L’affaire Jésus n’a pas fini de faire couler de l’encre, après avoir fait couler tant de sang. Lui qui est venu prêcher l’amour sur terre, sa religion n’a pas suivi son exemple pacifique, ni son dénuement, ni sa simplicité. Pour autant qu’un tel homme ait vraiment existé. Car ce modèle en a eu beaucoup d’autres…
J’ai déjà eu l’occasion d’expliquer ce paradoxe : aucune trace du crucifié dans les archives romaines, pourtant complètes, voire tatillonnes : on connaît par exemple la consommation de nourriture pour la garnison de Judée sous Ponce Pilate. On possède aussi la liste de tous les condamnés à mort de sa mandature : Jésus n’y figure pas. Un oubli, sans doute… Plus troublant encore : du temps de Jésus, aucun écrivain, historien, voyageur ou simple copiste n’a pondu la moindre ligne sur le dénommé Jésus. Le moins qu’on puisse dire est qu’il n’a pas fait le buzz à son époque, même s’il s’est bien rattrapé depuis.
Dans un livre remarquable, Barbara G. Walker instruit le dossier Jésus avec une minutie exemplaire. « Les Évangiles n’ont pas été écrits de son temps ni même par des personnes qui l’ont connu. » Ils se sont transmis d’abord oralement (dit-on) avant d’être couchés par écrit « à la fin du 1er siècle, au 2e siècle ou même plus tard, c’est à dire bien longtemps après sa mort présumée. La plupart des chercheurs croient que le plus ancien livre du Nouveau Testament était le premier épître aux Thessaloniciens, écrit peut-être en 51 EC par Paul, qui n’avait jamais vu Jésus et ne connaissait aucun détail de sa vie. » (source)
Ces faits aisément vérifiables ne sont pas les seules ombres au tableau. Il y a une foultitude de détails de la vie de Jésus qui ont été manifestement empruntés à d’autres traditions, ou à la vie d’autres personnages historiques ou mythologiques.
Comme l’enfant Krishna, l’enfant Jésus est l’objet d’une adoration particulière. Comme Adonis, Jésus est né d’une jeune fille consacrée. On a mangé son corps sous forme de pain, comme pour Adonis, Osiris, Dionysos, et bien d’autres. Comme les adorateurs d’Osiris, ceux de Jésus l’ont mangé pour en faire une partie d’eux-mêmes, afin de participer à sa résurrection: « Celui qui mange ma chair et boit mon sang habite en moi et moi en lui » (source)Jean 6:56 Comme Attis, Jésus a été sacrifié à l’équinoxe de printemps et ressuscité d’entre les morts le troisième jour, quand il est devenu Dieu et est monté au ciel. Comme Orphée et Héraclès, il «déchira l’enfer» et en rapporta le secret de la vie éternelle, promettant de garder tous les morts auprès lui jusqu’à la gloire. (source)Jean 12:32 Comme Mithra et tous les autres dieux solaires, son anniversaire est célébré au solstice d’hiver.
Jésus n’est pas le premier à se faire appeler le Christ. Ce titre de Christos, l’oint, l’initié a été porté par un nombre impressionnant de dieux et de prophètes longtemps avant lui. C’est pourquoi je prétends que le christianisme existait bien avant l’invention de Jésus. Ainsi l’empereur Constantin a troqué son titre héréditaire de César pour celui de Christ, à l’imitation de Mithra, Osiris, Orphée, Prométhée, et tant d’autres.
Mais il n’y a pas que ça. Jésus avait des tas de surnoms, que l’on retrouve chez bon nombre de ses prédécesseurs. Osiris et Tammuz ont été appelés Bon Berger. Sarapis était le seigneur de la mort et le roi de la gloire. Mithra et Héraclès étaient la Lumière du Monde, Soleil de Justice, Hélios le Soleil levant. Dionysos était le roi des rois, le dieu des dieux. Hermès était l’Illuminé et le Logos. Vishnu et Mithra étaient fils de l’Homme et Messie. Adonis était le Seigneur et l’Époux. Mot-Aleyin était l’Agneau de Dieu. Et le qualificatif de « Sauveur » (Soter) leur a été donné à tous.
Barbara G. Walker cite le sceptique Celsus qui a noté que les mendiants et les vagabonds tout au long l’Empire ont prétendu faire des miracles et être fils de Dieu. Ils prophétisaient la fin du monde, et se voulaient des sauveurs. Changer l’eau en vin est un faux miracle tiré d’un rituel dyonisiaque de Sidon. Une foule de fidèles se pressaient devant cette illusion obtenue à l’aide d’un système de vases et de siphons mis au point par un ingénieur nommé Heron.
« Bien des siècles plus tôt, les prêtresses de Ninive guérissaient les aveugles avec de la salive. Demeter d’Eleusis a multiplié les pains et les poissons en tant que Maîtresse de la Terre et de la Mer. Guérir les malades, ressusciter les morts, chasser les démons, manipuler les poisons, les serpents (Marc 16:18), etc., étaient choses si communes que Celsus dédaigne les miracles « chrétiens » : « ils ne font rien de plus que ces enchanteurs qui, pour quelques sous, exercent leur prétendue magie sur la place publique. Les magiciens d’Egypte chassent les mauvais esprits et guérissent les maladies par le souffle, mais devons-nous pour autant les croire Fils de Dieu? » (source)
« La religion chrétienne ne contient rien d’autre que ce que les chrétiens tiennent en commun avec les païens; rien de nouveau, ni rien de vraiment grand. » avoue St. Augustin qui reconnaît volontiers que « la vraie religion » était connue des anciens, et qu’elle existait depuis le début des temps, mais qu’on l’a seulement appelée appelé Chrétienne après que le « Christ est venu dans la chair ». (source)Doane, 409-1 1, cité par Barbara Walker.
Dans les premiers siècles de notre ère, il y avait beaucoup de sectes chrétiennes antagonistes, et de nombreux Évangiles contradictoires. Jusqu’en 450, selon l’évêque Théodore de Cyrrhus, il n’y avait pas moins de 200 évangiles différents vénérés par les églises de son propre diocèse, jusqu’à ce qu’il détruise tout sauf les quatre canoniques. (source)M. Smith, 2, cité par Barbara Walker
Les premiers siècles de l’ère commune (EC) regorgent de croyances très proches du christianisme, et comptent aussi un très grand nombre de prophètes « sauveurs », « bons pasteurs » et « christ », ce qui signifie l’oint. Ces messies étaient coulés dans le même moule que Jésus, dont l’existence historique est loin d’être assurée. Ils lui ressemblaient tous, de près …ou de l’oint.
De là à dire que Jésus a été composé à l’aide de personnages et d’influences diverses, il n’y a qu’un pas que bien des historiens ont déjà franchi. Les méthodes d’investigation et les archives accessibles permettent aujourd’hui une avancée spectaculaire, en ce domaine comme dans bien d’autres. Mais la négation du phénomène Jésus n’est pas d’actualité. J’ai pu écrire qu’il aurait été inventé à la fin du Moyen Age, pourtant de nombreuses preuves de sa présence, réelle ou imaginaire, apparaissent dès les premiers siècles de notre ère.
L’invention de Jésus serait donc plus précoce, même si son personnage composite a été façonné au cours des 10 premiers siècles, et modifié bien plus tard. Il se peut aussi que certains textes anciens aient été falsifiés par les moines copistes pour y ajouter le nom de Jésus là où il ne figurait pas. Jusqu’à l’invention de l’imprimerie, les anciens textes étaient confiés aux copistes et aux enlumineurs qui composaient les livres un par un à la main, sous le strict contrôle de l’église catholique romaine. Il était alors facile pour l’évêque ou pour le prieur de modifier le texte que le moine devait recopier.
Pour changer le nom d’Esus, dieu célèbre à cette époque, il suffisait aux copistes d’ajouter un I devant le nom de l’ancien dieu. Le tour est joué, Jésus est né, alléluia !
La découverte au siècle dernier des manuscrits de la Mer Morte et de Nag Hammadi ont fait réapparaître une figure christique bien différente de celle que nous donnent les quatre évangiles canoniques. Les centaines d’évangiles détruits par Théodoret de Cyr et ses émules contenaient sans doute bien des détails intéressants, même s’il y a peu de chance que ces détails soient véridiques.
Je ne sais si je serai amené à compléter cette enquête qui a contrarié plus d’un lecteur. Mon intention n’a jamais été de réduire à néant la foi chrétienne, mais d’énoncer des hypothèses à partir des faits établis… ou de leur absence. Celles et ceux d’entre vous qui reconnaissent l’existence et la divinité de Jésus ont tout mon respect et tout mon amour. Jésus, en 2000 ans, s’est imposé au monde comme une figure divine, bienveillante, source d’amour et de pardon pour une grande partie de la planète. La foule des croyants l’a fait exister et le maintient en vie — au moins sous forme d’égrégore.
Si j’étais un alien désireux de conquérir la Terre, je me servirai de cette belle histoire comme les conquistadores espagnols se sont servi de la croyance amérindienne en un dieu blanc et barbu pour asservir les indigènes et les massacrer sans résistance. Quand les aliens viendront, ils n’auront qu’à se prétendre Jésus, Elie, Allah, Yahveh, Bouddha, Rama et consorts pour que la planète des croyants se range à leurs côtés.
Croire sans y croire, telle est la seule sagesse.
Chacun ses croyances, et les vaches sacrées seront bien gardées. Nous ancêtres ont tout gobé. Ils ont avalé des couleuvres avec l’aisance d’un charmeur de serpents. C’était compter sans le web, sans la diffusion planétaire de tous les textes jadis enfermés dans des bibliothèques strictement protégées par le Saint Siège. N’oublions pas que jusqu’à l’invention de la typographie vers 1440, tous les écrits étaient recopiés par des copistes. Des moines, le plus souvent. Ils recopiaient dans leur couvent ce que le supérieur leur disait de recopier, omettant et ajoutant ce qu’il leur indiquait. Le contrôle de l’église catholique a été quasi total pendant tout ce temps.
Une foule d’anecdotes bidons, pleines d’erreurs et d’anachronismes, a été ajouté par les copistes. Que ceci n’empêchent pas les croyants de croire, ni les incrédules de ne pas croire. Je suis mythologue, je porte sur toutes les mythologies un regard critique : est-ce vrai ? Est-ce déformé ? Est-ce exagéré ? Pour quelles raisons ? Mon travail n’a d’autre but que de regarder en face la vérité — si une telle chose existe ! — avec un œil critique et l’esprit débarrassé de tout a-priori. C’est pour cette raison que vous êtes nombreux à me lire. Vous savez que vos convictions vous appartiennent. Elles vous aident à vivre, loin de moi l’idée de les dynamiter, du grec ancien dunamos, qui veut dire ange.
Toutes les croyances sont infiniment respectables, bien que je préfère m’aligner sur l’éternel principe d’incertitude, il est bon de croire sans y croire.
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