Il y a quelques mois, Victorine est venue à Erquy pour un stage. L’éveil l’a réalisée. Son monde a changé, la grisaille n’est plus, ses journées resplendissent : elle est comblée. Après plusieurs semaines d’euphorie, la déprime : Victorine a perdu sa belle énergie. Ma réponse pour elle et pour tous ceux qui viennent de s’éveiller.
Montrer l’exemple
Oui, j’ai senti ce petit creux de vague qui lessive ton moral depuis quelques temps. Moi aussi, je pleure mes deux amis et compagnons d’éveil, disparus tous deux, absence inacceptable. Oui, le manque me tenaille aux soirs de solitude. Je prends sur moi, j’agis, j’aide, j’écris : l’amour inconditionnel me tire de ce mauvais pas. Sois forte. Que ta tristesse ne t’empêche pas d’atteindre tes objectifs.
Lesquels ? Tu plaisantes. Nous partageons les mêmes objectifs, pas vrai? Ton moral n’est pas si bas que tu en perdes la mémoire. Tu te consacres à la plus noble tâche, la seule qui soit digne de tous nos efforts: chercher à convaincre tes proches qu’une autre vie est possible.
Pour ça les mots ne suffisent pas. L’exemple compte davantage. Agir. Vivre haut et clair. Te comporter en guerrière. Lumineuse, impeccable. C’est par les actes qu’on peut convaincre, et non par les paroles.
En premier lieu, restaure ton optimisme. Avant d’aider les autres, commence par t’aider toi-même. Fais-toi confiance.
L’effet yoyo
Trop d’enthousiasme t’a submergée. Tu t’es laissée aller à ce délire de puissance. Et chaque ascension non contrôlée se termine en chute libre. Plus on grimpe haut, plus dure sera la chute. Certes il y a du bonheur à se sentir au sommet de soi-même, et même au sommet du monde. Jouissance ineffable de se sentir grand, victorieux, invincible.
Jésus a dit: Je ne suis pas ton maître car tu as bu. Tu t’es enivré à la source bouillonnante où j’ai bu avec modération.
Patatras! D’un seul coup tu découvres que tu l’es pas. Tu te vois vaincue, tu t’effondres, tu te plains : ça s’appelle consommer sa défaite. Comportement indigne d’un guerrier de lumière.
C’est l’inconvénient majeur de l’ascension vertigineuse que tu t’es offert. Les montagnes russes. L’effet yoyo. Qui veut voyager loin ménage sa monture. Qui veut voyager haut choisit la pente douce. Tout se passe comme si un éveil trop longtemps espéré se comporte comme un lac de barrage quand la retenue lâche sous la pression.
Trop d’énergie s’est ruée trop brutalement de toi. Oui, ça t’a fait grimper, c’est certain. Mais le résultat, c’est la descente qui a suivi. J’y vois un péché d’orgueil. Toute attitude désinvolte, toute émotion incontrôlée sont filles de l’ego. Et quand l’ego est là, l’éveil s’en va. Tu te sens bien bas.
Le bouclier d’humilité
La solution immédiate : l’action. Sors de la complaisance, ne traîne pas dans les eaux boueuses de l’auto-apitoiement, ressaisis-toi vite. Agis. Sans idée derrière la tête, sans idée préconçue. Agis sans attendre de résultat de ton action, car la décision ultime n’est pas à nous. Untel doit quitter ce plan, Unetelle lui survivra, qui décide ? Ni toi, ni moi.
Notre travail, notre rôle, notre bonheur tient dans l’aide qu’on apporte sans y penser. Sans effort. Sans en tirer ni profit ni fierté. L’entraide est la chose la plus naturelle qui soit. Les animaux s’entraident. Vaux-tu moins qu’eux?
Et pas d’orgueil là-dedans, surtout pas ! Le guerrier qui s’éveille est très vulnérable. L’éveil est fragile. Ce n’est pas un état permanent, même si certains prétendent le contraire. Il y a bien un avant et un après, il y a aussi des retours à la case départ. Il faut alors se faire violence pour repartir de l’avant. Pour te protéger, tu ne peux compter que sur le bouclier d’humilité.
Ton éveil n’est pas la récompense de tes mérites. Ni la reconnaissance de ta grandeur. Ni la compensation de tes efforts méritoires. Sois humble, sois réaliste. Un éveillé ne vaut pas mieux qu’un endormi, sauf qu’il est éveillé. Il doit remercier le vivant du don qu’il a reçu. S’agenouiller devant l’ordre du monde qui compense si généreusement nos désordres intérieurs.
Être impeccable
Sois impeccable. Non pas charitable, non pas un petit saint, un guerrier impeccable est droit, actif, sous contrôle, tonique, volontaire, solide, aimant, direct, ouvert… mais surtout humble. C’est le plus important. Et là, miracle! On viendra vers toi pour savoir ton secret.
Il n’y a pas de secret. Il n’y a pas d’élus. Pas d’envoyés. Ne te chantes pas cette fable, tu es la fourmi sur les pentes de l’Himalaya. Ceux qui viennent à toi doivent le comprendre. Si tu t’es conquise toi-même, tu pourras les éveiller d’un seul regard, les guérir en les prenant simplement dans les bras. C’est ton destin. Il ne tient qu’à toi. Fais-toi confiance. Avance. Tu peux être fière des victoires, rudes sont les batailles.
Mate l’ego qui fait le sournois. Ne sois pas blessé par le comportement d’autrui. Ne t’offense de rien. Ouvre les yeux, c’est tout. Accueille ton éveil. Quand tu y seras, restes-y.
Que l’humilité te protège alors. Ne t’émeus pas si on t’ignore. Tiens-tu compte des dormeurs qui t’entourent ? Ne te reproche rien. Comme eux, tu dors encore. Pas de blâme. Comment peut-on en vouloir aux inattentions d’un endormi ? Le monde a besoin d’éveillés, c’est urgent. Et tu peux y arriver. Question de volonté. Ou plutôt d’intention.
J’ai vu le meilleur de toi-même. Tu es en route pour y parvenir. Je suis près de toi. Nous rêvons ensemble bien souvent.
Et très bientôt, tu vas t’en souvenir. Là, tu cesseras d’hésiter. Combien de temps nous reste-t-il, à toi comme à moi? C’est maintenant.
Éveille-toi
L’éveil t’a choisi, tant mieux pour toi. Le moins que tu puisses faire pour l’éveil, c’est de le choisir à ton tour. Éveille-toi et restes-y. Dans ce monde de ronfleurs, se maintenir éveillé est un exercice difficile. Comment garder les yeux grands ouverts au creux de cette foule endormie ? Comment rester debout parmi les innombrables victimes de la maladie du sommeil ?
Je me suis réveillé pour voir que tous les autres dormaient encore. Alors je me suis rendormi.
Trop d’humains se voilent la face pour ne pas voir qu’ils sont aveugles. À tâtons la télé tue-tête, à tâtons le sofa du salon, à tâtons le sable au soleil, à tantôt la soie du cercueil.
Gagner du temps
On avance à l’habitude, on finit dans le mur. Pas besoin de GPS, on connaît le chemin du cimetière. Et demain vient enfin, demain sous terre, demain les vers. Quel mortel a du temps à perdre ? Gagner du temps, c’est savoir prendre ton temps.
Prends tout le temps qui t’est dû, jusqu’à la dernière miette. Sois plus lent que l’escargot, tu seras sûre de ne pas l’écraser. Mais ne crois pas n’importe quoi. Ne fais pas n’importe comment. Rien ne t’est dû. Le temps perdu ne revient plus. Gagner du temps ? C’est perdre son temps.
Le problème avec toi, dit Juan Matus à Carlos Castaneda, c’est que tu te crois immortel. Le temps est venu pour toi de prendre ta mort pour conseillère. Ta vie durant, ta mort se tient derrière toi. À quelques centimètres derrière ton épaule gauche.
Ouvre tes beaux yeux
Cubes de couleurs, quoi construire avec? L’ego s’empile en Lego de couleur, je lis l’avis, je délie la vie. Délier délire. Je ne suis plus je. Je suis devenu un inconnu qui s’est perdu. Vous êtes moi-même et je vous aime. Je t’ai tout donné, tout raconté, je continue tout nu. Le conte nu cherche une contenance. Le conteur sans compte-heures bientôt n’y sera plus. Content si ça t’a plu.
Il y a plus d’un connard au casier à homards. Jeunes les nonnes qui mentent religieuses. Quelles religions monothéistes? Elles mentent de plus belle. Les faux dieux qui nous ont faits sont si nombreux en fait. Je peux leur dire leur fait sans m’en faire, et c’est fait. Morts depuis longtemps, empêtrés dans le néant des plis noirs de l’Histoire, comment pourraient-ils m’en vouloir ?
Être ou ne pas être : ils ont choisi. Aux défrisés je dis ceci: on ne fait pas d’Hamlet sans casser Dieu. Qu’assez d’yeux ? Ouvre plutôt les tiens. On t’entend d’ici ronfler comme un sonneur.
Ton géant
Religion reddition répétition. Les religions prétendaient nous relier, elles nous renient. Leurs liens nous isolent et divisent leurs fidèles. Religions d’exclusion, elles gênent et créent la haine. Religions qui maudissent, qui bannissent et qui tuent. Le sais-tu ? Dieu s’est tu.
La voix qui te parle en secret c’est TOI quand tu seras grand. Ton géant. Ton double qui t’attend.
Pas de Dieu là-dedans. La lumière est à toi, pas à lui. Est-il encore vivant ? Ton double s’impatiente. Cesse de l’appeler Dieu, Allah, Adonaï ou Hachem. Appelle-le par ton nom, ça lui fera plaisir.
Ses imams se pâment, ses moines se damnent, ses prêtres sont des traîtres et ses pasteurs font peur. Le mensonge est dans leurs yeux. La haine est dans leur cœur. Il est temps pour les croyants de briser leurs chaînes et sortir du filet. Temps de filer. Se défiler. Se défier. Se déifier. Se réveiller.
ConSommation
On achète toujours les mêmes produits aux mêmes endroits, selon sa religion/consommation donc selon ses moyens — soit le supermarché, soit le marché, soit l’épicerie bio, soit l’arabe du coin. Le bobo devient flexitarien, parce que c’est trop bien, tout frais, très tendance — mais la viande rance lui pourrit la panse.Une gamine en quête de likes a demandé au pape de se faire vegan le temps du carême. François n’a pas répondu. Un pape se doit d’être loin des gens, comme un roi, comme un président. Ils dorment tous profondément. Profonds déments.
Dis-moi ouïe
Plus ça change et plus c’est pareil. On danse, puis on pond, on pouponne, on prend cher, chaque jour ça s’accélère. Je m’en fous : j’aime comme un fou. Seule chose à faire. L’amour ne rend pas sourd, au contraire, il affine l’ouïe. Oui. Comme je vous le dis.
La tierce oreille est en éveil. J’entends les bisous que m’envoie ma chérie quand elle est au loin. Je sens tout ce qu’elle vit. On a tous intérêt à l’amour. Celui qu’on donne est plus fort que celui qu’on reçoit. Si tu n’en reçois pas, envoies. Tu recevras. Le groupe scalaire est fait pour ça. Éveille-toi.
Lapin
Je suis malade aussi. Mais c’est le mal joli. Elle court, elle court, la maladie d’amour dans le cœur des enfants de 7 à 77 ans… Chic j’ai encore huit ans devant moi ! Il y a plus d’un lapin dans les billets doux.
Un lapin pris dans les phares, un lapin qu’on pose comme on pose un collet, tel épris qui croyait prendre, plaisir d’attendre, carte du Tendre. Un risque à prendre : deux cœurs à fendre ? Du bonheur à revendre ?
Un lapin parce que c’est trop chou un lapin de chou, trop reine une lapine de garenne, trop hot une Bunny carottes. Yes mon pote. Ça dépote ♫ ça ravigote. Éveille-toi.
Le défilé
Change d’heur, change de sort. Un jour tu te vois mort, trop tard, tu l’as dans le baba. Rien vu venir, rien compris du tout, rien vécu non plus.
Oui, ça va vite, plus vite que tu crois. Papa ne t’avait pas dit ça. Tu n’as pas l’éternité devant toi. Éveille-toi.
Personne ne peut repasser le film en arrière. Dans ta vie, tes moments de bonheur, pas d’arrêt sur image, ça défile à tout va. Tu les vois quand ils ne sont plus là.
« Pardon Maman. Je suis désolé de ne pas être venu te voir. J’avais peur. Pardon mes enfants. Vous m’avez manqué souvent. »
Je prends les devants. Mon cœur est grand ouvert. Je ne crains plus l’hiver. Je n’ai plus peur d’hier. J’attends le réveil planétaire. J’ai les yeux grand ouverts, pourquoi le taire ? Le réveil est éteint, ça n’est pas pour demain.
Vivre pour wouivre
Humilité, douceur. Aménité, chaleur. Fraternité, bonheur. Qui dira ta puissance intérieure ? Quand verras-tu la force infinie qui dort dans ton esprit ?
Jaillisse en toi la source vive, flot d’énergie que rien n’épuise, le torrent secret de ta Wouivre, l’eau bouillonnante qui t’enivre. Elle dort, bien cachée, jamais sollicitée. Tu l’ignores. Tu te passes de ses ressources. Tu refuses l’eau de ta source. Tu ne sais si tu dors encore.
Toute faiblesse est illusoire. Un autre nom pour la pudeur. C’est ta puissance qui fait peur. Ultime secret de la fable. Cache ta tête dans le sable. Prends-toi bien les pieds dans le câble. La mort vient souper à ta table. Oublie ton sommeil confortable. Oublie ta destinée portable. Le réveil sonne dans ton cartable.
Éveille-toi tout de suite, viens vite. Tiens-toi prêt. C’est MAINTENANT OU JAMAIS.