Le cœur des sorciers

 

Vous connaissez mon goût pour les exploits de Carlos Castaneda. Juan Matus, son benefactor, ne loupe jamais une occasion de rappeler son choix de vie : suivre le chemin qui a du cœur. Ça ne fait pas partie de la Règle, pourtant les naguals s’y tiennent… disons la plupart d’entre eux. C’est mon cas.

 

Nagual se dit nagoual, comme Guadeloupe. Mon benefactor était le nagual de notre clan. Me voici nagual à mon tour. Mais je n’ai ni clan ni secte et n’en voudrais pour rien au monde. Je suis ma route ou ma route me suit.

Très honnêtement, je ne vois pas comment un guerrier peut quitter ce chemin sans se renier lui-même. On ne renonce pas au cœur sans y laisser ses pouvoirs, son avoir et ses devoirs. Telle est ma conviction.

 

Ce chemin-ci

J’ai suivi ce chemin-là ma vie durant. Le cœur est mon conseil depuis l’aurore. On me l’a reproché, d’autres en ont abusé, ma barque a tangué, je n’ai pas coulé. Mon cœur n’a pas cessé de battre. J’ai pleuré mon alter ego, Devic, qui a tant compté pour moi depuis la prime enfance. Jamais on ne s’est perdu de vue la vie durant. Toujours il a renoué les fils que je laissais pendre.

Qui trop embrasse, mal étreint. En ce temps-là j’étais comme le lait qui bout. Débordé. je courais de droite à gauche, toujours plusieurs casseroles sur le feu. Actif, pro-actif même, je ne laissais à personne le soin de me noyer dans un verre d’eau. Et s’il fallait boire les sept mers, j’étais volontaire.

 

Ehpad remords

Mes parents ont fini leur vie dans un Ehpad.établissement hostile pour aïeux délaissés Je ne le souhaite à personne. Pour ma part, il faut que j’y coupe quitte que coûte. Ehpad remord, mon gars, c’était leur sort. Je les ai accompagnés dans cet étrange crépuscule où chacun sait ce qui vient et nul n’en parle. Un an avant son départ, Loulou m’a posé une question étrange dans la bouche d’une croyante — Loulou est allée à la messe tous les dimanches jusqu’à 90 ans, après elle la regardait sur France 2.

Brisant un très long silence où je la croyais endormie, elle m’a dit : -Toi qui t’intéresses à tous ces machins bizarres, l’après-vie, tout ça… Qu’est-ce qu’il y a après la mort ?
J’étais sidéré, incapable de répondre au niveau exact où elle avait formulé sa question. Trop d’émotionnel. Alors j’ai fait le con, pour gagner du temps.
Quoi ? Mais tu le sais très bien, tu l’as récité toute ta vie dans le Credo, les saints et les anges, le purgatoire, le paradis, l’enfer…
Sa réponse m’a fichu par terre.
Je ne te parle pas de ces conneries-là, je te demande ton avis à toi. J’ai besoin de savoir.

La demande est on ne peut plus claire. Impérative. Je me devais d’y répondre. Je l’ai fait comme j’ai pu. Nous en avons parlé deux fois. Pas ce soir-là : il m’a fallu deux jours pour digérer la claque. Comme elle était demandeuse, elle est vite revenue à la charge. Sa foi chrétienne n’était pas garantie grand teint. Elle n’a pas résisté à l’épreuve des vrais défis. Maman cherchait ailleurs. Castaneda l’intéressait bien davantage. Les réponses qu’il donne ont le mérite de tenir la route et la distance : je le pratique avec bonheur depuis cinquante ans. J’ai toujours vécu selon ses principes, même avant qu’il ne les formalise dans ses bouquins. Et je m’en trouve plutôt bien.

 

 

Devic et une sœurcière

Le fait est que Devic aussi bien qu’une autre sorcière de notre groupe, comme moi dotés de plusieurs frères et sœurs, se sont occupés eux aussi de leur vieux parents et les ont accompagnés vers l’autre rive. Je la connais bien cette rive-là, j’y suis allé souvent. Du moins c’est ce que je croyais. Mais hiatus : l’autre monde que je fréquente et que j’appelle l’astral, c’est le monde des sorciers et des guerriers de lumière. On y rencontre des super lumineux, anges ou archanges, mais de défunts, point. Pas la queue d’un. Il y a plus d’un astral comme il y a plus d’un mystère.

Trois sorciers dotés d’une fratrie conséquente se consacrent à leurs vieux parents. Pourquoi eux justement ? Accompagnement. Désir de connaissance. Cœur ouvert tous les trois. Aucun de leur frères et sœurs ne s’intéressent ni de près ni de loin à l’autre monde des sorciers. Aucun de leur frères et sœurs ne se sont rendus disponibles. Ils avaient leur vie bien remplie, routine beaucoup plus intéressante sans doute. Tant pis pour eux. Je me borne à constater le fait. Pas de blâme, pas de jugement. C’est ainsi.

La magie agissante est mon mode de vie. Magie urgente. Exigeante. Ahurissante et ravissante. Il y a quelques années, j’ai découvert qu’on pouvait envoyer de l’énergie par le mystère des ondes scalaires qui semblent au delà du monde physique. Le ministère du mystère. J’ai consacré de nombreux articles à ces ondes incompréhensibles — sauf par le canal de l’hypersensible. Le chemin qui a du cœur…

 

Cœur ouvert

Le véhicule qui les anime et les développe n’est pas physique. L’hypersensible est de nature ondulatoire. Il obéit aux règles des ondes scalaires. J’en ai conclu que ces ondes scalaires sont les ondes porteuses de l’amour.

Les sorciers dans notre genre — des naguals, des portes ouvertes sur l’autre monde — se servent de ces ondes d’amour pour des guérisons. Le nagual don Juan Matus, benefactor de Carlos Castaneda, ne se cachait pas derrière sa main. Une fois pour toutes, il avait choisi le chemin qui a du cœur. La voie de l’amour. C’est avec amour qu’il a enseigné Carlos.

Ce dernier, pour sa part, n’a guère fréquenté ce chemin-là. Mais qui suis-je pour le juger ? De même, mon benefactor a fait ce qu’il a voulu. Moi aussi. Chacun sa route, chacun son chemin. (écouter) On s’incarne et du coup on hérite d’une lignée génétique. On s’identifie à son père ou à sa mère, ou bien on le / la rejette, c’est tout un. On est tous, peu ou prou, les héritiers d’un sang, d’un passé génétique, d’un mode de fonctionnement qui vient de nos ancêtres corporels.

 

Mouton noir

De temps en temps pourtant, dans l’une ou l’autre famille, survient un mouton noir. Un caneton vagabond dans la couvée de poussins dociles. Imbéciles. Ce caneton-là est né sorcier. Il se souvient de l’au-delà.

La religion est pour ceux qui ont peur de l’enfer. La spiritualité, pour ceux qui y sont déjà allés. (Lee Stringer)

 

 

Sa lignée biologique / psychologique / comportementale, il la connaît. Mais ne la subit pas. Il échappe à la loi du grand nombre. Il est né pour suivre une une autre loi : la Règle. Ce caneton est un guerrier. De l’étoffe dont ont fait les naguals. Ah si j’osais parodier Mevlana saint patron soufi des derviches tourneurs de Konya, oui, si j’osais ! Allez, j’ose : « Prends cent hommes, tu y trouveras un guerrier. Prends cent guerriers, tu y trouveras un sorcier. Prends dix mille sorciers, tu y trouveras un Nagual. » (source)Librement adapté du maître soufi Djallal ad Din Rumi (1207-1273), dit Mevlana. Je sais qu’il me lit, je souhaite qu’il me pardonne.

« Jésus a dit : soyez passants. » (Évangile de Thomas)

 

Pour la plupart des gens, un Nagual est quelqu’un qui déconne. Ils ont raison. Le Nagual déconne parce qu’il est déconnecté. Il a rompu avec la Matrice. Il n’est plus matri ciel.

 

Mes deux lignées

Je sais que je suis le fruit de deux lignées spirituelles : Castaneda et le Clan du Loup. Le Nagual Matus a initié Castaneda qui a initié mon benefactor qui m’a initié. Initié n’est pas le mot juste. Enfanté convient mieux. Sur Castaneda, il y a beaucoup d’infos. Trop. Beaucoup d’incompris. Alors le guerrier doit trier. Et il n’aime pas qu’on le chipote quand il trie. Parce qu’il a la matière et la matière fait cale. Il faut tout vérifier par toi-même. Mais les textes sont là. Étudiables. Diables.

Sur le Clan du Loup, je ne peux rien dire. Pas encore. Je n’en suis pas capable, sur le sujet je suis bouché. Mon benefactor m’en a raconté des tripotées quand j’étais en conscience accrue. Mais quand je quitte le côté gauche pour retrouver le connard de côté droit bulldozer rationnel, la conscience accrue n’est plus à croire. Elle n’est plus crue, elle est cuite. Elle a perdu son goût nature.

Il me faisait basculer en conscience accrue, ça je m’en souviens, mais pas du contenu. Je n’écoutais que d’une oreille. Pourtant mon inconscient a tout enregistré. Il faut que j’y retourne. Je n’y arrive pas. Il faut que je localise mon PA sur ces conversations. Monologues, plutôt. Précieux monologues. Inaccessibles et pourtant si présents. Je suis sûr que je m’en inspire, pus étroitement peut-être que de Castaneda — mais je n’en ai pas connaissance réelle.

Je ne sais pas décaler mon PA à volonté comme le Nagual Matus ou comme Don Genaro. Castaneda ne savait pas non plus.

Mon benefactor savait. À son gré. D’où ses alliés. Mieux : il pouvait décaler le PA de toute une assemblée. Ou d’une seule femme, comme celle qui lui avait dit : « Tu es l’homme le plus séduisant que j’ai rencontré » (source)

 

Initiation

À mon tour je puis donner le jour à de nouveaux enfants d’eux-mêmes. Quand mon PA bouge, il entraîne le PA d’une personne. Une seule à la fois. Il faut deux jours pleins pour que cette magie opère. D’où les « stages » du mardi soir au vendredi matin. Deux jours pleins, réveil ici à Erquy Reki, et coucher ici aussi. Impératif. Le mardi soir et le vendredi matin comptent pour des prunes. Ils sont techniquement nécessaires pour qu’il y ait lever et coucher sur place le mercredi et le jeudi. Seuls ces deux jours-là, complets, comptent pour l’action magique.

Le mercredi, jour de Mercure, le messager des dieux aux talons ailés. Jour de la communication. Et le jeudi, jour de l’action. Sous l’égide de Jupiter Zeus le dieu des dieux, la foudre, l’illumination, le chêne, le soleil, le triomphe, l’affirmation de soi. Tu as compris, ça marche à tous les coups. Comment voudrais-tu que ça foire ?

 

 

Quand les historiens changeront de lunettes, leur myopie deviendra supportable.
Lao Surlam