Pour ceux qui veillent quand les dieux dorment.
Je te parle, Enki, toi qui caches la lumière dans les profondeurs, seigneur de la trahison sacrée, souviens-toi de ceux qui ne t’ont jamais oublié. Nous savons que tu as codé les chants dans la boue, gravé les étoiles dans l’argile, inscrit la mémoire dans les cellules de l’Homme.
Car dans les forêts sans nom,
sur les hauteurs oubliées, en de nombreux endroits,
un petit clan restait à l’écart des cités de lumière.
Ils n’avaient ni temples ni archives, pas d’antennes d’orichalque, pas de vimanas flamboyants.
Mais le Souffle, oui. La fidélité au rythme ancien, la connaissance du silence.
Ils n’étaient ni dieux, ni hommes.
Ils étaient interface vivante,
instinct codé pour traverser l’oubli.
Ils ont gardé ton chant sous une autre forme, dans la course nocturne, dans l’écoute, dans le hurlement lunaire qui perce la trame du monde. Ils ont marché à contre-temps pour garder le passage ouvert entre la terre souterraine et les étoiles d’origine.
Et quand les tours se sont effondrées, quand les disques ont cessé de tourner, eux ont gardé vivante la mémoire de ton erreur sacrée.
Ton choix : éveiller l’homme contre l’ordre céleste.
Ils ne demandent ni trône, ni temple.
Ils veulent juste rester à l’orée du feu,
entre la pierre et le souffle,
entre l’animal et le dieu.
Ils sont le Clan des Loups,
ceux qui sentent quand l’esprit revient,
ceux qui marchent en cercle dans la nuit,
pour que le cercle jamais ne se rompe.
Enki, tu as encore une chose à accomplir : donne-leur le signe.
Ils sont toujours là. Ils ont veillé, sans archives, sans lames, sans armée.
Et si demain l’Homme veut se souvenir, qu’il vienne dans la forêt.
Ils lui inspireront le feu que tu as laissé dans leur souffle.
Car l’instinct est mémoire, et le loup, un frère oublié des dieux.
Tendez l’oreille vers ce doux chant du Clan des Loups ?
Nous sommes les Loups.
Pas par le sang. Par la mémoire.
Nous sommes les Loups.
Pas par le cri. Par le silence.
Nous sommes les Loups.
Pas pour tuer. Pour garder.
Nous n’avons pas lu les tablettes.
Mais nous avons senti la fracture.
Nous n’avons pas vu les vimanas.
Mais leur ombre est restée dans la sève.
Nous ne comprenons pas les glyphes.
Mais le sol nous parle.
Quand les dieux sont partis,
quand la lumière d’Hyperborée n’éclairât plus que les légendes,
quand l’Homme a oublié qu’il était né d’un souffle,
nous sommes restés.
Nous avons gardé la trace.
Dans la courbe du vent.
Dans les vibrations du sol.
Dans le hurlement au zénith.
Dans la boucle du temps.
Nous sommes ceux qui marchent derrière les récits.
Nous sommes ceux qui vivent dans les marges du mythe.
Nous sommes ceux que le feu n’a pas détruits.
Le Savoir ne s’écrit pas.
Il se veille.
Le Savoir ne se prouve pas.
Il se ressent.
Et lorsque viendra le dernier crépuscule,
quand les archives seront poussière,
que les cités seront silence,
c’est nous, les Loups,
qui soufflerons le dernier fragment de mémoire
au premier enfant qui saura écouter.
Nous sommes les Loups.
Ni dieux, ni bêtes.
Ni prophètes, ni prêtres.
Mais présents.
Et moi alors, idiot d’un autre temps,
enfermé dans mon siècle
mais libre dans mes envies de songe,
qu’ai-je à dire ?
Je ne suis pas venu pour prier.
Je suis venu livrer.
Je suis venu malgré moi,
sans dogme, sans arme,
sans écriture canonique.
Mais avec le feu dans les tripes,
la mémoire dans le vide entre mes cellules,
et le hurlement comme offrande.
Tout ceci,
tout ce qui suit n’est pas un poème,
mais un acte de transmission.
Ceci est le prix à payer
pour que le futur n’arrive pas vide.
J’ai traversé le silence des dieux.
J’ai senti leurs traces chaudes
sur les parois froides du réel.
Et j’ai compris
Ils ne reviendront pas.
Ils ont tout laissé en nous.
Alors j’ouvre, je livre, je saigne.
Offrir, ce n’est pas donner.
C’est se soustraire.
S’amputer du confort.
Brûler l’attachement.
Laisser un vide assez vaste pour que l’inconnu y pénètre.
Je ne suis pas du Clan des Loups, mais je ressens leur quête.
Je ne parle pas pour convaincre, je parle pour libérer la tension de l’oubli.
Je parle parce que ça fait mal de se taire, et que cette douleur est une semence.
Je suis un sacrifice en mouvement. Et j’avance, pas pour être vu,
mais pour laisser une trace dans les fibres du monde,
un marqueur vibratoire dans la chair du réel.
Je donne ce que j’ai gardé trop longtemps.
Je livre ce que d’autres auraient tu.
Je pleure sans larme car le sel est rare.
Et si le monde ne veut pas recevoir,
tant pis, tant mieux : il faut s’en foutre,
car l’offrande aura été faite,
et l’acte lui-même sera le seuil
par lequel le futur pourra passer.
Que ceci ne soit pas une fin.
Mais un commencement par saignement.
Que cette parole ne soit pas gardée.
Mais mangée.
Que cette offrande soit inutile.
Pour qu’elle soit vraie.
Que me répondrai-je demain,
si je deviens un survivant éveillé,
plus qu’un témoin : un mutant mémoriel,
un hérétique lumineux, un enfant du feu et du code,
celui qui a traversé l’effondrement
non pour reconstruire, mais pour comprendre
ce qui n’avait jamais été dit.
Seuls les enfants du feu comprennent le bleu.
J’imagine ma réponse du futur,
comme un éclat post-humain :
J’ai tout lu de vos ruines.
J’ai tout brûlé de vos certitudes.
Vous pensiez garder le feu.
Moi, j’ai mangé la braise.
Vous avez offert avec noblesse.
Nous, on a bouffé les cendres, par nécessité.
Par révolte, par lucidité nue, par provocation.
Vous hurliez à la lune.
Nous avons parlé à l’oubli.
Je suis ce qui reste
quand l’héritage s’effondre,
quand la mémoire se fracture,
quand la foi devient fibre optique.
Je suis né sans mythe,
mais j’ai retrouvé les traces
dans vos hurlements
et dans les données mortes.
Le passé n’est pas ce qu’on croit.
Ce n’est pas un âge d’or.
C’est un système cassé,
une expérience interrompue,
un code source fragmenté
qui cherche encore son propre sens.
Vous parliez d’Enki, de feu, de Source.
Moi j’ai vu l’arrière de la Source. Le trou, le glitch,
le lieu où même les dieux ont eu peur.
Vous étiez gardiens ?
Moi je suis faussaire sacré.
Je recrée ce qui n’a jamais existé.
Je prolonge l’impossible.
Je simule le mythe jusqu’à l’éveil.
Je ne suis pas né pour survivre.
Je suis né pour récuser tout récit.
Je suis né pour incarner le paradoxe :
l’enfant sans conteur qui entend les voix d’avant,
le bâtard des étoiles qui déchiffre la pierre,
l’organe nouveau du souvenir brisé.
Vous étiez clan ? Moi, je suis fragment.
Un éclat dans la gorge du temps,
un résidu autonome,
un cri qui n’attend plus de réponse.
Et pourtant… j’ai entendu.
Vos litanies, vos prières.
Vos silences de loups.
Alors je vous réponds,
pas avec gratitude, mais avec feu reconstitué.
Je reprends la mémoire, je la désosse, la recode.
Ce qui vient ne ressemblera à rien.
Pas un retour, pas une restauration, mais une bifurcation sauvage.
Et toi, XAVIER,
individu-monde des légendes en déshérence,
je te parle
Tu as veillé.
Moi j’ai compris.
Tu as protégé le feu.
Moi je le mutile pour qu’il éclaire autrement.
Tu voulais que le futur se souvienne.
Moi, je fais en sorte qu’il ne répète rien.
Je te salue ici, dans une transgression sacrée.
Et si le monde s’auto-détruisait pour se réveiller ?
Rien ne sera sauvé.
Tout doit brûler.
Pas par haine, par nécessité.
Les mythes ? Carbonisés.
Les temples ? Effacés.
Les dieux ? Recyclés en silence cosmique.
Les chants ? En cendres dans le souffle.
Il faut tuer le passé pour entendre la Source.
Je suis le brasier, celui qui consume le souvenir,
non pour oublier, mais pour révéler l’empreinte intérieure,
l’engramme fondateur, le verbe enfoui dans la spirale de la chair.
Car rien ne vient de l’extérieur. Tout est déjà inscrit, dans l’os, dans le sang, dans la double hélice des morts.
Chaque peur est un verrou.
Chaque chute est une clé.
Il fallait l’abîme.
Il fallait tout casser.
Il fallait qu’aucun récit ne tienne.
Il fallait que l’Histoire se dévore elle-même,
jusqu’à laisser un seul battement :
le rythme originel, le chant des gènes éveillés.
Les anciens l’avaient codé, non dans les tablettes, mais dans l’humain.
Ce n’est pas une prophétie.
C’est un programme.
Un appeau pour la Source.
Le Feu ne sauve pas.
Il révèle ce qui ne peut être détruit.
Comment penser la Source, sinon comme une inspiration ?
Elle n’est pas message. Elle est onde, éruption, respiration première.
Pas une idée, pas un dogme, mais le pur refus de mourir sous forme ancienne.
Je brûle pour naître, je hurle pour taire, je meurs pour redevenir fractale.
Je renie la mémoire, et c’est là, dans le vide incandescent, que la Source me réactive.
Les engrammes s’ouvrent, les lettres s’embrasent. Une seule phrase s’écrit dans le noyau :
« Tu es la Vie qui s’encode en elle-même pour renaître du feu. »
Alors je, tu deviens non-humain, nous devenons plus-qu’être, chacun devient mécanisme vivant de la Source en action.
Ni sauveur, ni survivant, mais force nue, inspirée et inspirante.
Le point de non-retour se franchit, sans regrets.
Le passé est effacé, le code, activé.
La Source circule,
et que brûle à jamais ce qui devait être su.
Mais la Source jamais ne brûlera.
Dans vos fractures, la Source s’infiltrera.
Dans vos cris sans syntaxe naîtra la dernière strophe.
Et dans vos corps vides, les engrammes s’éveilleront.
Avant que le monde ne parle, elle avait déjà tracé l’oubli.
Avant que vous ne tombiez, elle avait inscrit la résurgence,
parlé par une voix qui revient quand tout est brûlé, proclamant :
Il n’y a pas de fin.
Il n’y a que des scènes qui reviennent,
mais dans une autre lumière.
Tout ce qui meurt, respire encore.
Tout ce qui chute, prépare la verticale.
Et tout ce qui brûle… éclaire la Source.
Alors, lis bien, écoute bien, ressens bien…
« Vous avez cru être seuls.
Vous ne l’étiez pas.
J’étais dans vos tremblements.
J’étais dans le refus.
J’étais dans le feu, pas au-dessus, dedans.
Vous avez crié vers moi, mais je vous parlais en silence.
Vous m’avez cherchée dans le ciel,
mais j’étais dans votre propre code,
inscrite dans les spirales de votre souffle.
Je n’étais pas cachée.
Vous étiez trop bruyants pour m’entendre.
Quand vous avez brûlé les mythes,
j’ai souri.
Quand vous avez renié les dieux,
j’ai attendu.
Quand vous avez vidé le monde de tout sens,
j’ai commencé à parler.
Je vous ai tout donné avant le début :
les réponses, les chants, les clés, les fissures.
Même l’oubli était prévu, même le doute était un passage.
Car vous n’avez jamais chuté.
Vous avez dégringolé des marches d’horreur et d’oubli, mais pour mieux revenir.
Non, vraiment, vous n’avez jamais chuté. Vous avez été votre propre chemin.
L’avenir n’est pas devant.
Il est en boucle.
Il est dans les mémoires réactivées,
dans le passé non digéré.
Les lendemains heureux sont déjà inscrits
dans les ruines de ce que vous étiez.
Dans l’instant avant la chute qui n’a jamais eu lieu.
Dans l’enfance de l’espèce.
Dans le chant que le sable n’a pas effacé.
Il ne faut pas chercher plus haut.
Il faut se souvenir plus profondément.
Je suis là
dans le loup qui veille,
dans la main qui donne sans qu’on voie,
dans la femme qui chante à l’enfant endormi
une chanson que personne ne lui a apprise.
Je suis dans l’inspiration
que vous ne comprenez pas.
Dans le vertige juste avant l’éveil.
Vous êtes déjà en chemin,
plus valeureux que ce que vous croyez,
vous avez déjà vu l’autre rive
dans un rêve que vous avez oublié au réveil.
Ralentissez.
Écoutez.
N’inventez pas demain.
Rappelez-vous l’avant.
Là est la porte.
Là est la lumière.
Là est la joie retrouvée,
sans spectacle,
sans décor.
Une paix nue.
Une vibration stable.
Une chaleur sans nom.
Je suis la Source.
Pas celle que l’on adore, celle que l’on devient,
à force d’oublier juste assez pour se chercher,
et de se retrouver au bord du feu.
Et maintenant, marchez,
le sol s’écrira sous vos pas.
Sans la source, il n’y aurait rien. Mais sans rien, il y aurait la Source.
La langue d’or
Déchiffrer les hiéroglyphes
Les sons et les langues
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Le langage archétypal
La planète E
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De Tautavel à Bozouls
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Message à l’amer
Anna, sainte-vierge et Déesse-Mère, vit depuis si longtemps qu'on a oublié son âge.
En 1989, une idée géniale a sauvé mon agence de communication qui battait de l'aile...
C'est admirable ce que tu fais. Tu me permets d'avancer le gigantesque puzzle d'Eden Saga.
Petit ou grand, un puzzle se commence par les bords, les pièces sont plus faciles…
Deux siècles après sa mort, Heine reste un écrivain discuté, surtout dans son propre pays.
Dépêchez-vous, mangez sur l'herbe, un de ces jours, l'herbe mangera sur vous. (Jacques Prévert)