Pour Sumer, le monde commence par une rencontre, celle de l’eau douce et de l’eau salée. Abzu, l’océan primordial d’eau douce, est de sexe masculin. Il s’unit à une sorte de dragon femelle, Tiamat, l’eau salée.

De leur union naîtront tous les astres et toutes les planètes. Un troisième personnage, présent dès l’origine, est Moummou, ou Mercure. Cette genèse étrange a toujours été comprise comme une figuration animiste. Un songe creux. Un mythe. or il y a mythe et mythe… L’encyclopédie assyrienne nous donne la version originale de la Genèse. Près de cent tablettes d’argile racontent la création du monde et de l’homme selon Sumer. Si les dieux volants ont fait l’homme, c’est pour qu’il travaille à leur place.

Les mythes antiques, les vieilles légendes sont à l’opposé du sens actuel. Contrairement aux affabulations des mythomanes, les mythes antiques sont le testament des Dieux un témoignage concordant à travers le monde, aux accents troublants, inédits. Selon moi, comme pour tous les mythologues, ces récits méritent d’être pris au sérieux car ils nous décrivent l’histoire d’avant l’histoire.

Revenons à Moummou, Tiamat et Abzu. L’intéressant mélange de l’eau douce et de l’eau salée révèle la portée du message. On notera que l’eau salée représente l’élément feu, à travers l’image du dragon. On notera enfin la présence du Mercure. S’agirait-il de notions scientifiques déguisées ? On ne peut s’empêcher de le penser, en effet. Selon nos astrophysiciens, la soupe primitive dont tout est issu provient de ce mélange eau douce/salée, ou eau/feu.

 

Et que dire du Mercure, inactif mais indispensable à la fusion des deux éléments ? Illustrant la notion physique de catalyseur, il est l’élément sans lequel les transferts de particules ne pourraient s’effectuer. L’argile jouera le même rôle dans la création de l’homme. On a donc affaire à un condensé de connaissances antérieures, physiques et chimiques, sous une forme accessible aux demeurés que nos ancêtres étaient devenus. Les Sumériens auraient-ils pu comprendre la version sans image ? On en doutera. Une chose est sûre : les peuples qui ont suivi étaient encore plus bêtes.

 

« Ros uri sal », dit la vieille devise alchimique. « La rosée brûle le sel », voilà la première étape du grand-oeuvre alchimique.Avis aux germanistes : un grand ouvrage alchimique en téléchargement gratuit ici La rosée, c’est à dire l’eau douce. « Béni soit celui qui comprend pourquoi il travaille le sel. »

Et le mercure, lui aussi, joue un rôle central dans le processus alchimique. Cette prime genèse serait-elle la description d’une opération de « chymie céleste » ? C’est fort probable. On sait que la science des anciens accordait autant d’importance à l’alchimie qu’à la chimie, à l ‘astrologie qu’à l’astronomie, à la numérologie qu’à l’arithmétique.

 

 

La distinction entre science et magieOu superstition, ou obscurantisme, ou charlatanisme, tels sont les noms péjoratifs qu’on lui décerne est récente ; elle repose sur un malentendu. Au fil des âges, l’homme a perdu l’usage de son cerveau droit, le « côté gauche » des naguals. L’aspect magique de la réalité s’est occulté à mesure que se renforçait le diktat du « côté droit », qui devient avec Descartes un excès rationaliste. Seul Nietzsche a dénoncé  l’impasse où s ‘engageait l’occident. Sa vision de la Grèce antique écartelée entre Nemesis et Hubris, Règle et Ivresse, Apollinien et Dyonisiaque, ouvre les têtes et les coeurs.

 

La mythologie grecque se prête aussi bien à une lecture alchimique : Cronos dévore tous les enfants que lui donne sa femme Rhéa. Mais, lorsque Zeus est sur le point de naître, Rhéa veut lui éviter le sort de ses frères et, prenant une pierre, elle l´offre à Cronos qui croit avaler son fils et Zeus est sauvé.

Plus tard, Zeus, par ruse, fait absorber une drogue à son père Cronos et celui-ci vomit les enfants qu´il a dévorés. Cette abominable légende n’est pas aussi honteuse qu’il y paraît, pour peu qu’on en fasse une lecture alchimique.

 

Il suffit de transposer les noms : Cronos (Saturne = plomb) absorbe un métal de même apparence que son fils Zeus (Jupiter = étain) et ce métal est un vomitif très puissant, l’antimoine ou Agarhos appelé aussi pierre d´Abaddir.

Un autre chapitre de cette genèse selon Sumer n’est pas moins intéressant, où l’on apprend comment les dieux Anounnaki, fatigués de se taper tout le boulot, décident de créér un travailleur primitif.

Ainsi naîtra l’Homo sapiens : vous et moi, chers amis. L’homme… et surtout la femme.

 

Xavier Séguin

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