Que composent-ils à Compostelle?

 

40 000, 50 000, certainement beaucoup plus encore, les chiffres montent comme la bourse ou les bénéfices des compagnies pétrolières. La fréquentation du chemin est une valeur en hausse rapide depuis 10 ans. Les petites haltes refleurissent, l’accueil rural se révèle de qualité et les arnaques minables recommencent. Les aventures de l’âme aussi.

 

Paris, Compostelle : 1500, 1600 km selon les itinéraires, deux mois, deux mois et demi pour un marcheur aux bottes de sept lieues (la lieue fait environ 4,5 km, donc 30 km/jour); la même chose pour le retour :

 

Un voyage de six mois!

C’est de porte à porte qu’il se fait. On part à pied de chez soi et on y revient à pied. Tout autre chose est de la marche thérapeutique ou récréative. Les départs du Puy en Velay, de Vézelay, de Saint Jean Pied-de-port, d’Arles, font éviter une partie de l’essentiel : être relié au coin de terre qu’on occupe et qui nous baigne de ses effluves. Les retours en avion ou trains sont bidons : c’est le retour qui permet la modification intérieure. Il n’y a plus de but et on retourne à 30 km/jour vers l’ordinaire, notre ordinaire. La modification intérieure est à ce prix.

Un pèlerin était parti de Fribourg en Suisse, avec un âne. Il s’était prévu les six mois syndicaux pour l’aller et le retour, ainsi que le budjet qui va avec. Il a eu beaucoup de succès avec son âne, de toute nature, alors, il a traîné un peu, beaucoup, trop. Il a mis six mois pour l’aller. Retour obligé en avion et vente de son âne, qui, entre temps, était devenu son ami. Il a pleuré abondamment ce beau gaillard de 35 ans, il a mis des mois et des mois à ne pas vraiment s’en remettre. On peut dire qu’il a reçu par « raccroc » le cadeau du pèlerinage et que l’adieu à l’âne qu’il a du faire est devenu l’adieu à l’âne en lui.

Tous ceux qui ont fait l’aller simple ont la même réaction : le sentiment du manque et de l’incomplétude. Tous ne reçoivent pas de véritable paquet-cadeau.

Le pire, ce sont ceux qui le font par petits bouts. Quinze jours entre Vézelay et Cahors, puis dix, six mois après, entre Cahors et Saint Jean Pied-de-port, puis à nouveau quinze jusqu’à Burgos et encore trente pour arriver à St Jacques. Quelques photos, et retour en avion. En suite, ils pontifient leur pèlerinage. Et même dans ces cas, le paquet-cadeau peut arriver. Ces cadeaux ne suivent qu’une règle : il faut acheter son billet. Peut-être connaissez-vous cette histoire.

 

Cohen et Yahweh

Cohen meurt à Jérusalem. Comme toute sa vie il a bien pratiqué, il arrive devant Yahveh.

Yahweh, Yahweh, tu me connais!
– Oui, Oui,
… tu connais ma famille,
– Oui, Oui,
… tu connais mon quartier,
– Oui, Oui,
… tu connais mes enfants!
– Oui, Oui,
Toute ma vie je t’ai prié pour que tu me fasse gagner au loto, toute ma vie !!!

Yahweh lève les yeux et les bras au ciel!
– Mais Cohen, si au moins tu avais acheté un billet!

Avec le pèlerinage, on achète son billet. Tous sont gagnants, des petits ou des gros lots, c’est le cœur qui mène la danse.

 

V.I.T.R.I.O.L

Visita Interiora Terrae, Rectificandoque Invenies Occultum Lapidem
« visite l’intérieur de la terre, et en te rectifiant tu trouveras la pierre cachée »

 

 

In Memoriam

Jean-Claude Flornoy est mort le 24 mai 2011. Son enterrement aura lieu le samedi 28 mai à 11h à Sainte-Suzanne (Mayenne).
À sa demande, une procession digne et sans trop de tristesse partira du Bateleur près de l’entrée du château. Le pèlerinage continue. (source)

Huit ans déjà que j’ai perdu cet ami d’enfance. Huit longues années sans nouvelle de mon benefactor.
Treize ans aujourd’hui. Je le vois en moi de temps en temps. Je l’aime encore. (juin 2024)

 

 Il faut être toujours ivre. Pour ne pas sentir l’horrible fardeau du temps qui brise vos épaules, il faut s’enivrer sans trêve. De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. Mais enivrez-vous !
Charles Baudelaire