La peur ressemble à l’ego. Tant qu’on est vivant, on ne peut pas s’en débarrasser. L’ego nous aide à nous construire, et quand on atteint la maturité, il nous empêche de grandir en sagesse. On ne peut le tuer sans mourir. Mais on doit le tenir à distance pour qu’il ne soit pas envahissant. La peur n’est pas aussi constante, mais tant qu’on est en vie, on doit faire avec.
On consacre la première moitié de sa vie à se forger un ego solide, et la seconde moitié à s’en débarrasser.
Consternante pétoche
Quelle que soit la vie qu’on mène, la peur nous colle aux basques. Elle nous accompagne, indiscrète, collante, tout ce qu’on peut faire, c’est la contenir. Tantôt elle nous serre le cœur, tantôt elle nous sert de paillasson. On la piétine, on se sent mieux. Toujours elle revient, la garce. Elle renaît de ses cendres pour nous torturer encore et encore. Ceux qui n’ont plus peur sont morts.
S’en faire une amie serait l’idéal. Bien peu y parviennent. S’en faire une alliée est plus accessible. Puisqu’elle est et restera notre compagne fidèle, autant qu’elle soit utile. Ceux dont le métier est de braver la mort, ces gens pleins de courage qui semblent tellement maîtres d’eux-mêmes, eux aussi connaissent la peur. Peur de mourir au combat, peur de souffrir, peur de rester infirme, invalide.
Ceux-là n’ont pas le choix, ils doivent s’en faire une alliée. L’un d’eux m’a dit que tout le monde avait peur. La peur n’est pas notre ennemi. Elle augmente le rythme cardiaque, la rapidité des réflexes. Il ne faut pas avoir peur d’avoir peur. « La peur n’empêche pas la mort, elle empêche la vie« , a dit Naguib Mahfouz.
La peur nous aide ?
Mahfouz a beau avoir reçu le prix Nobel, je ne suis pas d’accord avec son jeu de mot. La peur n’empêche pas plus la vie qu’elle n’empêche le danger. Bien gérée, la peur peut même vous sortir du danger. La témérité est l’état de celui qui n’a peur de rien. Et la témérité s’apparente à l’inconscience. La peur, elle, donne la conscience du danger. Il est vrai qu’avoir peur de tout et de rien n’est pas une vie. Alors comment contenir sa peur? Comment la maîtriser?
« La peur est la plus terrible des passions parce qu’elle fait ses premiers effets contre la raison; elle paralyse le cœur et l’esprit, » a dit Rivarol. Pas d’accord avec lui non plus. La peur n’est pas une passion, c’est un réflexe. La raison est très mauvaise conseillère en cas de danger immédiat, seuls des réflexes aiguisés sont utiles, même indispensables.
Avoir le cœur et le mental paralysés peut aider le corps à déclencher les réflexes salvateurs. Gérer la peur. Comme draguer la peur. Lui faire la cour. La séduire. Du latin se ducere, attirer à soi.
Ce qui me rappelle un dialogue signé Franquin dans Le prisonnier du bouddha :
– Aoh, je savais bien qu’on trouverait des gars courageux pour venir me sauver !
– Non, on n’en a pas trouvé. Alors on est venu avec la pétoche.
Remords
Prends la peur par la peau du cou et gobe-la comme une mouche moche: ainsi tu auras la peur au ventre. Mouche moche, couche du moche. Euh non, mouche du coche.* Pour Jean-Paul Sartre, les mouches sont les remords. À travers un nuage de mouches s’exprime une intense culpabilité.
Les mouches de Sartre ne font pas peur, elles font mal. Ce que la langue des oisons exprime ainsi : le remords est la seconde mort. Après être mort, tu remords. Mourir deux fois sans connaître la vie entre les deux, quelle punition!
La peur ne fait pas mal. Elle ne fait pas de bien non plus, en général elle annonce un danger. Je n’ai pas peur du danger. Est-ce inconscience? Depuis l’enfance, le danger me rend maître de moi. Il me donne du courage, du calme et de la présence d’esprit. Je gère le danger beaucoup mieux que le stress.
Un nuage de questions
Descendons de quelques pas dans les arcanes ténébreuses de la psyché humaine. La peur, dites-vous? Quelle peur? La peur informulée, sous-jacente, cette peur qui noue les tripes — juste un peu, mais tout le temps. On ne sait ni d’où elle vient, ni ce qu’elle est. Ce qu’elle veut, je m’en doute : elle veut ma mort sans report ni remord. Elle veut m’anéantir à petits feux. Insidieuse et faux-derche, elle me brise menu.
Mais d’où vient-elle? De notre humaine condition, je suppose. Qu’est-ce qu’un humain? Un être doué d’intelligence qui se demande ce qu’il fout ici-bas. Et qui l’a mis là? Et pourquoi? Toujours des questions pour répondre aux questions. On n’en sort pas. Faut-il s’en foutre? Taper du talon sur le fond de la piscine fétide pour regagner la surface de soi ? Pour rire avec les autres, les inconscients, les endormis?
Ne sont-ils pas plus heureux que moi dans leur monde en plastique, enfouis dans cette réalité bidon qui n’a de réelle que le nom? Ils s’en foutent, eux. Royalement. Totalement. Absolument. Ils ramassent tout le pognon qui passe à portée de main. Ils étranglent, ils affament, ils assassinent par maroufle* interposé pour ne pas se salir les mains. Et le soir, dans leur nightclub privé, ils en font des gorges chaudes et se félicitent de leurs exploits dégueu aussi dru que je pisse sur eux.
*maroufle (désuet) homme grossier, malhonnête.
Ils n’oublient qu’une seule chose, ils sont mortels, ces gros cons. Face à la mort inéluctable, ils ne seront pas prêts pour le seul voyage qui compte. Ils auront merdé dans les grandes largeurs. Honteux et confus, ils verront un peu tard qu’un linceul n’a pas de poche. La matière et le pognon n’ont plus cours de l’autre côté. Pourquoi courir après? Gâcher sa vie et pourrir sa mort.
Finir en enfer ?
On ne donne pas la pièce à Charon pour qu’il nous laisse filer. Pas d’échappatoire. Le nautonier des morts connaît son affaire, il t’emmène aux enfers pour te faire les pieds.
Est-ce la seule cause de la peur sourde qui me hante? Finir en enfer? Je m’en tape. La mort n’est qu’une autre vie. Ce qui m’importe avant tout, c’est celle-ci. Mon ici et maintenant. Réussir cette vie. Pas n’importe comment. Si l’enfer m’indiffère, je pourrais choisir d’être un malandrin. Me joindre aux escarpes**. Devenir détrousseur. Escagasser le bourge. Flinguer nos maîtres. Dézinguer les patrons comme c’est la mode outre-atlantique.
**escarpe (suranné) Bandit ou assassin opérant en milieu urbain. « Tous ces escarpes n’avaient dû mourir qu’après de longues et horribles tortures ».— Jean Ray, Harry Dickson
Pas question. Je vaux mieux que ça. Ce que je cherche n’est pas dans cette direction-là. L’argent n’est qu’illusion. Faire souffrir revient à en souffrir soi-même un jour, quand l’insensibilité sera partie. Le manque de cœur ne met pas à l’abri du remord qui tue deux fois.Voir plus haut Ce n’est pas ainsi qu’on réussit sa vie. Très peu pour moi.
La seule réussite
Ce que je veux, c’est clair : devenir ce que je suis de toute éternité. Tiens, la voilà ma pétoche : échouer!! La voilà ma peur la plus profonde. Démasquée.
Notre peur la plus profonde est que nous sommes puissants au-delà de toute limite.
Réussir le passage devant l’Aigle. Pour moi la seule réussite qui importe. Nulle autre ne compte. Être connu, reconnu? Je m’en tape. Je suis trop bien dans ma peau d’inconnu.
N’essayez pas de devenir un homme qui a du succès. Essayez de devenir un homme qui a de la valeur.
Pour vivre heureux, vivons cachés, disait Loulou. Elle a réussi son coup ma Loulou, je dois dire. À par moi, qui se souvient d’elle ? De sa vie ? Maman, je t’aime. Je te l’ai dit souvent, guère avare de ce mot-là. Tu as éclairé mon enfance comme peu de mères le font.
Je ne suis avare de rien, je déborde. L’avarice me fout les varices. « La peste soit de l’avarice et des avaricieux ! » Molière, L’Avare
Je ne garde ni mon argent, ni mon talent, ni les mots doux, ni les bisous.
Générosité sacrée
Mon bien le plus précieux, nul ne peut me l’ôter : la générosité. Très tôt j’aimais donner. Quand j’ai lu ce mot de Jésus,dans l’évangile de Thomas tout de suite il m’a plu. « Quand tu donnes, que ta main gauche oublie ce que fait ta main droite. »
C’est tout à fait ce que je ressens. Donner est mon vice, qui a failli causer la perte de ce site.encore en danger! Mes lecteurs ne sont pas avares non plus. Ils savent donner leur aide, leur affection et leurs encouragements. Ils ont répondu à mes appels pressants. Eden Saga vivra aussi longtemps que moi, soyez-en sûrs.et faites ce qu’il faut pour. Après…?
Puisse ce site vous aider à vaincre le premier ennemi du guerrier : la peur.
Valse-hésitation
Très récemment une fidèle lectrice m’envoie des mails qui font une valse-hésitation***. Sans oser se déclarer concernée, elle voudrait en savoir plus long sur le stage individuel que je donne ici à Erquy. Je ne puis lui forcer la main, ce serait contraire au principe sacré du libre arbitre, elle le sait et elle en joue de manière amusante.
Ignore-tu mes petits talents ? Je lis en toi comme dans un livre. Avant de poursuivre, je dois te dire deux mots de ce qui t’attend.
Les mystères d’Isis
Ce stage est en réalité une initiation, celle des grands mystères d’Isis. Les petits mystères, je les ai pratiqué pendant vingt ans. Ils correspondent à l’arcane XIII du Tarot de Marseille. Nettoyage de l’engramme de base et des verrous qu’il a causés.
Les grands mystères correspondent à l’arcane XVI, La Maison Dieu, qui est l’arcane de l’éveil. Jean-Claude Flornoy, mon benefactor, maître en tarots, expert en transe profonde, avait coutume de dire que seul l’arcane XIII ou arcane sans nom nécessitait une aide extérieure. D’où le travail de remémoration par la transe profonde qu’il pratiquait à Rochefort sur Mayenne et qu’il a bien voulu m’enseigner.
À présent l’arcane sans nom ne pose plus de problème : c’est l’éveil qui demande un coup de pouce. L’arcane XIII se passe sans aide. Mais l’éveil en demande une solide, si possible donnée par un nagual.
D’où le travail que j’effectue depuis huit ans sur le reki d’Erquy. Sans doute le meilleur moyen d’approcher l’éveil, et si on y est assez préparé, de le recevoir au cours du stage ou dans les jours qui suivent.
Le mental, l’inconscient et le double
T’inquiète pas, ma belle. Ton éveil te rattrape. Wait and see, attendre et voir. Quand tu en auras marre d’en avoir marre, tu finiras par venir me voir. N’attends pas de te détester pour sauter le pas. Tu m’as cité presque mot pour mot la citation de Nelson Mandela.
Et tu ne la connaissais pas, m’as-tu dit. Toi non. Ton inconscient, lui, la savait par cœur. Depuis le temps qu’il s’efforce à court-circuiter ton fichu mental! Ainsi achoppons-nous tous sur les mêmes pièges.
Le mental est un autre nom pour l’ego. L’inconscient est un autre nom pour le corps. Notre double s’incarne lors de l’éveil, il a partie liée avec le corps, tous les deux boutent l’ego hors. En français kiskoz : ils le foutent à la porte.
Et l’ego, à partir de là, va le laisser tranquille. Il se contentera de regarder ce qui se passe. Si tu restes la guerrière impeccable que l’éveil a fait de toi, il va te regarder faire sans te coller des bâtons dans les roues. Tu verras comme c’est plaisant de ne plus trimballer en toi ton pire ennemi.
Sinon la chienlit
Si pour une raison quelconque tu manques d’impeccabilité, l’ego te fera schmirrrr et même pirrrr. À toi de voir et te voyant, revoir ta stratégie. Tout ce qui t’arrive est voulu. Par qui ? Tu me demandes par qui ? Mais par toi bien sûr ! Tu es responsable de tout ce qui t’arrive, c’est la règle première du guerrier.
Être impeccable, c’est le savoir et en tenir compte. Savoir ne suffit pas. Je te dis que tu roules avec un pneu à plat. Tu me réponds : je sais, mais tu continues à rouler. Ça craint du boudin. Sûr que changer un pneu ça fait schmirrrr, mais s’envoyer dans le décor parce qu’on n’a pas changé son pneu, ça fait pirrrr.
Ça fait des corps dans le décor. Et des frais qui t’effraient. Car l’auto ne joue pas au loto, ni l’ego au lego. Les dommages, n’en fait pas un fromage. Le mental ne suce pas d’emmental. Et l’inconscient n’a rien d’un con sciant.
La peur n’est pas si grave, allez. Le plus grave, c’est quand on a peur d’avoir peur.
Souviens-toi
Il n’y a d’autres obstacles sur ta route que ceux que tu y as mis toi-même.
Notre peur la plus profonde
La peur, la seule peur, la peur la plus puissante et la plus difficile à vaincre, Nelson Mandela**** l’évoque parfaitement dans son discours où il emprunte ces mots à Marianne Williamson***** :
″Notre peur la plus profonde n’est pas que nous ne soyons pas à la hauteur, notre peur la plus profonde est que nous sommes puissants au-delà de toutes limites.
C’est notre propre lumière et non notre obscurité qui nous effraie le plus. Nous nous posons la question… Qui suis-je, moi, pour être brillant, radieux, talentueux et merveilleux ? En fait, qui êtes-vous pour ne pas l’être ?
Vous restreindre, vivre petit, ne rend pas service au monde. L’illumination n’est pas de vous rétrécir pour éviter d’insécuriser les autres.
Nous sommes tous appelés à briller, comme les enfants le font.
Et, au fur et à mesure que nous laissons briller notre propre lumière, nous donnons inconsciemment aux autres la permission de faire de même. En nous libérant de notre propre peur, notre puissance libère automatiquement les autres.″
****Nelson Mandela (1918-2013) a été l’un des dirigeants historiques de la lutte contre le système politique institutionnel de ségrégation raciale (apartheid) avant de devenir président de la République d’Afrique du Sud de 1994 à 1999, à la suite des premières élections nationales non ségrégationnistes de l’histoire du pays.
*****Marianne Williamson, née le 8 juillet 1952 à Houston, est une autrice de livres de développement personnel et femme politique américaine, membre du Parti démocrate.
Journal du guerrier
- Guerrier
- Qui es-tu ?
- Freins serrés
- L’inhibition de l’action
- Ce chemin de souffrance
- Ton éveil est en toi
- Le passeport du guerrier
- Ouvert, attentif, lucide
- Quelle vérité ?
- « Aidez-moi »
- Le dragon de l’ego
- Saturer le mental
- Humilité mon bouclier
- Gérer la peurVous y êtes
- Tristesse sans cause
- Chance ou malchance?
- La quête d’intensité
- Intensité maximale
- Révolte et Conditionnement
- Captifs du Diable
- Maintenant ou jamais
- Les efforts inutiles
- Le rite et l’acte
- Le Gardien en toi
- Le Gardien de Castaneda
- Le Gardien de Steiner
- Les douze pièges
- Si tu veux, tu peux
- Le guerrier politique
- De l’horreur au bonheur
- Toi aussi
- Le don
- La Voie du milieu
- L’irruption de l’inexplicable
- Patience
- Sois toujours toi
- Le dernier combat du guerrier
La peur n’empêche pas le courage.