Le vieil homme et la mer

 

Encore un peu de temps, vous me verrez. Encore un peu de temps, vous ne me verrez plus. Une bien jolie parole attribuée à Jésus. On ne prête qu’aux mythes. À trente ans, moi aussi je me suis vu mort. Je me suis gouré. Jésus a vu juste. Gloire à lui. Mais à soixante-quinze berges, prévoir sa mort n’est que navrante banalité. Pourquoi le dire? Dans l’intérêt des hésitants. Pour les faire réfléchir. Aide à la décision. Surtout n’y voyez aucun apitoiement sur moi-même.

 

La mort n’est rien

De quoi me plaindrais-je? La mort viendrait à son heure. Ma vie si remplie, la chance à chaque pas, l’amour jusqu’au bout. Pourquoi ce lit de roses, sans les épines? Qu’en sais-je? Les Parques regardaient ailleurs quand elles ont signé mon destin. Bénies soient-elles!

En tout cas, quelle régalade! Le malheur n’a pas manqué, ni la force d’âme pour le supporter. Une vie que l’on consacre aux seuls plaisirs égoïstes apporte lassitude, dégoût, dépression, mort du corps. L’âme ne s’en remet pas. Dès la tendre enfance, je savais que la mort n’est qu’un peu de chagrin — surtout pour ceux qui restent. Un jeu de dupes à pleurer le défunt. Au-delà de l’ultime porte, ça continue. Rien d’ultime. Ça continue sur le même mode, questions sans réponses, vie post-existentielle, la Poste existe en ciel.

Ça continue? Qu’est-ce que j’en sais? J’y suis allé. J’en viens. L’autre côté est tout empli de vieux amis. Nietzsche, Castaneda, Jung, Platon, Moebius, Héraclite, Aragon, Tesla, Gainsbourg, Loulou, Flornoy, Devictor… Et des potes en pagaille, Coquelle de Srinagar, Aïnama de Passy, Pépé Charles de Foucault, l’abbé Pierre et Jean Millet. Ils m’ont fait. C’est un fait. Je leur dois d’être moi. Et j’erre inconsolable. J’ai l’air d’un con seulâbre.

Rien n’est jamais acquis à l’homme ni sa force / Ni sa faiblesse ni son coeur et quand il croit / Ouvrir ses bras son ombre est celle d’une croix / Sa vie est un étrange et douloureux divorce.

Louis Aragon

 

Anniversaires

Jean Millet? Il était mon prof de philo à Stan en 68. Bachotage sur fond d’émeutes estudiantines. L’abbé Millet m’a si bien préparé, je me suis ramassé un 20 en philo. Du coup ça m’a décidé. Je serai philosophe. Université Paris X Nanterre. Co-détenu: Daniel CohnBendit, alias Dany le Rouge. Il fut l’instigateur du Mouvement du 22 mars, à l’origine du fameux mois de mai.

Car il y a un mai. Pensez-y. Le 21 mai 2024, si je suis encore en ligne, j’aurais 75 ans. Mai 68 aura 56 bougies.

 

 

Passe temps

Fin du flash-back. Retour à nos moutons qui broutent les vagues. J’écris le peu de temps qui me reste avec vous. Profitez-en.

Je chante pour passer le temps
Petit qu’il me reste de vivre
Comme on dessine sur le givre
Comme on se fait le cœur content
À lancer cailloux sur l’étang
Je chante pour passer le temps
(Louis Aragon)

Profitez-en pour enfin réaliser votre rêve le plus fou: rencontrer l’idiot. Le fou contrôlé. Le Mat que je suis, à ce qu’on m’a dit. Mais le suis-je? Presque.

Ce Mat-là entend des voix. la nuit, dans mes rêves réels, quelqu’un m’a appelé pendant tout le mois de juillet. C’était une demande de rendez-vous, quelque chose comme ça. pas tout à fait un appel à l’aide, mais la demande était très insistante.

Impossible de dire s’il s’agit d’une femme ou d’un homme, adulte ou enfant. Mais je crois savoir que ça vient d’un être humain

Les appels se font entendre en astral régulièrement depuis près d’un an. (5 juin 2024)

 

Je l’appelle X

Je ne sais pas qui c’est, je ne sais pas pourquoi, je ne connais pas sa demande, mais il y en a une, j’en suis sûr. Certaines nuits je me réveille avec la rémanence fugace d’un rêve qui s’efface. La frustrante impression que l’inconnu(e) et moi discutions calmement à visage découvert mais l’image s’est floutée. À peine entr’ouverte, la porte se referme. Ça n’a jamais été plus net que ça. Largement insuffisant pour donner le début d’un commencement d’une entrée en matière.ou la préface à l’introduction de prolégomènes?

À la mi-août, je me suis décidé à poster un article pour suggérer à X de prendre contact avec moi dans le monde réel où l’on s’ennuie. Contact Astral. Juste avant, deux candidats au stage initiatique s’étaient manifestés presque ensemble. Même sexe, même âge, même prénom. À part ces points communs, ils ne se connaissent pas. Pourtant j’étais sûr que l’appel nocturne venait de l’un d’eux. Ou des deux. Dès lors, les manifestations insistantes ont cessé.

Les deux stagiaires n’ont pas reconnus être les auteurs de ces appels. Peut-être se connaissent-ils? Peut-être veulent-ils garder le secret… Peut-être, peut-être, peut-être! Je tourne en rond. Et puis coup de théâtre: les appels astraux ont repris de plus belle. Je suis formel, aucun des deux stagiaires pré-cités n’en est l’auteur. Je les connais assez maintenant, je suis sûr qu’il s’agit de quelqu’un d’autre. Peut-être une femme? Peut-être la piste d’un nouveau mystère? Une découverte comme je les aime?

Tous ces peut-être me donnent le tournis.Tant pis pour la discrétion, je suis tout de suite sorti de l’ombre. D’où cet article. Qui que tu sois, fais-toi connaître ici et maintenant. Si nous devons nous rencontrer, autant que ce soit de mon vivant.

 

 

C’est toi qui sais

Pourquoi me rencontrer? L’urgence n’explique pas tout. Mes dons font le reste. J’ai reçu le pouvoir d’aider par la guérison, le rééquilibrage énergétique (reiki d’Erquy) et l’éveil. Je suis celui qui transmet la mystérieuse équation de l’arcane XV, l’ouverture des six premiers chakras. Ensuite arrive l’inconditionnelle fusion de la Maison-Dieu, l’éveil au Soi.

Si tu viens me voir, toi l’indécis, nimbé des brumes de ton lointain pays, si enfin tu es prêt — c’est toi qui le sais. Ne gâche pas l’ouverture que je t’offre. Tu tiens dans ta main ton centimètre-cube de chance. Ça suffit. Saisis-le. Tu sais ce qu’on dit de l’oiseau de la liberté.

L’oiseau de la liberté vole en ligne droite et il ne s’arrête jamais.

Carlos Castaneda

 

Homme libre

Homme libre, toujours tu chériras la mer. C’est au bout de la route. Le goudron s’enfonce dans le sable fin. Impossible d’aller plus loin. La mer barre la dune, la vague, l’horizon. Je me suis arrêté sur la grève où jadis tout avait commencé.

La boucle me ramène à mes désirs d’enfance. Erquy comme une promesse. La maison, le jardin, des souvenirs anciens qui ont bordé mon lit de malade. Vieux fou, j’y suis venu mourir, j’ai vécu. Endormi, dégoûté de tout, j’ai failli y passer. L’Archonte avait tissé sa toile avec malice. À ce jeu il excelle.

Et nous voilà ce soir. Sans te connaître, je t’attends.

 

 

L’homme et la mer

Charles Baudelaire

Homme libre, toujours tu chériras la mer!
La mer est ton miroir; tu contemples ton âme
Dans le déroulement infini de sa lame,
Et ton esprit n’est pas un gouffre moins amer.

Tu te plais à plonger au sein de ton image;
Tu l’embrasses des yeux et des bras, et ton cœur
Se distrait quelquefois de sa propre rumeur
Au bruit de cette plainte indomptable et sauvage.

Vous êtes tous les deux ténébreux et discrets:
Homme, nul n’a sondé le fond de tes abîmes;
Ô mer, nul ne connaît tes richesses intimes,
Tant vous êtes jaloux de garder vos secrets!

Et cependant voilà des siècles innombrables
Que vous vous combattez sans pitié ni remord,
Tellement vous aimez le carnage et la mort,
Ô lutteurs éternels, ô frères implacables!

 

 

L’homme de l’avenir est celui qui aura la mémoire la plus longue
Friedrich Nietzsche