance d’un peuple extraterrestre ? 

 

Plusieurs espèces supérieures extraterrestres se sont penchées sur le berceau de la planète bleue quand elle était bébé, et après. Voilà ce que pensent certains auteurs, s’appuyant sur diverses traditions concordantes. Se pourrait-il que des visiteurs des constellations du Taureau et du Lion soient deux de ces bonnes fées ?  Ce qui justifierait les ailes au taureau comme au lion : ils sont venus en volant. Pourtant les deux autres figures composant le Tétramorphe celle de l’Homme –ou plutôt l’Ange puisqu’il a des ailes– et celle de l’Aigle, ne font pas partie des constellations du zodiaque. Une enquête s’impose, puisse-t-elle éclairer ce mystère.

Le Tétramorphe, symbole des quatre évangélistes, ne s’est pas imposé d’emblée. On les a d’abord rapprochés des quatre grands prophètes bibliques, Isaïe, Jérémie, Ezéchiel et Daniel, avant d’être comparés aux quatre chérubins entourant le trône de Dieu. Ensuite, longtemps après, les Chrétiens sont allés chercher les quatre créatures du Tétramorphe, empruntées à l’ancien testament. 

 

Les sources bibliques

Ézéchiel (Ez 1, 1-14) décrit une vision : « le ciel s’ouvrit et je fus témoin de visions divines » (Ez 1, 1). « Au centre, je discernais quelque chose qui ressemblait à quatre êtres vivants » (Ez 1, 5). « Ils avaient chacun quatre faces et chacun quatre ailes (…) leurs sabots étaient comme des sabots de bœuf » (Ez 1, 6-7). « Quant à la forme de leurs faces, ils avaient une face d’homme, et tous les quatre avaient une face de lion à droite, et tous les quatre avaient une face de taureau à gauche, et tous les quatre avaient une face d’aigle. » (Ez 1, 10). Il s’agit de quatre créatures célestes identiques dotés chacun de quatre pattes de taureau, de quatre ailes d’aigle, de quatre mains humaines et de quatre faces différentes d’homme, de lion, de taureau et d’aigle. Ces quatre créatures ont leur place au pied du trône de la gloire de Dieu. (source)

Une autre mention du Tétramorphe figure dans l’apocalypse de Jean qui évoque les quatre créatures autour du trône de Dieu : « Le premier animal ressemblait à un lion, le deuxième à un jeune taureau, le troisième avait comme une face humaine et le quatrième semblait un aigle en plein vol. »

Saint Jérôme (348-420 EC) explique le choix des évangélistes : — l’homme a été attribué à Matthieu parce qu’il commence son évangile par une généalogie humaine de Jésus (Mt 1, 1-17) — le lion à Marc parce que dès les premières lignes de son récit il évoque « la voix qui crie dans le désert » qui ne peut être que le rugissement du lion (Mc 1,3) — le taureau, animal sacrificiel par excellence, à Luc qui commence par le récit du sacrifice offert par Zacharie au temple de Jérusalem (Lc 1,5) — l’aigle à Jean parce que cet évangéliste atteint les sommets de la doctrine comme l’aigle ceux des montagnes. (source)

Mouais… c’est un peu tiré par les cheveux, mon bon Jérôme. D’ailleurs Saint Irénée de Lyon (vers 180) avait déjà comparé les quatre évangélistes aux figures du tétramorphe, à la nuance près qu’il attribue l’aigle à Marc et le lion à Jean. (source) Bon. Les exégètes ne sont pas trop sûrs de leur affaire. Tout se passe comme si ces quatre figures, déjà présentes longtemps avant le christianisme, faisaient encore l’objet d’un culte vernaculaire, et qu’il parut opportun à la jeune église de les recycler pour justifier ce culte ancien en le christianisant. Les premiers Pères de l’Église ont abusé de cette stratégie, recyclant des fêtes en l’honneur de Mithra, d’Esus, d’Isis ou de Lugh. Les célébrations païennes sont devenues fêtes chrétiennes, quitte à déformer leur essence, ruinant ainsi l’efficacité spirituelle.

Le synchrétisme de la jeune église de Jésus a créé une grande confusion des symboles, des prophètes et des rites. Il en est ressorti une pagaille spirituelle que les siècles et les conciles n’ont fait que multiplier et généraliser, jusqu’au concile Vatican II où cette pomme de Jean XXIII dénatura absolument le rituel de la messe qu’il dissocia des emplacements sacrés, changeant la place du maître autel et la position du célébrant, ce qui, pour tous les géobiologues, procède d’une ignorance condamnable, ou d’un cynisme assumé. On dirait que ce pape, après la suppression de la messe en latin, a voulu donner le coup de grâce à sa religion déjà bien décadente en Europe.

On l’a compris, le tétramorphe n’a pas été créé par les Chrétiens. Pas plus que le symbole de la croix, ni que les cathédrales médiévales, d’ailleurs. Les quatre créatures possèdent « une origine plus lointaine, les quatre gardiens du monde ou les quatre porteurs du ciel disposés aux quatre coins du firmament de l’ancien Orient. On y reconnaît les symboles stellaires du zodiaque de la « croix fixe » qui sont le taureau, le lion, le scorpion et le verseau – le scorpion étant remplacé par l’aigle et le verseau par l’homme. »  (source)

 

La Croix Fixe

Le zodiaque comporte trois croix : les croix cardinale, fixe et mutable. Si les astrologues prennent, à l’heure actuelle, la croix cardinale comme origine, il n’en a pas toujours été ainsi. Pendant longtemps ce fut la croix fixe. Les textes babyloniens commencent toujours leur énumération des signes par le signe fixe du Taureau. Les langues hébraïque et arabe ont respectivement comme première lettre de leur alphabet Aleph et Alif qui précisément signifie «taureau». Le Scorpion, le Lion et le Verseau appartiennent également à la croix des signes fixes. Cette croix nous rappelle l’époque où le zodiaque avait comme repère les étoiles les plus brillantes de ces signes : Antarès pour le Scorpion, Régulus pour le Lion, Aldébaran pour le Taureau. Ces quatre signes constituent la figure du Tétramorphe que l’on retrouve à plusieurs reprises dans la littérature ancienne. Le prophète Ezechiel a vu ces quatre signes dans sa vision du trône céleste. Œdipe a affronté la sphinge : son corps est celui d’un Taureau, son poitrail celui d’un Lion, ses ailes celles d’un Aigle (souvent équivalent symbolique du Scorpion) et son visage de femme celui du Verseau.

« Les Babyloniens commencent toujours par le signe fixe du Taureau. »  Voici une vérité qui demande réflexion. Pour moi, le Taureau était un signe féminin à l’origine, qui a été masculinisé quand le patriarcat naissant a voulu effacer tous les souvenirs du matriarcat, ce temps où les déesses marchaient parmi les hommes.

 

Œdipe et la Sphinge

La Sphinge est représentée comme un être hybride, mi-humain, mi-bête, avec une tête et un buste de femme sur un corps de lion pourvu d’une paire d’ailes de rapace. Elle emprunte son aspect au Sphinx égyptien qui a également un aspect léonin mais qui est de sexe mâle, avec une tête de pharaon. Selon P. Legendre (1988), son nom provient de « sphiggô », signifiant « serrer, lier étroitement, nouer » : elle est littéralement « l’Étrangleuse ». D’après Euripide, la Sphinge venait d’Éthiopie et avait été envoyée par Héra afin de punir les thébains qui l’avaient outragé. Asclépiade précise que les thébains étaient conduits à se réunir chaque jour en assemblée afin d’essayer de résoudre l’énigme que leur posait la Sphinge, afin qu’elle cesse de les enlever un par un pour les dévorer.

M. Delcourt (1981) a analysé son iconographie (vases, bas-reliefs, statuettes) datant de l’antiquité. Il apparaît que ce que l’on pouvait prendre, au premier abord, comme des scènes de poursuite et de rapt, sont en fait des actes d’accouplement sexuel de la Sphinge avec des hommes presque toujours jeunes : la Sphinge serait une succube, une femme lascive, avide d’une sexualité violente. Cette dimension érotique est confirmée par le fait que les prostituées étaient alors appelées des sphinges dans le langage populaire. La Sphinge est une figure de la “mangeuse d’hommes”, une “femme fatale” ayant un pouvoir de vie et de mort sur les hommes qu’elle tient à sa merci .

On le voit, la Sphinge de la mythologie grecque réunit en sa personne les quatre créatures du Tétramorphe. À ce titre, on peut la considérer comme le toute première version de cette symbolique à la si longue histoire.

Est-elle une succube, une déesse extraterrestre avide de fécondation par de beaux jeunes gens qu’elle dévorait après l’accouplement, à l’instar de la mante religieuse, ou bien plus simplement une prophétesse s’exprimant par énigme ? Elle était sans doute un peu des deux. « la Sphinge n’était pas une bête fauve, mais une prophétesse qui donnait aux Thébains des oracles difficiles à comprendre ; elle en fit périr beaucoup parmi ceux qui avaient pris ses oracles à l’envers. »   (source) 

En tout cas, cette affaire me semble liée, encore une, au conflit protohistorique entre les Matriarques et le patriarcat émergent. Puissante dans la magie sexuelle, fascinante envoûteuse, éveilleuse à l’esprit aiguisé, voyante, sachante, druidesse, prophétesse, enchanteresse, dangereuse croqueuse d’hommes, insoumise et dominatrice, la Sphinge ressemble trop à Lilith ! Elle est une de ses filles, ou bien est-elle sa mère ? Pourquoi la légende lui donne-t-elle ces attributs animaliers ? Est-ce encore pour indiquer sa quadruple origine stellaire ?

Serait-elle l’héritière de cultures venues des quatre constellations du Taureau, des Gémeaux, du Scorpion et du Lion ? Il y en a du beau monde, tout d’un coup, sur notre petite planète bleue ! Est-ce une façon de nous dire que les quatre peuples fondateurs de la race humaine n°5 étaient sous la gouvernance des femmes ?

J’ai cette hypothèse dans un coin de mon aura, bien au chaud, là où je stocke mes fonds de tiroirs virtuels. Un jour prochain, je serai prêt à vous conter par le menu l’épopée des Grandes Déesses, la trinité IsisHathor-Héra, les Matriarches, reines guerrières, filles du ciel et maîtresses de la terre. Je vous dirai celles dont le règne a duré si longtemps. Un jour sans doute.

 

 

Mais revenons à nos moutons, si j’ose dire. Ci-dessus, le taureau ailé, objet d’un culte dans l’antique Babylone vers 750 AEC.  Près de lui, cet homme ailé à tête de lion, dit léontocéphaline, issu tout droit du culte de Mithra, vers 380 EC.  Plus de mille ans les séparent ! Et il y a plus fort. Une des plus anciennes statues découvertes à ce jour, âgée de 5000 ans, représente elle aussi une léontocéphaline, figure humaine à tête de lion.  Ces curieux hybrides hantaient depuis longtemps l’imaginaire des religions primitives. Les chrétiens n’ont fait que les recycler, mais le sens originel s’est perdu au cours des siècles et des mutations. Se pourrait-il qu’ils aient existé pour de vrai ?

Pensez aux dieux hybrides de l’ancienne Égypte, pensez à ceux du panthéon hindou. Ont-ils eu une réalité ?  L’enquête ne fait que commencer. 

Avant de la poursuivre, je vous donne tout de go mon sentiment : Il s’agit d’un engin volant. La comparaison avec la merkaba me semble suffisante. Reprenons l’extrait de l’Apocalypse de Jean : « Le premier animal ressemblait à un lion, le deuxième à un jeune taureau, le troisième avait comme une face humaine et le quatrième semblait un aigle en plein vol. »

Les deux premiers animaux n’en sont pas : ils expriment la force combative et la férocité qu’avaient tous les anges de Yahweh, maréchal des légions d’anges. Celui qui a une face humaine est aussi un ange, et non un homme. dans la plupart des représentations médiévales du tétramorphe, l’Homme est ailé. Il s’agit d’un ange.  Le dernier enfin, l’Aigle, conforte encore l’idée de personnages volants.

Les quatre créatures qui entourent YHWH dans son engin volant sont des Anges, créatures géantes (4m environ) capables de voler, mais sans ailes. Plutôt avec un réacteur aux fesses. Ou confortablement calés dans des astronefs. N’oublions pas que ces scènes ont été décrites par des gens simples qui ne connaissaient pas d’autres êtres volants que les oiseaux, les chauves-souris, etc. Tous munis d’ailes…

 

 

Ainsi donc

Chacun ses croyances, et les vaches sacrées seront bien gardées. Nous ancêtres ont tout gobé. Ils ont avalé des couleuvres avec l’aisance d’un charmeur de serpents. C’était compter sans le web, sans la diffusion planétaire de tous les textes jadis enfermés dans des bibliothèques strictement protégées par le Saint Siège. N’oublions pas que jusqu’à l’invention de la typographie vers 1440, tous les écrits étaient recopiés par des copistes. Des moines, le plus souvent.  Ils recopiaient dans leur couvent ce que le supérieur leur disait de recopier, omettant et ajoutant ce qu’il leur indiquait. Le contrôle de l’église catholique a été quasi total pendant tout ce temps.

Une foule d’anecdotes bidons, pleines d’erreurs et d’anachronismes, a été ajouté par les copistes. Que ceci n’empêchent pas les croyants de croire, ni les incrédules de ne pas croire. Je suis mythologue, je porte sur toutes les mythologies un regard critique : est-ce vrai ? Est-ce déformé ? Est-ce exagéré ? Pour quelles raisons ? Mon travail n’a d’autre but que de regarder en face la vérité — si une telle chose existe ! — avec un œil critique et l’esprit débarrassé de tout a-priori. C’est pour cette raison que vous êtes nombreux à me lire. Vous savez que vos convictions vous appartiennent. Elles vous aident à vivre, loin de moi l’idée de les dynamiter, du grec ancien dunamos, qui veut dire ange.

Toutes les croyances sont infiniment respectables, bien que je préfère m’aligner sur l’éternel principe d’incertitude, il est bon de croire sans y croire.

 

Xavier Séguin

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