« Comment sortir de son corps ? » ou encore « Pour le voyage en astral, que faut-il faire ? » sont des questions qu’on se pose souvent. La réponse est impossible, sachez-le. Puis-je expliquer l’irrationnel avec le langage de la raison ? Oui, si l’on adjoint les images au texte. Je m’évertue à ce double effort depuis plus de 16 ans. Et vous êtes de plus en plus nombreux à me suivre. Et à m’interroger…
Depuis que j’ai publié l’article Sortie de corps où je relate ma propre expérience, de nombreux internautes manifestent un intérêt croissant pour cette pratique. La même année, j’ai écrit L’art de rêver, où je donne d’autres tuyaux plus généraux. J’ai voulu aller plus loin avec l’article Le voyage astral, mode d’emploi, où je donne le point de départ de cette expérience : c’est une affaire de vertige et de gestion du vertige.
Apparemment ça ne suffit pas, puisque cette question revient toujours. Au lieu de me répéter en réponse à vos courriers, il vaut mieux que j’en fasse un article. Ce qui ne vous empêche surtout pas de m’écrire ! Une autre condition préalable pour qu’un guerrier puisse effectuer des sorties de corps : le sens du timing.
Vivacité, réactivité, tonicité, vitesse intérieure — pas de temps mort, on ne réfléchit pas, on agit, ça va des yeux aux jambes, l’action prime, à la façon des mouches. Ces insectes sont si vifs parce que les signaux perçus ne passent pas par le cerveau. Ils vont des yeux à ses ailes. Ce qui lui permet de décoller plus vite que tes réflexes…
Je suis quelqu’un de rapide. Je ne m’étends pas, je ne radote pas. Nulle complaisance dans mes mots. Ils ne s’adressent pas seulement à ton esprit, ils visent aussi ton corps, tes comportements, ta compréhension.
Efforce-toi d’acquérir le sens du timing qui te donnera la fluidité nécessaire pour suivre l’aventure dans toutes ses péripéties.
Mais ce ne sont que des mots. Tu veux du concret. Comment sortir du corps ? Comment vivre un voyage astral ? La réponse risque de te décevoir.
Il n’y a rien à faire. Rien du tout. Par contre il y a une foule de choses à ne pas faire.
Pour sortir de mon corps, je ne fais rien, ça se fait tout seul. Mon point d’assemblage se déplace, un minuscule décalage suffit pour assembler un autre monde. Ce n’est pas plus compliqué que ça.
Alors comment déplacer son point d’assemblage ? Il se déplace tout seul. La raison n’a rien à faire là-dedans. La volonté non plus. C’est le corps qui fait. Le corps est magique. Il sait faire des choses incroyables. Mais le cerveau veille au grain et s’oppose systématiquement à ce qu’il prend pour de la folie. C’est un garde-fou. Et un empêcheur de planer en haut.
Notre foutu mental nous ramène à la raison. L’être lumineux se transforme en robot. Tu retrouves ta programmation initiale, ton cerveau aussi con qu’un ordinateur te remet dans le droit chemin, où les gens ne volent pas dans l’astral parce que l’astral n’existe pas.
Le nagual Jean-Claude Flornoy m’a répété ça vingt fois par jour pendant des années. Dès que je lui demandais comment ci, pourquoi ça, mon benefactor me barrait aussi sec : « Laisse tomber le mental. Tu poses trop de questions, ça t’empêche d’agir. Si tu ne sais pas, ton corps le sait. »
Le guerrier de lumière n’a aucun besoin de savoir. Il s’accroche à cette certitude : l’être est lumière pure. La raison est obscurité. Les anciens l’appelaient le voile d’Isis. Ce foutu voile qui ressemble à un brouillard jeté sur le monde astral. À sa place, on ne perçoit plus que ce monde virtuel, ce piège fabriqué par de puissantes entités qui se nourrissent de nos forces, de notre énergie, de notre lumière.
Castaneda les appellent les voladores, les volants. Il les décrit comme de gigantesques raies mantas qui planent au-dessus des villes. Quand on roule vers le bassin parisien, avant de voir la ville, on distingue son halo de pollution. La pollution est l’autre nom des voladores. L’écume du monde virtuel. La vapeur du mirage.
Castaneda et Flornoy avaient bien raison, j’en suis convaincu à présent. Il m’a fallu le temps. Nous avons été des précurseurs. Des ouvreurs. Maintenant la passage est balisé. Les nouvelles générations iront plus vite.
Le guerrier ne joue pas. Il ne brûle pas sa vie à attendre. Il agit. Son action n’a pas pour but d’accumuler des expériences rigolotes ou impressionnantes. Il laisse le sensationnel à sa place, sur les champs de foire. Le guerrier consacre sa vie à la recherche du Soi. Au dépassement de l’ego. Au passage dans la lumière blanche de l’éveil.
Et le voyage commence. La vraie vie démarre quand tu t’éveilles. Quand tu es enfin parvenu à tuer le zombi. L’ego te lâche enfin la grappe, tu ne sais rien mais tu comprends tout. La lumière blanche te baigne, elle pénètre tes sens, pas les cinq ordinaires, mais tous les sens. Nos pouvoirs divins que les voladores dévoraient se raniment. Notre vraie nature s’épanouit dans une jouissance tranquille, sereine, stable.
Ne pas céder au vertige qui surexcite. Ne pas convertir à tout prix ceux qui ne vont pas par là. Chacun sa route, chacun sa chanson. Rester modeste, chercher l’invisibilité. Pour être invincible, reste invisible. Pour vivre heureux vivons cachés.
S’il te faut d’autres mots pour exprimer l’inexprimable, tu peux lire ça : L’usage du point d’assemblage et Déplacer son point d’assemblage. Mais la lecture ne te rapprochera pas du Soi. Seule l’action est la voie. Le guerrier agit toujours, sans jamais attendre de résultat de son action. Ainsi renforce-t-il son bouclier d’humilité.
Dans tous les actes magiques que le guerrier peut accomplir, il y a une dominante incontournable. Laisse ta tête en dehors de tout ça. Oui, coupe-toi la tête. Mets ton mental au repos. Ne fais rien en conscience. Ne te dis pas : et maintenant je fais quoi ? Cette question n’a aucun sens. Les actes magiques viennent du corps d’énergie, et certainement pas du mental.
Le mental est un ordinateur tout juste bon à calculer les paramètres du monde ordinaire. Ils ne sont adaptés qu’à la pensée dominante. Ou plutôt, la pensée dominante est stupidement rationnelle, ignorant complètement que les découvertes, les innovations et les chefs d’œuvre naissent à l’opposé : dans la folie.
Cette folie-là est contrôlée, ce qui ne veut pas dire encadrée par la raison. Non. Elle est limitée dans le temps. C’est ici qu’on revient à l’importance du timing. On pourrait dire que c’est la qualité majeure du guerrier. On comprend bien que ce fameux sens du timing ne se réfléchit pas. Ne se calcule pas. Ne s’analyse pas. Regardez un virtuose du ballon rond, comment son pied arrive à la bonne position, au bon endroit, au bon moment.
C’est le talent. C’est le ne-pas-faire du grand footballeur. Et ça ne marche pas à tous les coups. Dès qu’un joueur s’applique, dès qu’il calcule son geste, il se plante. Comme Tintin dans l’image qui suit…
Le vol du guerrier pourrait être un bouquin de Castaneda. Ethnologue défroqué des années 70, ce prince du paradoxe a ouvert la voie de la sagesse yaqui, ou plutôt toltèque, pour toute la planète jeunes. Beaucoup imité, jamais égalé, il a posé les bases d’une philosophie de l’action qui prend son sens dans une pratique de chaque instant. Nombreux sont les auteurs qui surfent sur la vague de fond du nagualisme, mais rares sont ceux qui témoignent d’une connaissance vécue.
Un certain Bourre n’est pas de mon avis. Il a pondu ceci : « Si tu veux sortir de ton corps, appelle d’abord à toi tes alliés, tes protecteurs spirituels. Sans eux, le voyage hors du corps serait périlleux, parfois même sans possibilité de retour. Ensuite, médite profondément sur ta respiration. Tu dois détacher ton âme de ton souffle, par la force de ta concentration. Tu retrouveras le vertige du vol de l’oiseau, le galop du cheval sauvage, la course du vent dans la prairie. L’homme esprit n’est pas limité à la vision matérielle du corps. Apprends à voir autrement. Essaie de concevoir ton corps comme un pur esprit, et en même temps, donne à ton esprit la réalité d’un corps. »
Cet auteur s’inscrit clairement dans la lignée de Carlos Castaneda comme en témoigne le titre de son article : Préceptes de vie issus de la sagesse amérindienne.
L’auteur n’a pas expérimenté la chose directement. Il se contente d’aligner des mots qu’il a lu sans vibrer, juste avec sa tête. Il n’a pas laissé son corps de magie s’en emparer pour mieux sucer la substantifique moelle.François Rabelais
Le bruit court que M. Bourre aurait épousé une demoiselle Lemoux et qu’il s’appellerait désormais Bourre-Lemoux. Mais il s’agit très probablement d’une fausse nouvelle que je ne me donnerai pas la peine de vérifier.
Quel rôle peut jouer le ne-pas-faire castanédien en face de ce naufrage ? S’abstenir de le lire. Comme je devrais m’abstenir de le citer… Le ne-pas-faire du guerrier impeccable consiste à savoir sans l’avoir lu que ce texte-là ne contenait que des âneries.
Si tu me lis, tu as compris l’inverse. Mes mots ont sonné juste, ton corps a vibré. Sans y penser, tu as décidé de me faire confiance. C’est le ne-pas-faire de choisir. Ton corps le sait. Mais attention ! N’y remet pas de mental. L’ego a laché prise, ne le rappelle pas. Contente-toi de humer. Pour lâcher la bride aux pouvoirs du corps, laisse faire ta magie intérieure.
Et l’acte magique accompli, n’oublie pas de remercier. Qui ? On s’en fout. Remercie, c’est tout.
Ne pas confondre allié et protecteur spirituel. Ces deux notions sont opposées. Le protecteur spirituel vient du christianisme. C’est d’abord l’ange gardien, qui veille sur le croyant à chaque instant de sa vie. Ou le saint patron, qui joue le même rôle mais de façon plus ponctuelle, sur la demande du croyant par la prière. Et enfin ça peut être le prêtre confesseur, le directeur de conscience à la mode du passé. De tels personnages sont étrangers à la culture amérindienne.
Par contre le terme allié fait clairement référence à Castaneda. L’allié est une entité issue d’un autre plan de réalité, celui que les ésotéristes appellent l’infra-monde. Le nagual Don Juan Matus raconte la rencontre du sorcier avec un allié. C’est très physique. L’allié vient d’un monde basé sur l’électricité, et son contact grésillant est très désagréable pour nous, créatures d’un monde basé sur l’eau.
Dans un corps à corps éprouvant, le sorcier doit soumettre son adversaire, phase que Castaneda appelle : harnacher l’allié. Une fois calmé, l’allié se transforme en vapeur et entre tout entier dans une petite gourde que le sorcier a préparée à cet effet avant la rencontre, et qu’il portera toute sa vie à sa ceinture.
Mon benefactor en avait une où il tenait enfermé son allié, l’Homme Gris. Bizarrement, alors qu’il la quittait rarement, sa gourde était invisible, et elle n’apparaissait que quand il en avait besoin. L’allié dans la gourde évoque les contes des mille et une nuits, avec le djinn dans la lampe à huile d’Aladin. C’est effectivement très proche.
L’allié et le protecteur spirituel n’ont strictement aucun point commun, et les confondre dénote ignorance, légèreté… ou les deux. En mêlant indûment la culture nagualiste amérindienne et la culture chrétienne d’Europe, loin d’aider les néophytes, on les roule dans la farine du synchrétisme.
En deux mots, le synchrétisme est la « fusion de différents cultes ou de doctrines religieuses; en particulier, tentative de conciliation des différentes croyances en une nouvelle qui en ferait la synthèse ». (source)
Cette longue analyse était nécessaire. Il est très difficile à quiconque de décrire la pratique d’une sortie de corps. Il est bien plus facile de dire ce qu’elle n’est pas. Je viens de le faire grâce à ce monsieur. Qu’il me pardonne s’il se reconnaît.
C’est le ne-pas-faire d’une lecture de texte.
La quasi-totalité des vols astraux nous arrivent sans prévenir. Dans ce cas, on a autre chose à faire que d’invoquer son ange gardien ou son confesseur. Le recours à l’allié est tout aussi inutile. On doit gérer la situation dans l’urgence, sans réfléchir surtout, sans pensée, sans peur et sans savoir pourquoi on se retrouve dans un ailleurs inédit où le corps ne pèse rien, où l’on se déplace immobile dans un non-espace où le temps s’arrête.
Après des décennies de pratique (éveillé à 16 ans, j’en ai 75) je suis toujours incapable de dire si dans la seconde qui suit je ne vais pas me retrouver en astral, plus haut que le vol des oiseaux. Ignorer cette constante dénote une absence de pratique. Comme souvent — trop souvent !– ce faux spécialiste parle de ce qu’il n’a pas vécu lui-même.
Tu as l’impression de n’arriver à rien ? Ne te fais pas de souci. La sortie de corps consciente t’arrivera quand tu seras prêt. Alors tu sauras comment faire. Ton corps le saura.
Tout se passe dans les yeux. Tes yeux changent, ils deviennent plus brillants, ils laissent filtrer au dehors la lumière qui est en toi. À force de brillance, l’espace d’un instant, tes yeux vont se transformer en une flaque de lumière, comme le reflet d’une lumière vive sur une plaque d’acier poli.
C’est ce que constate un observateur extérieur. Toi, le guerrier impeccable, tu te bornes à te sentir enfin prêt.
Alors, tout devient possible. Sortir du corps, planer dans l’infini, assembler d’autres mondes, habiter d’autres corps humains ou animaux… et bien d’autres merveilles dont la liste n’en finit pas.
Comment faire pour que tes yeux changent ? Rien que tu puisses contrôler avec ton mental ou ta volonté. Le seul viatique du guerrier est son impeccabilité. Elle seule ouvre les portes de la perception.
Pour regagner ton corps, pas de difficulté particulière. Ne laisse pas ta peur te gouverner. L’astral est un plan de réalité où la peur n’existe pas. Si tu as peur, tu n’es pas en astral et ta peur t’en interdit l’accès.
Laisse faire ton corps, seul maître à bord. Sortir de ton corps, tu le fais toutes les nuits. Dans ton sommeil il n’y a pas ce fichu mental pour te foutre la trouille. Alors tout se passe le mieux du monde. C’est aussi simple que respirer.
Ceux qui éprouvent des difficultés à regagner leur corps physique ont laissé la peur les dominer. Leur peur les a paralysé. À cheval entre deux mondes, le point d’assemblage oscille de l’un à l’autre.Tant que tu auras peur d’avoir peur, contente-toi de tes virées astrales nocturnes. Tâche de te souvenir de tes rêves, ça suffira pour l’instant.
Le corps se laisse volontiers gouverner par les émotions. Efforce-toi de les bannir, ne t’étonne de rien pour pouvoir t’émerveiller de tout. Il faut banaliser, rendre anodin les merveilles où tu évolues comme un poisson dans l’eau, jusqu’au jour où ton monde véritable sera l’autre monde, celui de l’astral. Dans le monde de la réalité ordinaire, tu seras comme un poisson gueule ouverte sur la berge. Comment y parvenir ? Arme-toi de patience, tout à vient à son heure.
Ne te soucie de rien d’autre. N’attends pas des merveilles futures, ce serait négliger celles que tu vis en ce moment. Ne sois pas attiré par les pouvoirs, ils viennent sans prévenir et s’en vont malgré ta volonté. Accueille-les avec simplicité, ne refuse jamais un cadeau du vivant, mais ne t’en émeus pas outre mesure : les pouvoirs ne sont rien, les attendre est crétin, les vouloir ne vaut rien. Ils sont venus, ils s’en iront. Comme l’étincelle de la vie qui s’allume à ton insu et s’éteint à son terme.
Tu veux devenir le plus puissant ? Tu te sentiras longtemps misérable et tu mourras frustré. Tu veux guérir tes semblables ? Commence par te guérir de tes infirmités. N’as-tu pas encore compris que ce n’est pas toi qui décide ? Ton ego ne peut rien, sinon te ralentir dans ton évolution. Va ton chemin, petit scarabée. Le jeune padawan ne se prend pas pour un chevalier jedi.
Padawan ! brait l’âne. Ce qui veut dire : Pas d’avoine ! Et ça le désole. Alors il se rabat sur le chardon.
J’ai rédigé la première version de cet article en 2018. En ce 15 octobre 2024, j’avoue que je ne m’inquiète plus des paradoxes de l’astral. J’y passe ma vie. Me retrouver les deux pieds sur terre m’est supplice. Vivre en astral est tout à fait possible pour un retraité comme moi. Et pour des guerriers actifs, c’est encore meilleur.
Le sens du timing reste plus utile que jamais pour ne pas louper de rendez-vous ici-bas…
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