Dans le désert du monde, plein de stress et de sable aux yeux, on avance à peine. On tâtonne. On en chie. Pauvres pantins pétris dans la matière / Mater / ma terre, nous voici hommes domestiques, nanifiés par l’âge des ténèbres, robotisés par la télé, grillés par la pression fiscale, piégés par le coût de la vie, soumis au racket des GAFAM,Google Amazon Facebook Apple Microsoft paumés dans la mondialisation des truands et des rats.

Rat race
It’s a disgrace
To see the human race
In a rat race
Rat race
(source)
Course de ratsou : race de rats
C’est une disgrâce
De voir l’humaine race
Dans une course de rats
Race de rats

 

Dans un tel vide oppressant, stressant, harassant, incessant, je trouve -miracle !- un havre de paix. Ce n’est pas une combine perso, due à je ne sais quel talent que j’aurais et que d’autres n’ont pas. Ce talent-là, nous l’avons tous, parole ! Qu’on soit faible ou qu’on soit fort, gros effet sans effort, un précieux réconfort améliore notre sort. Qui que nous soyons, nous y goûtons. Son vol nous conduit chaque nuit. Il s’agit du sommeil.

Ses bienfaits nous inondent, vraie douche énergétique, symphonie sympathique. La plongée dans l’Esprit, les visites dans l’inconscient, les merveilles d’outre terre et les délices du monde astral font de notre vie endormie la juste réplique du paradis. Petit souci : on ne s’en souvient pas. Pire encore : si par chance – ou par abstinence – on s’en souvient, aussi précis soit-il, ce souvenir n’est pas une description fiable de ce que nous vécu en rêve.

Le cerveau l’a maquillé. Sauvegarde du train-train quotidien, casseur de merveilles, la cervelle est un garde-fou. Un connard de pc qui veut nous annexer. Ce n’est pas lui qui produit les pensées, il ne fait que les ramasser. Puis il les trie, il fait son choix, celle-ci ça va, celle-là ça ira, cette autre non pas question, il censure sans états d’âme. Normal, il n’a pas d’âme.

 

 

Première suggestion

Le rêve n’en est pas un. C’est la vie éveillée qui est rêvée. Rêve ou cauchemar, va savoir. Cauchemar pour la plupart. La vie soi-disant éveillée n’a ni importance, ni consistance, ni existence aux yeux des dieux nos maîtres. Ce qui se passe d’intense entre eux et nous, c’est quand on dort. Dans la petite mort. Sans notre accord, ils nous explorent, on les implore : la vie, la mort ? Savoir d’abord.

Ils nous apprennent la voie moyenne, la vie sereine, la magie reine, la science ancienne, que la joie vienne et qu’on comprenne pourquoi l’on peine, sur quelle arène on se démène, que tu apprennes : lâcher les rènes, quitter la scène, va où te mène la peur sans gène, peur quotidienne, panique obscène, terreur malsaine que l’on t’assène, qui te malmène ; honte à qui ken sans ses antennes ; sa magie pleine en devient naine, au nom du pêne et du fil omen.

Les dieux nos maîtres ont mis au point depuis des éons un programme d’enseignement et d’éveil qui se déroule au fil des âges selon une épure informatique. Chaque époque a sa part de sagesse, chacun aussi, sinon ça chie. Chaque âge a ses rishis, ses prophètes, et leur parole plane dans les airs ; tendez l’oreille, restez en veille. Les écrits pourrissent, seules les paroles restent.

Ou plutôt dormez. C’est quand vous dormez que vous êtes enseignés. Toutes les nuits. Les prétendus rêves n’en sont pas. Voyez-y un habillage, camouflage, maquillage, rafistolage que fournit la cervelle pour ne pas nous briser les ailes. Pour ne pas révéler le secret des miracles. Ni celui des oracles. Au réveil, le cerveau s’empare des bribes de souvenirs, aussitôt les déforme, les habille avec du matériel puisé dans votre banque de données inconsciente. Il maquille les faits, en effet, avec un talent consommé. Qu’on se met où on veut, ranafout.

 

Deuxième tournée

Donc ce qui compte reste caché. Beaucoup n’y croient pas, la plupart n’y attache aucune importance. Et pourtant, sans ce phénomène quotidien qu’on appelle le rêve, la vie humaine est impossible. On meurt non de manque de sommeil mais de manque de rêve. Parce que rêver n’est pas le gentil cinéma qu’on imagine. C’est aussi du sang et des larmes. Le survol des âges passés montre une infinité de corps ouverts, les tripes à l’air, litanie amère de misères et de galères qui exaspèrent qui désespèrent jusqu’à la fin du camembert.

La nuit ton soleil luit. Ton astre intérieur inonde de ta lumière les chemins de l’astral. La nuit tu rencontres tes maîtres. La nuit tu suis la Voie, celle qui jamais ne sort des sillons de clarté. La nuit tu es vraiment toi. La nuit tu te noies dans la joie. La nuit tu te vois et tu t’aimes. La nuit tu te reçois et tu t’offres l’amour. Lumière et amour s’assemblent toujours. L’une signe l’autre.

Le jour tu cours. Le jour toujours trop court. Il faut faire ci, écouter ça, manger ci, boire ça, dire, lire, frire, cuire, redire, relire, recuire et se faire tartir. La nuit est à toi de part en part, de bout en bout, de fond en comble. Et ça te comble. Toutes tes nuits au paradis. Tu l’oublies, mais tu le vis. Cinquante pour cent de ton temps dans le blanc. Loi d’oubli. Tu vis la vraie vie, tu rencontres ton vrai père, tu chéris tes vrais fils. Ici-bas ce sont des copies. L’original reste au bercail.

Le jour est un val sans retour. La roue des jours qui tourne te joue des tours. Tu cours après l’amour. Tu cours après toujours. Et jamais tu l’atteins. Tintin. Retiens ton baratin. Le jour est sourd. Lourd. Gourd. Chaleur de four ou froid des ours, le jour se goure. La nuit attend son tour. L’éveil dans ton sommeil. Déception au réveil : tu vois toujours pareil.

 

 

Troisième vitesse

Ceux qui savent par cœur ce qu’ils ont appris à contre-cœur vous diront de bon cœur : la nuit reconstitue le corps car le sommeil paradoxal donne des rêves réparateurs. Les toxines se débinent. La fatigue danse la gigue. La lassitude s’élude et les soucis aussi. C’est vrai, mais pas tout à fait comme ils le croient.

Le sommeil ouvre la porte de l’astral. Derrière cette porte, nos maîtres nous enseignent toutes les nuits, tout au long de la vie. Grâce à ces leçons fabuleuses, nous retrouvons le sens de la vie que nous avons perdu depuis longtemps. Le réveil nous le reprend, mais la belle énergie nous anime longtemps. Quand vient le soir, quand il se fait tard, je me glisse au plumard et quel bonheur ! Je pars.

C’est le voyage astral qui nous répare. Ce sont nos maîtres qui nous lavent. Notre âme souillée par la matière a besoin de prières, sans doute, mais plus encore de prendre une bonne douche. La parole de nos maîtres est la toilette de l’âme. L’énergie vitale en sort rénovée, dynamisée, prête à affronter le réveil et la nouvelle journée.

Rien de matériel ne peut guérir l’esprit. Un rien d’esprit guérit toute la matière. Les leçons que nous recevons endormis sont un élixir de jouvence. Passeport pour la confiance. Antidote aux démences. Bon pour la vie intense. Sur un air de silence, on y danse, on y danse. Enfoncé le pont d’Avignon !

 

Dernière Heure

Que dire ? Que devenir ? On ne devient jamais rien que ce qu’on est depuis toujours. Une fois crevé le mur d’oubli, la mémoire absolue nous revient. Nous savons enfin le chemin qui monte à rebrousse-temps, qui descend vers demain et lendemains lointains. Le temps est mon jardin, il sera donc le tien. Rien ne tient qui ne vient de rien.

De l’autre côté, ohé ohé, on voit des gens, des magasins, des maisons et des murs. On voit des champs de fleurs et des prés pour s’y rouler. On voit des bergères en jupons et des mémères en robe à panier. On voit des escargots mixtes et des lézards à double queue. Ils ont en ont deux superposées. Plus une à l’arrière qui peut se démonter. Ils sont arrivés avant nous sur terre, normal qu’ils nous devancent au paradis.

Toutes les nuits tu t’y retrouves avec des lys. Avec délices. D’un coup d’hélice. Alors après la mort tu t’y fais sans effort. Tu as disparu du journal des vivants mais tu n’es pas mort pour autant. Tu vis comme avant dans tes rêves, mais là tu t’en souviens. Il n’y a pas de voile opaque, pas de brouillard, pas de réveil où retrouver la vie d’avant. Il n’y a que toi, éternel. Rêvé. Arrivé. Stable. Confortable.

 

 

…Avant la chute encore, l’octroi d’un nouveau corps, sur Terre ou sur Alcor, à la vie à la mort.

Aïe heurt = Ailleurs

 

Xavier Séguin

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Xavier Séguin

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