Danaé. Je t’ai rencontrée en cherchant autre chose, il y a des années. Je t’ai regardée. Je t’ai oubliée. Danaé. Tu es revenue frapper à mon huis un soir d’hiver. D’humeur fauve, je t’ai chassée d’un rugissement. Danaé. Sans hâte qui gâte, sans rancune aucune, tu t’es frayé chemin dans la touffeur de ma conscience.
Par des sentiers connus de moi seul, tu t’es glissée, Danaé, pur cœur de beurre, en ma sûre masure intérieure. Je t’ai priée d’entrer. Tu m’as raconté ton histoire. Elle est simple et terrible.
Dans un pesant climat de sortilèges et de maléfices, la petite Danaé est victime d’une cruelle injustice. Son père est seul juge et bourreau. Le roi Acrisios emprisonne sa fille pour la protéger, ou plutôt pour se protéger lui-même. La réclusion de Danaé lui a paru le plus sûr mode de contraception. Pour son père, il est vital qu’elle n’ait pas d’enfant. Un oracle a prédit au roi que son petit-fils le tuerait. C’est pourquoi la seule mère possible est emmurée dans cette tour de métal.
Mais en vain. Moïra se rit des plus haute murailles. Le destin est plus puissant que les dieux eux-mêmes. Ce qui doit arriver, arrive à coup sûr. Danaé est enceinte. Elle donne le jour à un fils. Et ce gamin grandit à l’insu du grand-père. Il devient un jeune homme vigoureux, empli de haine contre son salopard de Papy. À la première occasion, il veut tuer ce vieux monstre.
Encore un mythe, et quel mythe ! Une farandole de mythèmes nous rendent familière cette histoire qui plonge ses racines dans l’inconscient sociétal. Ce gamin meurtrier s’appelle Persée. Il aime sa mère, pour son amour il tue son (grand)père, dirait-on pas un autre Œdipe? Des pères jaloux de leur fille qui les condamne à la chasteté, la littérature en est pleine. Notre passé en est bourré. C’est encore en usage dans certaines cultures rétrogrades. L’histoire, la grande, a un sens. Je veux la remettre à l’endroit ; c’est une des fonctions de ce site. L’histoire, la petite, celle de Danaé, nous offre un pot-pourri de mythes, ou plutôt de mythèmes, avec une force et une densité rares.
Les mythèmes sont les unités constitutives des mythes. On les retrouve dans toutes les cultures. Ils se répondent et se complètent comme les pièces d’un puzzle 4D. Ces éléments de mythe comportent des détails caractéristiques, décrivent des comportements absurdes ou tout du moins inappropriés, hors contexte, qui permettent au mythologue une traçabilité parfaite de ces morceaux choisis. D’où leur nom de mythèmes, éléments de mythe, comme on dit phonèmes, unités sonores d’une langue. Ou encore, comme la philo nous parle de noumènes, unités de pensée.
Le noumène? C’est nous-mêmes.
Enfermée dans une tour d’airain (mythème) Danaé doit y demeurer sa vie durant sur ordre de son père (mythème). Quel crime a-t-elle commis ? Pas l’ombre d’un. (mythème) Le malheur a voulu qu’elle soit frappée par un oracle. (mythème) Il eut mieux valu pour elle qu’elle le fut par la foudre. (mythème)
Le roi parano a fait enfermer sa fille pour qu’elle n’enfante pas de fils. (mythème) Selon l’oracle, ce petit-fils tuerait son grand-père. (mythème) Du coup il condamne sans jugement sa propre fille à la prison jusqu’à la vieillesse, suppose-t-on. Le gros salopard ! (mythème) Il eut mieux valu qu’il la tuât.
Elle est donc emmurée vive de façon préventive, ainsi nul homme ne peut l’atteindre. (mythème) La tour d’airain tient lieu pour elle de ceinture de chasteté. (mythème)
La triste histoire histoire de Danaé se poursuit sur le même mode, à coup de mythèmes et de marronniers désespérants. Ces lieux-communs en surabondance la rendent exceptionnelle, justement. On les retrouve dans bien d’autres légendes, qui toutes ont puisé à sa source.
Zeus parvient à entrer dans la tour sous la forme d’une pluie d’or qui tombe sur la princesse. De cette union naît un fils, Persée. Courroucé, Acrisios met sa fille et son petit-fils dans un coffre qu’il jette à la mer. Ceux-ci parviennent à Sérifos, où le roi Polydecte, épris de Danaë, tente de la forcer à l’épouser. Pour parvenir à éloigner Persée, potentielle menace à son mariage, il l’envoie combattre Méduse la Gorgone. Persée revient, après maintes aventures, vainqueur de Méduse. Armé de la tête du monstre, il change le roi en pierre. Ainsi parvient-il à ramener sa mère en Argos.
Danaé chérie des peintres, nombreux sont-ils que ce conte a touché, nombreux sont-ils qui ton corps ont touché, nombreux rapins t’ont peinte, nombreux délurés t’ont dénudée dans le secret des ateliers quand ton bustier délié a fait jaillir tes seins altiers, que longuement ils ont palpés si doucement si gentiment et tendrement ont caressé ces trésors offerts désirés sur la toile ils les ont couchés au sofa où ils t’ont couchée dans un cadre ils les ont montrés dans ce cadre où tu évoluais pour que l’on puisse en profiter — de cet essai de ta beauté de ces tableaux et de ta peau.
Dix ? Trente ? Combien sont-ils à t’avoir peinte ? Combien de maîtres, combien de disciples, combien d’inconnus à la lumière d’une chandelle, combien sont-ils tous ceux qui t’ont connue mieux que de vue, ma Danaé ?
Qui donc es-tu vraiment pour avoir inspiré tant d’artistes et de poètes ? Quelle véritable histoire se dissimule derrière la fable faite pour attendrir ? Ton nom, déjà, nous donne une piste : Danaé, comme Danaann, la Grande Déesse des Tuatha. Faut-il chercher plus loin ? Pas nécessairement. Voyons si l’on peut pousser la comparaison, filer encore la métaphore.
Le personnage de Danaé serait une élégie, un prière de regrets éternels. La Grande Déesse est opprimée par son père le roi, image de Zeus et de la nouvelle religion, ou plus exactement du nouvel ordre mondial imposé par les tout-puissants Olympiens. On sait que le Sénat romain a tenté de soudoyer des druides celtes, pour les amener à épouser la nouvelle religion made in Rome, celle du Christ, qu’il s’agisse du Christ Empereur ou du Christ Jésus. Un exemple de ce reniement est donné par Merlin lui-même, druide enchanteur imprécateur et guerrier, devenu par la disgrâce de certain historiographe, le tout premier évêque chrétien. Délire. Merlin est trop Gallo pour être Romain. Gandalf ne pactise pas avec le Mordor.
Cette tentative de corruption, voilà ce que pourrait représenter la pluie d’or que Zeus le Père fait pleuvoir sur sa promise, qui est aussi sa fille, si vous m’avez bien suivi. Zeus est à la fois Acrisios père de Danaé, et Zeus lui-même, séducteur et suborneur de la recluse. On trouve ainsi l’inceste œdipienne chez Persée, et l’inceste ordinaire chez Zeus-Acrisios. La fable devient leçon de mémoire. La morale en est : « revenez vers la Grande Déesse, délaissez cette nouvelle religion qui bafoue la foi de nos ancêtres celtes.«
Par le plus grand des hasards,qui n’existent pas comme tu le sais, j’ai traité de la même question dans l’article Le Chêne Bayeux publié juste avant celui-ci. Oh comme le hasardqui n’existe pas fait bien les choses ! Comme Danaé, Clodomir fils de Clovis illustre à merveille les excès de cette période de transition.
On peut avec grand profit comparer cette interprétation avec un texte signée de la déesse Isis, qui soutient la même thèse.
Cette martyre a peut-être existé, mais j’en doute. Elle est le personnage central d’une fable à message. Invention habile, elle titille la corde sensible : Dana, Danaé… Son nom sonne trop familier aux oreilles de l’époque. Le passage d’une religion à une autre, d’une culture à une autre, est un traumatisme social. La vie humaine y pèse bien peu. L’ordre est celui du plus fort. La violence tient lieu de justice. Les exécutions sommaires dépeuplent les bourgs et les villas.
Les villas gallo-romaines sont de grosses fermes dirigées par de riches citoyens romains. Les Gaulois qui travaillent dans les villas sont appelés des vilains. Très vite les Romains ont importé en Gaule la religion officielle de l’empereur, le christianisme. Mais ça ne prenait pas vraiment. Comment demander à un peuple vaincu d’adorer l’empereur victorieux ? Le peuple préférera lui pisser à l’arrêt.désolé !
Il faut du temps pour que le souvenir de la vieille religion laisse place au désir de la nouvelle. Sous les pieux atours du christianisme, le paganisme préceltique ne dort que d’un œil. Engrammé dans l’inconscient collectif, ce culte puissant par ses effets magiques est régulièrement réimplanté dans nos cerveaux disponibles par nos –disons par les Grands Administrateurs. Les Planificateurs. Les Contrôleurs. Des entités comme nous, mais différentes. Ils pensent beaucoup plus vite, ils vivent beaucoup plus longtemps, ils travaillent beaucoup plus dur et on voit tout de suite le résultat. Très différents.
Leur rôle est de surveiller. Ils veillent au grain, sur la main, sur le drain, sur le frein, sur le brin, sur le tain, sur le teint, sur le thym, sur le pain, sur le vin, sur la fin, sur la faim, sur l’or fin, sur patin, sur couffin. Et sur mes liens. Sur les miens. Sur mes biens. Sur les tiens. Ça va bien.
– Hé vous les entités, ne pourriez-vous pas vous occuper de vos affaires ? je demande à mon ange conseil.
– Vous êtes mes affaires, et des affaires de valeur, désolé monsieur. Je dois suivre les cours de la bourse. Cela fait partie de mon travail.
Au far-west, ces gardiens de bétail s’appelaient des cowboys. Si nos gardiens sont des cowboys galactiques, nous sommes quoi ? Des vaches sacrées ? Ou des sacrées vaches…
Vous connaissez les sept chakras qui palpitent sur le corps d'énergie. Et les autres ?
Qui a creusé ces galeries et ces villes souterraines, et pourquoi tout ce travail ?
"J'en ai haussé des femmes ! J'en ai osé des flammes !" (Cahiers Ficelle, inédit)
En 1312, l'empereur du Mali regagne l'Amérique, le continent de ses lointains ancêtres.
Le symbole suggère, l'image montre. Que montre le caducée, arme d'Hermès ?
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