Quand on veut découvrir le nagualisme de Carlos Castaneda, le premier livre à lire est Voir, les enseignements d’un sorcier yaqui. Sur le chemin qui mène du chercheur de lumière à l’homme de connaissance, voir est le premier accomplissement, mais pas la première épreuve. Vivez ces étapes de l’intérieur, comme je les ai vécues.
Si les portes de la perception étaient nettoyées, tout apparaîtrait à l’homme tel qu’il est, infini. Car l’homme s’est enfermé, jusqu’à ce qu’il voie toutes choses par les fentes étroites de sa caverne.
Dans le système de connaissance de Juan Matus et de Castaneda, « voir » et « regarder » expriment deux façons distinctes de percevoir. Regarder concerne la manière ordinaire de percevoir le monde, tandis que voir évoque un processus complexe par lequel l’homme de connaissance perçoit l’essence des êtres et des choses.
On ne peut pas évoquer le voir des sorciers sans aborder de très nombreux défis que rencontre le guerrier de lumière sur son chemin d’éveil. Voir ne peut s’obtenir sans accepter ce qui le rend possible: l’humilité doit vaincre l’arrogance de l’ignorant et la suffisance de l’homme moderne. C’est la seule protection vraiment efficace contre l’ego dominant et ses dérivés que sont l’égoïsme, l’égotisme, l’égocentrisme et les briques Lego.
La connaissance commence par la connaissance de soi. Pour atteindre le voir, il faut d’abord se voir. Et pour se voir tel qu’on est, un miroir ne suffit pas. L’humilité est le miroir adéquat. Le miroir de l’âme. Ainsi pourra s’accomplir le voir en tant qu’acte sacré.
La noirceur du jour est le meilleur moment pour voir. (source)Carlos Castaneda, « Voir », p. 30 Voir, c’est déchirer le voile d’Isis, c’est arracher le vêtement du monde de la première attention, celle de tous les jours, celle du tonal.
Qui est le plus libre ? l’être ou ses vêtements ?
Voir, c’est le troisième œil qui perce les apparences. C’est la vision des auras, et non pas le « don de double vue » qui permet à Madame Irma de prédire votre avenir. Dans le meilleur des cas, Madame Irma perçoit des visions par flash qui lui viennent sans crier gare. Et quand le flash reste éteint, Madame Irma improvise selon les règles non-écrites de la psychologie de comptoir. Et ça marche ! Madame Irma ne sait pas voir. Si elle voyait, elle ne ferait pas ce qu’elle fait. Voir est un acte sacré.
On ne doit rien révéler au consultant qui touche à son avenir, c’est un crime impardonnable. Or Madame Irma le fait tout le temps… Car voir n’est pas un don, mais le résultat d’un travail sur soi, qui est toujours long et pénible. Certes, des méthodes existaient jadis pour accélérer électriquement ces processus, mais ces techniques extrêmes ne sont plus utilisées par les Nouveaux Voyants.
Ils sont formés à la dure, à l’école de la peur, à surmonter la peur viscérale de l’inconnu, pour acquérir la fluidité et la rapidité intérieure qui seules permettent d’assembler d’autres mondes.
On n’entend que ce qu’on veut entendre, et le reste, on l’oublie.
La rapidité intérieure te rend fluide. Ainsi l’énergie peut irriguer tous les chakras de façon homogène et régulière. Pas de fluidité possible tant que n’a pas maté sa peur. C’est un point capital du nagualisme, qui considère la peur comme le premier ennemi du guerrier.
Malheureusement, quand vient ce moment de vérité, Castaneda cale. Et sa peur l’emporte. Son benefactor Juan Matus prend la parole. « Tu as été effrayé et tu t’es enfui parce que tu as cru que ta personne était sacrément importante. Croire que l’on est important alourdit, rend maladroit et vain. Pour devenir un homme de connaissance, il faut absolument être léger et fluide. » (source)Carlos Castaneda, « Voir », p. 15
Et pour devenir léger et fluide, il faut traquer la suffisance. Tuer le sentiment de notre propre importance. La suffisance est une des filles de l’ego, probablement la plus bête. L’ego a beaucoup de filles, la pensée en est une. Elle vient du mental rationnel. La mauvaise part du mental. Il en possède une bonne, juste une seule : le mental intuitif. L’intuition.
Le mental intuitif est un don sacré et le mental rationnel est un serviteur fidèle. Nous avons créé une société qui honore le serviteur et a oublié le don.
Notre époque est d’une suffisance que rien ne justifie. L’être humain actuel, tel qu’il est représenté par nos élites, atteint un degré de suffisance proprement stratosphérique.
C’est la position figée du point d’assemblage qui a fait de l’homme moderne un égotiste homicide exclusivement préoccupé de sa propre image. La suffisance est la force engendrée par l’image que l’homme a de lui. C’est de l’apitoiement sur soi-même dissimulé, mais on le reconnaît sous son déguisement. Et on le démasque. En se traquant soi-même.
Sortir de la suffisance, c’est parvenir à briser le miroir de l’auto-contemplation. Les enfants y parviennent facilement, mais passé un certain âge, impossible de décoincer quelqu’un qui s’est assis sur un manche à balai. L’âge cristallise et pétrifie ce qui est souple. Les vieux déraillent, les jeunes déconnent. Seuls les mûrs se laissent manger.
Avec ses filles et ses gars en cohorte, l’avarice, l’envie, l’orgueil, la suffisance, le mépris, la haine, le viol, le meurtre, l’hypocrisie, le mensonge, la vanité et tous les autres, l’ego ne nous conduit pas vers la meilleure part de nous-mêmes, mais vers la pire. Dans un monde parfait, l’ego serait perçu comme un danger dès sa première manifestation. Toutefois, dans ce monde pervers où tout marche à l’envers, l’ego est utile au début, quand on est trop fragile pour survivre sans haine. Quand on est petit et qu’on se sent misérable, sans défense dans ce monde trop dur, on n’a d’autre choix que de se tourner vers lui. L’ego est le meilleur outil pour cultiver sa propre gloire et la haine de l’autre.
On consacre la première moitié de sa vie à se forger un ego solide, et la seconde moitié à s’en débarrasser.
Comment veux-tu arriver à voir si tu ne vois même pas qui tu es? Seule l’humilité débouche sur les pouvoirs, fruits de l’éveil. Un être plein d’ego est à l’opposé de l’éveil. Jamais il ne pourra voir l’invisible. Sans le voir, pas de savoir.
Au prix de terribles efforts, le guerrier de lumière parvient à se libérer de ses chaînes. Il a vaincu sa peur, il a maîtrisé son ego, pour lui s’ouvre en grand la porte du Soi. C’est une magnifique réalisation. Le chemin, si dur fut-il, ne fait pourtant que commencer. La conquête du voir impose un vouloir ferme et constant, une lutte de chaque instant.
Voir est donc une connaissance bien enviable ? Pas tant que ça. Tant qu’on n’a pas le voir, on ne sait ni qui on est ni qui sont ceux que nous croisons. On marche à l’aveuglette dans un monde hostile, dangereux, haineux, irréductible. On n’en possède pas la moindre clé. Impossible d’en ouvrir les tiroirs, ses écritoires et ses armoires. Rien ne nous est accessible, et notre ignorance peut nous mener droit vers la mort.
Le guerrier sans voir ne se connaît pas lui-même, pas plus qu’il ne comprend les autres. Le guerrier qui voit comprend aussitôt, perçoit le non-dit, débusque les cachettes. Sachant qui il est, il sait où il va. Sachant d’où il vient, il sait pourquoi il s’est battu jusqu’alors. Avec le voir, la rage et la guerre prennent fin. La connaissance est la seule façon pour un guerrier d’obtenir la sérénité.
Quand on voit, les hommes paraissent différents, comme des fibres de lumières. Comme de blanches toiles d’araignée, des fils très fins qui vont de la tête au nombril. L’homme ressemble alors à un œuf de fibres vivantes. Ses bras et ses jambes deviennent de lumineux fils de soie scintillant dans toutes les directions. Chaque homme est en contact avec tout le reste grâce à un faisceau de longues fibres jaillies du centre de son ventre. Ces fibres mettent l’homme en relation avec la totalité de son environnement, elles préservent son équilibre, elles lui confèrent la stabilité. (source)Carlos Castaneda, « Voir », p. 28
Dans ma pratique du reiki, je travaille en harmonie avec ces fibres. Sur le plan subtil, nous sommes tous faits pareil. Homme ou femme, vieillard ou enfant, nous avons tous l’apparence d’un œuf lumineux constitué de fibres vivantes.
Je travaille non seulement sur les sept chakras qui irriguent le corps physique, mais aussi sur les chakras secondaires et sur les chakras racine et les chakras frondaison. Alors la connaissance des fibres est nécessaire. Mais la vision subtile n’est pas indispensable.
À défait de voir avec le troisième œil, la plupart des voyants se contentent de savoir. Quand je demande à l’un d’eux la couleur d’une aura, il me la dit sans se tromper et peut même en décrire les nuances. Si je lui demande s’il la voit, il proteste et nie. Il ne la voit pas, mais qu’importe? Il la sait.
Le premier savoir est le savoir de mon ignorance : c’est le début de l’intelligence.
Voir est un acte révolutionnaire. Un élan libertaire. L’accueil à bras ouvert de la liberté vraie. Commence alors seulement le règne du libre arbitre. Sa médaille conquise de haute lutte. Comme toute médaille, voir a son revers. « Une fois que l’homme apprend à voir, il se retrouve seul dans le monde avec rien d’autre que de la folie. » (source)Carlos Castaneda, « Voir », p.83
Folie des sages, sagesse des fous. Pour ne pas être seul, l’homme peut choisir d’être vaincu. Rejoindre sereinement le camp des fous, ses frères mineurs. Le fait d’être vaincu est inévitable. On est soit victorieux, soit vaincu, donc bourreau ou victime. Parfois – le plus souvent – on est les deux.
« Voir chasse l’illusion de la victoire, de la défaite, de la souffrance. » (source)Carlos Castaneda, « Voir », p.137 Voir chasse la maya, diraient les Tibétains. Un jour, Castaneda demande à son benefactor : « pensez-vous que les Tibétains voient ? – J’en doute, répond don Juan. Quand un homme apprend à voir, pas une seule chose ne prédomine parmi toutes celles qu’il connaît. Pas une seule. Si les Tibétains pouvaient voir, ils s’en apercevraient sur le champ. » (source)Carlos Castaneda, « Voir », p.189
L’implacabilité est à l’opposé de la suffisance. N’y voyez pas la cruauté, mais la sobriété. C’est l’arcane XIV du Tarot initiatique : la Tempérance… À force de tempérer son humeur, de modérer ses réactions, le guerrier sort complètement de l’auto-apitoiement. C’est une grande liberté pour l’esprit et une sévère défaite pour l’ego.
Il faut une bonne dose d’implacabilité pour rendre à quiconque le seul véritable service qu’on puisse offrir, lui ouvrir les yeux sur lui-même. Jouer le rôle pénible du petit tyran pour l’amener soudain à se voir tel qu’il est, jusqu’au moment inévitable où le miroir tombe en miettes. « La seule aide concrète qu’on puisse apporter à quelqu’un : l’aider à briser son miroir d’auto-contemplation. » (source)
Laissez-moi vous dire que c’est mal vu, et souvent mal vécu. Mais sommes-nous là pour se beurrer le moule en chantant les louanges de nos matons et la qualité de nos conditions de détention? Ou sommes-nous là pour trouver notre vérité ? À votre avis ? Moi j’ai choisi.
L’homme a ce choix : laisser entrer la lumière ou garder les volets fermés.
« La sorcellerie est un voyage de retour. Nous retournons victorieux vers l’esprit après être descendus en enfer. Et de l’enfer, nous rapportons des trophées. La compréhension en est un. » (source)
La religion est pour ceux qui ont peur de l’enfer. La spiritualité, pour ceux qui y sont déjà allés.
« Chaque guerrier engagé sur le chemin de la connaissance croit, un jour ou l’autre, qu’il est en train d’apprendre la sorcellerie, mais il ne fait que se laisser convaincre du pouvoir que recèle son être, et du fait qu’il peut y accéder. » (source)
On n’apprend pas la sorcellerie. Elle se révèle à nous. Elle nous sourit un beau matin, et nous savons que nous l’avons toujours connue. La vie du guerrier et du sorcier est le mode de vie de nos ancêtres durant des dizaines, voire des centaines de milliers d’années. Seul l’avènement du kali yuga nous en a privés.
Vivre en guerrier est certainement ce qu’il y a de meilleur pour l’homme. Nos contemporains sont persuadés du contraire par leur suffisance. Ils croient que leur mode de vie dégénéré et dépendant est supérieur, alors qu’il suffit d’ouvrir les yeux sur la misère, la tristesse et l’exclusion pour être sûr du contraire.
Don Juan Matus évoque souvent le danger de voir sans être guerrier. (source)Carlos Castaneda, « Voir », page 208 Voir exige une discipline de fer.
La seule chose pire que d’être aveugle, c’est avoir la vue et pas de vision.
Il explique à Carlos en quoi consiste son système de croyances. Carlos Castaneda appelle « sorcellerie » cet ensemble de connaissance compliqué et très organisé, et désigne don Juan comme « sorcier » car son benefactor usait de ces deux mots au cours de leurs conversations familières. « Cependant lorsqu’il s’agissait d’apporter des éclaircissements sur des points plus sérieux, il usait du terme « connaissance » pour signifier la sorcellerie, et de celui « d’homme de connaissance » ou de « celui-qui-sait » pour désigner le sorcier.
Je l’ai imité dans tous mes articles consacrés au nagualisme. Et celui qui s’engage dans ce chemin de connaissance, comme je l’ai fait moi-même, je l’appelle guerrier de lumière, ou simplement guerrier.
On voit que le sorcier n’est pas cet être malfaisant que véhiculent nos légendes et contes de fées. Les sorcières et les sorciers que la Sainte Inquisition a brûlé sur le bûcher n’étaient pas des méchantes gens, bien au contraire. Mais ils possédaient une connaissance sacrée issue de la vieille religion des Druides, c’était le pire des crimes pour les bourreaux de la nouvelle religion.
Chez les Indiens la notion de sorcier diffère totalement de la nôtre, gens de civilisation occidentale. C’est aussi le sens donné à ce mot par don Juan.
Avoir faim ou souffrir signifie que l’homme s’est laissé aller et qu’il n’est plus un guerrier. Les forces de sa faim et de sa souffrance le détruiront. (source)Carlos Castaneda, « Voir », p. 141
Un guerrier ne se laisse aller à rien, même pas à sa mort. Un guerrier n’est jamais un partenaire bénévole. Un guerrier n’est pas disponible. (source)Carlos Castaneda, « Voir », p. 176
Un sorcier n’a pas besoin de voir pour être sorcier. Il a seulement besoin de savoir comment faire usage de sa volonté. (source)Carlos Castaneda, « Voir », p. 193 Comparé à celui qui voit, le sorcier n’est qu’un pauvre gars. (source) Carlos Castaneda, « Voir », p. 193
Un sorcier n’est guère mieux loti que l’homme moyen. La sorcellerie l’embarrasse, elle le rend vulnérable. Les forces inexplicables et inflexibles qui nous entourent tous (…) constituent pour le sorcier un risque encore plus important. (source)Carlos Castaneda, « Voir », p. 208
Un sorcier, en s’ouvrant à la connaissance, devient la proie de ces forces et n’a qu’une seule chose à leur opposer : sa volonté. Donc il doit percevoir et agir comme un guerrier. Sur le chemin de la connaissance, on ne peut survivre qu’en étant un guerrier. (source)Carlos Castaneda, « Voir », p. 208
Dans la vie de l’homme de connaissance, il n’y a pas de vide. Tout est rempli à ras bord. Pour devenir un homme de connaissance, sois un guerrier, pas un gamin pleurnicheur. (source)Carlos Castaneda, « Voir », p. 89
Efforce-toi, sans renoncer, sans fléchir, jusqu’à réussir à voir, et te rendre compte que rien n’est important. (source)Carlos Castaneda, « Voir », pp. 89-90
Tout nos actes sont inutiles, et malgré tout nous devons faire comme si nous ne le savions pas. C’est ça la folie contrôlée des sorciers. (source)Carlos Castaneda, « Voir », p. 79
Que peut avoir un homme en dehors de sa vie et de sa mort ?
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