Richard Smithl’universitaire, pas le musicien est un érudit qui a participé à l’édition intégrale des rouleaux de Nag Hammadi, première source de la gnose. R. Smith y a inclus un commentaire* que j’ai trouvé pertinent. Quand un chercheur autorisé témoigne d’une clairvoyance de visionnaire, je me réjouis pour la science et ne peux que me réjouir de me sentir moins seul.
*Richard Smith, Afterword : The modern relevance of gnosticism (RSA), in The Nag Hammadi library in English, revised edition 1996.
Cette intégrale n’existe malheureusement qu’en anglais. En attendant qu’une traduction française voit le jour, mes lecteurs apprécieront l’analyse que j’en donne ici.
La Gnose ne se limite pas aux mouvements gnostiques des premiers siècles, elle a imprégné notre culture dès son origine et nos traditions lui doivent beaucoup. Elle a survécu à travers les siècles grâce à des esprits éclairés, écrivains pour la plupart, que Smith énumère en leur donnant la parole.
Ils ne se connaissent pas forcément, ils n’appartiennent pas à un club ni à un mouvement littéraire, pourtant ils expriment tous un peu de la sagesse gnostique. Ils brisent le carcan des certitudes monolithiques de la pensée unique. Leur voix aurait pu se perdre dans la multitude bruyante de l’idéologie dominante. Ça n’a pas été le cas.
Comme ils sont peu en quête de la lumière et en défiance des certitudes admises, on les appelle un peu vite spiritualistes ou ésotéristes. Il est vrai que l’Esprit, pour eux, s’écrit avec une majuscule.
Il est vrai aussi qu’ils se sentent investis d’une mission, découvrir le diamant caché sous la gangue vulgaire que la pensée dominante a refermé sur lui. Mais leur mission n’est ni sacerdoce ni militantisme. Ils ne cherchent pas à convaincre, ils expriment leur vérité.
Qu’ils se vouent à l’ésotérisme ou à la spiritualité, la matière et le monde issu d’elle ne les intéressent que très accessoirement. Je m’inscris dans cette perspective : mes écrits participent de ces deux tendances. Loin de m’en défendre, je les revendique.
Smith a la sagesse de ne pas se cantonner aux textes antiques, il traque les prolongements du gnosticisme chez des écrivains divers, et j’admire sa démarche. Aussi ai-je voulu donner ma propre liste, à paraître dans un prochain article, La gnose et les arts.voir en fin du présent article
Parmi les appropriations modernes de la gnose, Richard Smith a relevé la poésie de William Blake, le Moby Dick de Herman Melville, les théories psychanalytiques de Carl Gustav Jung, les romans de Hermann Hesse, la pratique mystico-sociale de Rudolf Steiner, la « puissante expression littéraire du Gnosticisme » volonté de libération totale exprimée par Jack Kerouac et Allen Ginsberg, fondateurs du mouvement littéraire de la Beat Generation :
« Je salue la terrible présence des dieux, Sabaot, Jéhovah,
Astaphe, Adonaeus, Elohim, Iao, Ialdabaoth,
Éon issu d’Éon né ignorant dans un abîme de lumière,
Les reflets de Sophia qui font scintiller les galaxies songeuses,
des vortex d’étoiles, fine résille d’argent, cheveux d’Einstein! » (source)RSA, p.546
Le temps est une illusion obstinément persistante.
La Beat Generation a exercé une grande influence sur la culture américaine de l’après-guerre. Des artistes comme Bob Dylan, Pete Seeger, Joan Baez en sont les héritiers directs. Ces poètes étaient l’âme agissante des mouvements pacifistes contre la guerre du Vietnam, avec Jane Fonda, qu’accompagne en France l’élan contestataire de mai 68. Ce à quoi Jacques Dutronc, le polisson de la chanson, ajoute son grain de sel :
Il y en a qui protestent
Qui revendiquent et qui contestent
Moi je ne fais qu’un seul geste,
Je retourne ma veste
Toujours du bon côté
Le seul reproche que je puisse faire à Richard Smith est de ne pas souligner l’importance primordiale de Sophia la Sagesse, grande oubliée des théologiens papistes, grande ignorée des adeptes cathos, petite souris maline qui se fraie un chemin dans les têtes rebelles comme la mienne, persuadé que je suis de retrouver sa trace, sinon dans les textes canoniques, du moins dans ceux de Nag Hammadi ou directement dans les annales akashiques.
La relativisation du rôle capital que la Déesse a joué dans le processus de notre création est resté présente dans le celtisme et le druidisme, comme en témoigne la trinité celte composée du Père, de la Mère et de l’enfant. La Gnose est marquée par le sexisme très présent au Moyen Orient et dans les contrées judéo-arabes. Ce sexisme altère délibérément les enseignements premiers selon lesquels Sophia était assimilée à l’Éternel Féminin, à la Vierge et Mère, autrement dit à la Grande Déesse.
La Gnose de Nag Hammadi distingue deux créateurs pour les humains. Les premiers sont les Archontes, maîtres de la matière et à ce titre, les patrons de cette planète. Ils ont créé le premier humain, Adapa ou Adama, grâce à des manipulations génétiques. Cet humain était de haute taille, comme eux. Il mesurait autour de 4 mètres. Mais il n’avait pas d’âme, donc aucun accès à l’Esprit, au Soi, au Grand Tout. Ses créateurs non plus. C’est pourquoi il est écrit que Dieu a créé l’Homme à son image. Il faudrait lire : les démiurges ont créé le premier Adam à leur image.
Ensuite est intervenue la Déesse. Cet être matériel lui a semblé très réussi, aussi a-t-elle souhaité faire quelque chose pour lui. Un super cadeau. La Déesse appartient au Plérôme, le Pré-existant. Ce lieu n’est pas matériel, il est extérieur à tous les univers de matière. Les âmes immortelles proviennent toutes du Plérôme. Les êtres qui résident dans le Pré-existant ont le pouvoir de donner une âme aux êtres matériels.
La Déesse s’est éprise de notre race. Elle nous a donné une âme qui ne mourra pas. Très jeune, j’ai eu le privilège de faire plusieurs sorties de corps. J’ai pu constater que sans le poids et l’épaisseur d’un corps matériel, on vit infiniment mieux, sans tourment d’aucune sorte. C’est pourquoi en cette fin de vie matérielle, j’ai choisi de vivre presque tout mon temps en astral.
J’ai décrit les êtres immenses du Pré-existant dans cet article, Les auteurs du Big Bang. Pour compléter cette lecture, voyez aussi Big Bang, Trous Noirs et Le Grand Passage.
Malheureusement nous sommes en Kali Yuga, l’âge des ténèbres. Dans la théorie des Yugas du Shivaïsme originel, revue par Alain Daniélou, le temps terrestre se décompose en quatre âges ou yugas. Le premier est l’âge d’or qui dure 32’000 ans. Vient ensuite l’âge d’Argent, moitié moins long: 16’000 ans. Puis l’âge de Bronze ou âge des Héros, 8000 ans. Enfin l’âge où nous sommes, le yuga de Fer Sombre, 4000 ans.
Ce yuga correspond à la dormance de la Déesse. Celle-ci est reptilienne, comme les archontes. Les reptiles ont régulièrement besoin d’une période de sommeil où leur corps se régénère. La Déesse dont l’âge se compte en milliards d’années est soumise à cette loi. Tous les 60’000 ans elle doit dormir 4000 ans. C’est le kali yuga. Quand la lumière de son grand vaisseau n’éclaire plus notre planète, vient le règne des ténèbres. Les Archontes cruels et sans âme peuvent s’en donner à cœur joie…
Malheureusement plusieurs siècles nous séparent encore du retour de la Déesse. D’ici là, il faudra supporter la chienlit archontique.
Les Archontes sont les maîtres de cette planète pour la plus simple raison. Ils sont ici depuis des centaines de millions d’années. Cette espèce animale appartient au règne des grands reptiles. Ils sont l’espèce évoluée parmi les dinosaures comme nous sommes l’espèce évoluée parmi les mammifères. À ce titre et au vu de leur ancienneté, rien à faire pour s’en débarrasser. Bon gré, mal gré, il nous faut composer avec nos maîtres.
Et attendre que la déesse fasse le ménage qu’elle aurait dû faire il y a longtemps. Mais voilà : gérer une planète n’entre pas dans ses attributions. Ce n’est pas au lion de chasser les souris. Elle s’est taillé un empire dans ce secteur de la Voie Lactée. Un empire de mille étoiles et de dizaines de milliers de planètes et de satellites habités. Durant son sommeil, la Déesse doit déléguer.
S’il faut choisir entre l’Église et la Gnose, Richard Smith ne cache pas ses préférences. Jung non plus. Et moi non plus.
Carl Gustav Jung fait continuellement référence au gnosticisme dans ses écrits et a souvent été photographié « portant son anneau gnostique« . Dans Types psychologiques, il compare les enseignements de la Gnose à ceux de l’Église. Il s’émerveille devant « la vaste étendue de connaissances divulguées par la Gnose, qui, à la lumière de notre développement mental actuel, n’a pas perdu mais a considérablement gagné en valeur. » Il loue son « esprit prométhéen et créateur » et souligne ce fait : « On peut trouver dans le gnosticisme ce qui manquait aux siècles suivants : une croyance dans l’efficacité de la relation individuelle et du savoir personnel ». (RSA pp538-539)
Serpent cornu, le prince des Archontes est le dragon des légendes — du latin legenda, « qui mérite d’être lu ».
Il est vrai que les enseignements de l’Église paraissent d’une naïveté consternante quand on les compare à ceux de la Gnose des origines. D’ailleurs la récente résurgence de la Gnose chez les esprits éclairés correspond exactement au désintérêt de ces mêmes personnes pour les religions actuelles, toutes axées sur la foi et l’obéissance aux textes, toutes indifférentes à l’éveil, toutes ignorantes de la notion centrale du Soi, et des autres merveilles de l’éveil.
Qui est assez éteint pour s’en contenter ?
Dans La nouvelle science de la politique (1952), le philosophe politique Eric Voegelin voit dans l’influence croissante du gnosticisme l’essence même de la modernité. Voegelin évoque « l’expérience du monde comme un lieu étranger » qui inspire « une horreur de l’existence et le désir d’en échapper. » (RSA p542).
Tant que la Déesse ne se sera pas réveillée, les Archontes ne rencontreront aucun autre adversaire que nous-mêmes, faibles humains. Avec notre raison, nous sommes trop fragiles, trop influençables pour ces maîtres de l’hypnose. Doués d’une intelligence supérieure, leur science et leur technologie mentale ont une avance considérable sur la nôtre. Ce qui leur a permis d’enfermer la majeure partie des humains dans des organisations religieuses ou politiquesla différence est ténue qui incitent à l’endormissement.
Plongés dans une somnolence permanente, ceux-là obéissent au doigt et à l’œil, quel que soit l’ordre donné par les Sauriens. La plupart des croyants sont assez niais pour vouloir mourir pour leurs tyrans. Il a suffit de donner aux chrétiens l’exemple d’un sauveur qui meurt pour les hommes.
Personne n’a un plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’il aime, dit le cantique qu’étant enfant, je chantais à pleine voix. Il m’en a fallu du temps pour piger l’arnaque !
Il a suffit aux prélats de répéter qu’il faut l’adorer comme le dieu unique, nonobstant le fait qu’il est unique à trois. Peu importe la cohérence, quand la somme de mensonges est trop grande, les autorités ecclésiales n’ont qu’à hurler au miracle et la pilule amère est avalée. Tous, ils adorent Ialdabaoth, le sinistre salopard sans scrupule, sans honneur et sans états d’âme. Et chacun ambitionne de devenir encore plus rat que son faux dieu, qui a créé à son image le billet vert-de-gris.
Les demi-dieux Sauriens ont créé le billet vert-de-gris à leur image…
Les textes de Nag Hammadi vont plus loin que ces âneries. Ravivant les liens entre tradition et imagination, ils me captivent. Quel que soit le point de vue qu’on a sur lui, le gnosticisme est plus qu’une curiosité d’antiquaire. La gnose et son foisonnement fécond fait ressortir l’étroitesse de l’esprit contemporain rivé sur les rails de la pensée unique. Et la rouerie des religions qui en rajoutent.
Pour Smith, l’influence continuelle de la Gnose se retrouve chez de nombreux auteurs, à toutes les époques de la littérature et de la pensée occidentales. Dans la Révolte des Anges (1914), Anatole France voit la source de nos incorrigibles défauts dans le démiurge Yaldabaoth — ou Ialdabaoth.
« Le Dieu de l’ancien temps est dépossédé de son empire terrestre, et tout être pensant sur ce globe le méprise ou l’ignore. Mais qu’importe que les hommes ne soient plus soumis à Ialdabaoth si l’esprit de Ialdabaoth est encore en eux ; s’ils sont jaloux, violents, querelleurs et avides comme lui, et comme lui ennemis des arts et de la beauté ? Qu’est-ce qui les a fait rejeter le féroce démiurge ? C’est en nous-mêmes et en nous seuls que nous devons attaquer et détruire Ialdabaoth. » (Anatole France, La révolte des anges, 1914.)
Auteur étasunien de science-fiction, Philip K. Dick lui fait écho de façon troublante dans son roman Valis, publié en 1981, soit un an avant sa mort.
« Dans Valis, le personnage principal nommé Horselover Fat a une rencontre avec le divin qu’il juge cinglé. Il rencontre ensuite son thérapeute :
-Croyez-vous que l’homme est créé à l’image de Dieu ?
-Oui, dit Fat, mais la divinité créatrice, pas le vrai Dieu.
-Quoi?
Fat répond : « C’est Yaldabaoth. On l’appelle parfois Samael, le dieu aveugle. C’est un monstre cinglé.
-Qu’est-ce que vous me chantez là ? »
Höd et Samaël
Dans la Bible, l’archange Samaël qui est assimilé à Satan. Dans la mythologie nordique, l’archonte Höd ou Hoder. Les deux sont aveugles car ils n’ont pas de troisième œil. Vous en avez un, servez-vous-en.
Ils ont des yeux, qu’ils regardent ! Ils ont des oreilles, qu’ils écoutent ! Ils ont un esprit, qu’ils s’en servent ! Ils ont une bouche, qu’ils la ferment !
Höd et Samaël n’y voient que dalle… Ils ne comprennent rien aux valeurs les plus élevées. Ils ne sont que matière périssable… S’agit-il du même démiurge ? En ce cas, il n’y aurait guère de différence entre les archanges et les archontes. Prudence donc. Ma règle d’or en la matière : n’invoquez personne. Croyant à l’existence d’un dieu bon dont on cherche vainement la trace, vous risquez fort d’attirer des saloperies vivantes dont l’action est partout visible.
Les Archontes sont les maîtres du mental, autre nom de l’ego. Pensez le moins possible, laissez votre corps profond agir sans cesse à la place de votre tête. Elle est embrouillée par nos mauvais maîtres. Ces démiurges ont créé notre cerveau et ses programmes bugués.
Seuls notre corps et ses enveloppes subtiles sont directement reliés à l’incréé. Les neurones du colon échappent dans une grande mesure aux sales influences des démiurges.
La méditation sans pensée ou l’action permanente sont d’autres refuges de sérénité.
Comme l’explique si bien Philip K. Dick, nous n’avons pas été créés par le Dieu unique ni par la Grande Déesse, mais par un démiurge très inférieur, et dérangé.
Créés à l’image d’un monstre cinglé, rien d’étonnant à ce que nous le soyons aussi.
Tout ce qui détruit le vivant vient de ces monstres non humains
Montrer comment la gnose trouve de nombreux échos dans la littérature est une bonne façon de la rendre vivante. Richard Smith m’a ouvert une voie que je veux poursuivre. Dans un article à paraître, Les arts et la gnose, je vais dresser la liste des artistes contemporains qui ont ouvert leur esprit et le nôtre. Ils ont imprégné leur musique des accents conquérants d’une nouvelle gnose. Ils ont rehaussé leurs images aux couleurs vives d’une sagesse retrouvée.
Comme Richard Smith et comme Eric Voegelin, je suis persuadé que la gnose des premiers siècles connaît un nouvel élan qui démarre dans les années cinquante avec la Beat Generation et le Jazz aux Etats-Unis, et dans le même temps en Europe avec le regain du Celtisme, le néo druidisme et les traditions vikings.
Ce panorama centré sur la musique populaire et la bande dessinée devrait sortir très prochainement.
Il tient en peu de mots. La vraie connaissance n’est pas mentale. Elle vient du corps.
Cette grosse pierre sculptée pose une foule de questions auxquelles je vais tenter de répondre.
Voie royale de l'éveil, ce stage est une initiation qui ouvre la porte de l'être…
"L’Égypte pharaonique est une civilisation africaine, élaborée en Afrique par des Africains"
Vous connaissez les sept chakras qui palpitent sur le corps d'énergie. Et les autres ?
Qui a creusé ces galeries et ces villes souterraines, et pourquoi tout ce travail ?
"J'en ai haussé des femmes ! J'en ai osé des flammes !" (Cahiers Ficelle, inédit)