Attaques psychiques

 

L’expression est de Jean-Claude Flornoy, mon benefactor. Il s’en est servi deux ou trois fois sans que j’ose poser la question. Il en parlait comme d’une évidence, je n’ai pas voulu avoir l’air d’une cloche. J’en étais une, il l’a bien vu. Un jour, je me suis décidé à lui demander. Il n’attendait que ça!

 

Le complexe universitaire

Il a rigolé de son rire silencieux, m’a fait un clin d’œil, hoché la tête, et pris la pose du prof qui sait tout. S’il ne savait pas tout, il en savait beaucoup. Vingt ans avant, j’avais quitté un petit con qui marchait dans la vie à tâtons. Coincé, nigaud, sans horizon, sans diplôme. Et là, à ma grande stupeur, je suis tombé sur un mastard, tranquille et sûr de lui.

De plus, il était expert dans des domaines dont j’avais à peine entendu parler dans des polars amerlauds. L’exocet psychique, sa pratique et ses risques, rien de tout ça ne figurait au programme de psycho ou de philo à Nanterre la rouge, la fac bien pourrie au beau milieu d’un terrain vague, très très vague, desservie par le métro parisien, gare de La Folie (sic) sous-titrée Complexe Universitaire. Les universitaires ont une tapée de complexes, mais la folie n’en fait pas partie. C’est juste la norme.

Nous cherchons tous quelque chose. Et la folie est le moyen le plus rapide de l’obtenir.

Torcuato Luca de Tena

 

Flornoy a usé son jean sur les chaises en tube vert pendant une courte année: il a tout laissé en plan pour se barrer en Allemagne. Deux ans de service militaire dans l’armée française d’occupation. C’est tout ce que je savais. Aucune nouvelle de lui jusqu’à ce matin.

 

Tourisme et poterie

Je venais de monter Écho-Vision, une agence de communication par la BD. Pour lancer ma boîte, j’avais imaginé des cartes postales à suivre. Il fallait trouver quatre clients pour les quatre premières pochettes de cartes. Une pour Écho-Vision, deux pour les boîtes de mes associés, restait une dernière à placer. Mon vieux pote Devic me parle de Flornoy, qui se lance lui aussi dans le business. Secteur touristique. Une flotte de pénichettes sur la Mayenne, où il possède un domaine de plusieurs hectares, avec deux barrages et trois turbines pour revendre l’électricité à EdF. Bon plan, j’ai apprécié.

-Tu fais dans le tourisme, décidément, je lui dis. 
-Décidément??
-Ben oui, après Nanterre. Huit mois de fac, c’est du tourisme.
Son visage s’est fermé.

-Très drôle. En fait je suis potier.

 

 

Rochefort

Potier!! Moi l’intello parisien, je découvrais un manuel rural, d’où ses pognes du double des miennes. Hydraulicien, électricien, potier, bâtisseur, jardinier, bûcheron, Flornoy est homme à tout faire au domaine de Rochefort qui exige de gros bras. Je n’en ai pas. Pour lui donner un coup de pub, pour un logo, pour lancer son affaire, aucun problème. Il a eu ses cartes et son image de marque, on s’est revu plusieurs fois. Sa carrure physique et morale me fascinait.

Les quatre années suivantes ont fait de moi le principal groupie de mon benefactor. Tandis que je collectionnais les facs et les maîtrises, il avait appris et pratiqué les seules choses dont j’ignorais tout, et qui me passionnaient.

 

Un paquet d’ondes

De nombreuses entités invisibles rôdent autour de nous. Elles cherchent à capter une partie de notre énergie qui leur est précieuse. Pour parvenir à leurs fins, elles utilisent des armes puissantes : la séduction, la duplicité, l’empathie simulée, la fausse bienveillance, la force de conviction, la peur, l’angoisse… Des entités bien visibles peuvent faire de même.

Les sorciers envoient des sorts, d’où leur nom. Les guérisseurs peuvent faire de même. C’est un paquet d’énergie dont l’envoi est soigneusement ciblé. On peut utiliser un objet appartenant au sujet visé, c’est la vieille école. Je me contente de mettre mon intention en place, c’est plus simple et très efficace. Les sorciers noirs envoient une énergie destructrice, une attaque psi que Flornoy a baptisé exocet.

Les guérisseurs sont des sorciers eux aussi. Des sorciers blancs. Quand ils utilisent les ondes scalaires pour guérir à distance, ils font appel sans le savoir à la même technique. Il y a envoi d’un paquet d’ondes guérisseuses vers un sujet ciblé.

Ces ondes sont positives, elles visent à l’amélioration d’une personne, pourtant il arrive que cette personne refuse consciemment cet envoi d’ondes. En cas de retour à l’envoyeur, la polarité devient négative, l’onde de retour est toujours destructive et son intensité est multipliée par dix. Ainsi le retour d’ondes devient redoutable quand la personne ciblée les renvoie.

Dans le cas d’envoi d’ondes négatives, le retour reste négatif avec une intensité dix fois supérieure. Un retour d’ondes négatives peut tuer. Les sorciers noirs font un métier dangereux.

 

 

Guerre de sorciers

Dans les années 90, pour je ne ne sais quelle raison, Flornoy s’est embrouillé avec un vieux grincheux. Un sorcier comme lui, mais tendance malfaisante. Une espèce de druide qui appartenait au Clan du Sanglier tandis que Flornoy était du Clan du Loup. Grosse différence!

Ils se sont fâchés grave, la guéguerre de sorciers s’est mise en route. Jean-Claude a reçu deux mini-cercueils dans des boîtes à chaussures. Il les a brûlé aussitôt. Furieux, il a envoyé un de ses alliés pour terrifier le sanglier.

L’allié en question, l’homme dragon, a disparu purement et simplement. En retour, Flornoy a reçu une claque subtile qui a failli le tuer. Il a gardé le lit pendant huit jours, et la chambre pendant plus d’un mois. Il a pris vingt ans. Ses tempes ont blanchi en une nuit. Son teint était gris verdâtre. Il avait des écailles sur la peau des joues.

Deux bons mois plus tard, il a retrouvé sa forme. Un début de forme, au moins. Le choc avait été d’une telle violence! Je n’en revenais pas. « Ce salopard ne m’a pas loupé, tu vois. Il m’a balancé un exocet psychique dans la face. J’ai morflé. »

 

Missile psychique

Cette fois, je me lance.

– Encore cet histoire d’exocet ?
– Oui, comme le bon vieil exocet qui a coulé l’anglais pendant la guerre des Malouines. Les Anglais ont eu chaud aux fesses, mais ils ont fini par gagner ce bout du monde, trois tas de cailloux couverts de guano et de crottes de moutons. Les Argentins leur ont laissé l’archipel de merde, perdu au fin fond de l’Atlantique sud. Du coup les Malouines sont devenues les Falklands. Tout ça pour un exocet. Un missile mortel de fabrication française, cocorico. Mon sanglier m’a envoyé la version psychique. Elle fait autant de dégâts, tu as vu ça. C’est un retour à l’envoyeur.
– C’est toi qui as commencé ?
– On peut dire ça. Je lui ai envoyé l’homme dragon. J’ignore ce qu’il est devenu, mais il n’est plus dans ma gourde.

Du Flornoy tout craché. Il portait à sa ceinture une gourde, non pas le récipient des randonneurs, mais la coque du fruit tropical.voir ci-dessous Dans cette gourde sommeillaient des entités venues d’ailleurs, noires comme une nuit sans lune : les alliés de Flornoy. En cas de besoin, il en lâchait un. Comment? Par l’intention. Par où? La gourde en question n’avait pas d’ouverture. En temps normal, sa ceinture ne portait rien. La gourde se matérialisait seulement en cas d’urgence.

Il vaut mieux trimballer tes alliés dans une gourde, comme les djinns dans leur lampe à huile. Sinon ils s’installent dans ton corps, et c’est beaucoup plus chiant pour t’en débarrasser.

 

Langue des Oisons

Flornoy voulait imposer ce terme : oison, petit de l’oie, à la place d’oiseau dans la belle expression langue des oisons. J’exauce son vœu. Et à propos d’exaucer, j’ajouterai que exocet est un très proche parent en langue des oisons. L’exocet permet d’exaucer les vœux agressifs. On peut aussi le lire hors-jeu dans cette même langue : exo set. Hors du set, hors de la partie.

 

 

Protégé

On n’a jamais besoin de passer au-dessus de quelqu’un pour réaliser ses rêves, m’a dit Marquinhos. C’est aussi mon avis. Je n’ai jamais goûté le bras de fer avec quiconque. Encore moins avec un sorcier noir. Je n’en ai jamais eu besoin.

Les bouffées de haine ou les colères noires me passent autour, épargnant ma maison et son jardin, comme les tempêtes d’hiver qui n’ont jamais fait de dégâts ici depuis 1953. Sauf cette année… Il semble que j’ai toujours été protégé des émanations négatives. Je ne sais ni par qui ni pourquoi.

Mais il n’en va pas de même pour la majorité des gens. Les guérisseurs ou les sensitifs, les êtres doués d’une perception subtile supérieure à la moyenne, peuvent se trouver confrontés à ce genre de saloperie sans l’avoir cherché. Le plus souvent ils n’y croient pas, heureux mortels! Jusqu’au jour où ça leur arrive.

Dès qu’ils morflent, ils demandent à Google qui les orientent sur Eden Saga, un des seuls sites qui a le culot d’appeler un chat un chat et un sortilège par son nom breton: geis. Je vous parle d’expérience, c’est mon vécu que je vous livre. Plus facile à comprendre que ceux qui en parlent par ouï-dire.

 

Geis

Ce faisant, mon immunité touche à sa fin. Je déplais à certaines entités qui voient d’un mauvais œil mes efforts réitérés pour dénouer leurs geis, des sortilèges jetés sur une ou plusieurs personnes, parfois toute une famille, et qui peuvent se perpétuer sur plusieurs générations.

Le mot geis ne figure pas dans les dictionnaires breton-français, pourtant il est employé par les familles qui en sont victimes. D’après Preder Henoal, geis est un mot irlandais qui signifie un sort ou une injonction magique. En breton, geis se dit tonkad, en gallois tynked. (source)Preder Henoal, Les dieux bretons, ed. Guy Trédaniel Le mot irlandais geis reste usité dans toute la Celtie. Je le rapproche de l’allemand geist, qui signifie esprit.

J’ai connu une famille victime d’un geis. Pierre, le père, doit prénommer son fils aîné Jean-Pierre. À son tour, Jean-Pierre appellera son fils aîné Pierre. À chaque génération, le fils aîné devait s’appeler Pierre ou Jean-Pierre, en alternance. Jean-Pierre fils de Pierre méprisait ces superstitions d’un autre âge. Il voulut donner une autre prénom à son fils aîné. L’enfant est mort-né. 

La forte tête est devenu doux comme un agneau. Quand un autre fils lui vint, sans hésiter, Jean-Pierre l’appela Pierre. Devenu papa, ce dernier n’a pas dérogé à la tradition maudite qui va se poursuivre encore, je suppose, même si je ne suis plus là pour le voir.

 

 

Retour perdant

Très peu de sorciers noirs deviennent des mages blancs, par contre un sorcier blanc peut toujours se laisser tenter par la magie noire. À trop courtiser la matière, l’esprit perd ses ailes.

Si vous fuyez le côté obscur de la force, grand bien vous fasse. Pour autant, ne croyez pas que l’exocet psychique n’est pas à votre programme. Il peut se manifester sous bien des formes, avec ou sans motif, que vous l’ayez cherché ou non. Il peut même survenir au cours d’une relation d’aide. C’est là où je voulais en venir.

Je l’ai vécu à plusieurs reprises, avec la plus grande stupéfaction. Au cours d’une séance de reki, la personne n’a pas pu absorber l’énergie que j’ai insufflé dans son schéma énergétique. Conformément à sa demande, je visais à rééquilibrer les trois canaux d’énergie, libérer les chakras et permettre une circulation accrue du vril. Je m’attendais donc à ce qu’elle dévore à belles dents ce don d’énergie, comme ça se passe d’ordinaire.

Eh bien pas du tout. Au lieu de rendre à la nature le surplus d’énergie non utilisé, cette personne l’a purement et simplement refusé. Le paquet d’ondes m’est revenu en force, très destructeur. J’ai passé une après-midi de chien. Je me traînais, épuisé, livide, au bord de la nausée. Je n’avais plus un seul atome d’énergie utilisable.

 

Le refus de guérir

Il arrive que la personne demandeuse refuse la guérison malgré elle. Le surmoi juge que la dose est trop forte, il craint que le câblage subtil ne supporte pas la surtension. L’inconscient prend alors la décision de fermer les portes subtiles, alors que la conscience l’ignore. Le corps subtil va alors dissiper la surcharge dans l’environnement immédiat. Ce qui est sans danger pour le guérisseur comme pour le demandeur.

Le souvenir des faits extérieurs de ma vie s’est, pour la plus grande part, estompé dans mon esprit ou a disparu. Mais les rencontres avec l’autre réalité, la collision avec l’inconscient, se sont imprégnées de façon indélébile dans ma mémoire. Il y avait toujours là abondance et richesse. Tout le reste passe à l’arrière-plan.

Carl Gustav Jung

 

Mais il y a une autre attitude, que je peux qualifier d’agressive. Au lieu de dissiper le surplus énergétique autour de soi, le patient intercepte le paquet d’ondes avant qu’il ne touche son corps subtil et le retourne à l’envoyeur, violemment, de manière délibérément hostile. Si cette attitude est salvatrice dans le cas de magie noire, elle est imbécile et injuste dans le cas de magie blanche. Mais comme le cas peut se présenter, autant en être averti.

 

Conscient ou pas

Tout refus de prêt (ou de don) d’énergie s’origine dans un refus inconscient de guérison. J’ai aussi enregistré des cas de refus inconscient d’éveil. Le reki d’Erquy est un puissant stimulant du schéma énergétique. Il éveille ainsi la kundalini et peut donner une bonne montée d’énergie. Si le demandeur est fin prêt, son éveil est assuré. Mais certains demandeurs ne se sentent pas prêts et leur surmoi refusent le bénéfice du reki. Le refus étant inconscient et involontaire, le choc en retour reste supportable. Le praticien s’en tire avec une tristesse insurmontable.

Quand le refus est conscient, l’ego dominant prend le dessus, et on se retrouve dans le cas de figure du combat de sorciers. Pour le patient, c’est sans conséquence, ni positive ni négative. Mais il n’en va pas de même pour le guérisseur.

Choc en retour. Il reçoit son énergie de guérison transformée en énergie destructrice, avec une intensité multipliée par dix. Pour lui, c’est l’épuisement total. Il lui faut plusieurs heures, voire plusieurs jours, pour récupérer son niveau habituel d’énergie. Pendant la phase de récupération, le guérisseur est vidé. Il peut cultiver des pensées morbides, une forte paranoïa, voire des pulsions suicidaires. Son malaise peut entraîner une perte de connaissance avec formation d’engramme.

 

 

Le scalaire de la peur

J’ai expérimenté cette déconvenue au cours d’une guérison à distance par le biais des ondes scalaires. La première séance fut tout à fait concluante, l’amélioration du malade était nette. Aussi me suis-je lancé en confiance dans la deuxième séance. Refus total du malade, à son insu bien sûr. Je me suis ramassé une violente beigne en pleine tronche. Charmant ! Subtile mais destructrice…

Ce qui console, c’est que le malade n’a pas à en souffrir. La guérison est un vrai sacerdoce, un don de soi. Encore faut-il s’assurer de la solidité et de la réactivité de notre forteresse intérieure. Tester à loisir nos sept enveloppes, et leur capacité protectrice. On peut se faire confiance, car les défenses subtiles sont en place.

Il est donc vital d’apprendre à se protéger. La pratique de la guérison est une action à haut risque. Première précaution indispensable : le guérisseur ne propose jamais ses services. Il doit attendre qu’on lui demande d’intervenir. C’est dur à vivre parfois, mais toujours indispensable.

 

Marre d’en avoir marre

Le guérisseur ne doit tenter de guérir que les malades qui le veulent vraiment, absolument, sans hésitation. Mon benefactor disait que le malade ne doit pas seulement en avoir marre de sa maladie. Il faut qu’il en ait marre d’en avoir marre. Le guérisseur ne doit pas s’exposer au risque d’un refus inconscient de guérison. Voilà pourquoi il importe de sonder le malade ou le candidat à l’éveil, de le faire parler de tout et de rien, librement, pendant plusieurs jours voire plusieurs semaines. C’est ce que je fais quand j’ai le moindre doute.

Guérir ou pas, c’est toujours le choix du malade. Aucun guérisseur n’est tout-puissant. Amis guérisseurs, attention à l’ego : c’est votre pire ennemi. Le libre arbitre du malade est plus puissant que toutes les médecines et que tous les guérisseurs et faiseurs de miracles.

Le libre arbitre vient de l’ignorance des causes réelles qui nous font agir.

Démocrite

 

 

Cette page remplace et complète une page d’octobre 2019 intitulée Attaques psychiques.

 

Toute technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie.
Arthur C. Clarke